Des chercheurs du laboratoire Matière et systèmes complexes (CNRS/Université Paris Diderot) ont développé une méthode optique de détection du passage d'une molécule fluorescente à travers un seul nanopore. Cette prouesse expérimentale ouvre la voie à la compréhension d'un grand nombre de phénomènes allant de l'ultrafiltration aux échanges de matériel génétique entre le noyau et le cytoplasme des cellules biologiques. Ces travaux sont publiés dans Physical Review Letters.
A) Schéma de principe du dispositif expérimental. Les molécules d'ADN sont poussées par le flux de solvant à travers le nanopore et éclairées uniquement lors de leur passage à l'extrémité du pore. B) Instantanés de molécules uniques d'ADN sortant d'un nanopore visualisées en Zero-mode Waveguide. Durée d'acquisition: 10 ms. Illustration: CNRS/Fabien Montel – Laboratoire matière et systèmes complexes.
De nombreux processus chimiques et biologiques (filtration, translocation de protéines, infection virale) font intervenir le transport de macromolécules dans des nanostructures, naturelles ou artificielles, impliquant des confinements forts. Ces systèmes constituent des situations modèles pour tester les théories de physique hors équilibre où les effets entropiques deviennent dominants. Les développements technologiques réalisés depuis une dizaine d'années permettent aujourd'hui d'envisager l'observation du passage de molécules à travers un nanopore.
Les chercheurs du laboratoire Matière et systèmes complexes (CNRS/Université Paris Diderot), en collaboration avec des chercheurs du Laboratoire analyse et modélisation pour la biologie et l'environnement (CNRS/CEA/Université Evry-Val-d'Essonne) et du Mechanobiology Institute (National University of Singapore) ont développé une méthode optique de détection du passage d'une seule molécule fluorescente à travers un seul nanopore. Pour y parvenir, ils ont réalisé un dépôt d'or nanométrique sur une membrane, qui avec le nanopore, constitue une structure nanophotonique appelée "zero-mode wave guide". En soumettant des molécules d'ADN à un écoulement (un flux hydrodynamique), ils ont réussi à observer la déformation d'une chaîne à l'échelle de la molécule et à déterminer le débit critique de passage. L'existence de ce débit critique avait été prédite par Pierre-Gilles de Gennes et Françoise Brochard dans les années 1970. De manière surprenante, les chercheurs montrent que ce débit seuil est indépendant de la taille du polymère et des dimensions du pore. Il dépend en effet uniquement de l'énergie thermique et de la viscosité du milieu.
Ces travaux valident donc l'usage de cette méthode pour détecter le passage d'une molécule unique dans un nanopore. Adaptée à différentes molécules, cette méthode de détection pourrait trouver de nombreuses applications: nouvelles méthodes de séquençage ultrarapide, systèmes de filtration et de purification de protéines intelligents...
Cette étude est menée dans le cadre d'une recherche sur la mise au point de pores nucléaires artificiels soutenue par le Labex WhoAmI?
Pour plus d'information voir:
http://www.labex-whoami.fr/fr/presentation
http://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.113.028302