Dans un embryon de mammifère, les neurones de l'intestin se développent à partir de cellules souches, et se réorientent selon la circonférence de la paroi intestinale. Puis, de l'embryon jusqu'à l'âge adulte, le réseau de neurones se développe par simple expansion. Ces deux mécanismes ont été mis en évidence grâce à une collaboration entre le laboratoire Matière et systèmes complexes et l'Institut Mondor de recherche biomédicale.
Avec ses quelques 100 millions de neurones, l'intestin est souvent qualifié de ''second cerveau'' de notre corps. Le système nerveux entérique contrôle à la fois l'activité chimique et mécanique de l'intestin. Durant la croissance de l'embryon, il se développe à partir de cellules souches qui migrent vers la paroi de l'intestin. Mais les mécanismes qui régissent la mise en forme de ce réseau de neurones étaient jusqu'ici mal connus. Ils viennent d'être élucidés par une équipe de scientifiques du laboratoire Matière et systèmes complexes (MSC, CNRS/Université de Paris) et de l'Institut Mondor de Recherche Biomédicale (IMRB, Inserm/Université Paris Est Créteil) en collaboration avec les plateformes d'imagerieImag'IC et ImagoSeine.
Le premier mécanisme mis en évidence par l'équipe, qui a travaillé avec des modèles de souris, est la réorientation des neurones selon la circonférence de la paroi intestinale. Les neurones, initialement sans orientation spécifique, vont peu à peu s'aligner sur l'orientation donnée par les fibres de collagènes secrétées par le tissu musculaire avec lequel ils sont en contact (voir la vidéo).
Ensuite, le réseau de neurones se développe en suivant la croissance de l'organe, mais sans qu'il y ait création de nouvelles cellules nerveuses. En effet, les neurones, condensés en ganglions, sont reliés par des faisceaux d'axones, et les contractions spontanées du muscle intestinal provoquent un allongement continu des fibres entre les ganglions: le réseau se développe par simple expansion. Ainsi, le réseau de neurones intestinal, confiné dans un tube d'environ 1 centimètre de long chez un embryon de huit semaines, s'étend finalement sur près de 10 mètres chez l'adulte. Soit une expansion d'un facteur 1000...
Ces résultats montrent le rôle essentiel joué par une simple tension mécanique (la contraction spontanée du muscle) dans la croissance d'un organe. Ils pourraient aussi éclairer les recherches menées sur le traitement de la maladie de Hirschsprung, caractérisée par un défaut d'innervation du côlon.
How smooth muscle contractions shape the developing enteric nervous system.
Chevalier, N., Amedzrovi-Agebsi, R., Ammouche, Y., and Dufour, S. Frontier in Cell and Developmental Biology, juin 2021.
DOI: https://doi.org/10.3389/fcell.2021.678975
A neural crest cell isotropic-to-nematic phase transition in the developing mammalian gut.
Chevalier, N. R., Ammouche, Y., Gomis, A., Langlois, L., Guilbert, T., Bourdoncle, P., et al. Communications Biology, 23 juin 2021.
DOI: https://www.nature.com/articles/s42003-021-02333-5#data-availability.