Un radar français de surveillance de l'espace a détecté entre 20 et 30 satellites en orbite basse terrestre qui ne figurent pas dans le catalogue publié par le département de la défense des USA. Certains responsables français ont déclaré qu'ils utiliseront cette découverte pour faire pression sur les autorités américaines afin que celles-ci cessent de publier les positions des satellites français de reconnaissance et de télécommunications militaires.
Lancement du satellite militaire français d'observation Helios 2A en 2004
Après 16 mois d'utilisation du système radar Graves, capable de localiser les satellites dans des orbites allant jusqu'à 1 000 kilomètres d'altitude, voire plus, le ministère français de la défense indique qu'il a recueilli suffisamment d'informations pour entamer des pourparlers avec les Etats-Unis.
Le réseau de surveillance de l'espace américain est la référence mondiale en matière de catalogage des satellites et des débris en orbite basse ou géostationnaire (à 36.000 kilomètres pour ces derniers) où opèrent les satellites de télécommunications. Les données du réseau américain sont régulièrement publiées et utilisées dans le monde entier par ceux qui suivent la trajectoire des satellites et des débris spatiaux. Ces informations excluent les satellites américains sensibles, mais ne se privent pas de fournir des données sur les orbites des matériels militaires des autres nations.
Lors des présentations faites sur le site de l'installation du radar Graves, les responsables français de la défense ont déclaré qu'ils recueillent désormais des données sur les satellites classifiés en orbite basse dans le cadre d'un futur programme européen de surveillance de l'espace que les pays associés à l'ESA devront approuver en 2008. Ce programme, d'un coût approximatif de 300 millions d'euros, comporterait des radars à hautes performances de suivi des débris spatiaux en orbite basse et géostationnaire. Ce programme de surveillance peut être ou ne pas être approuvé par les gouvernements européens. Mais selon les responsables français, le radar Graves, ainsi qu'un système complémentaire supervisé par le gouvernement allemand, constitue déjà un système capable de détecter précisément l'emplacement, la taille, l'orbite et les fréquences de transmissions de certains satellites américains, informations dont les Etats-Unis préféreraient éviter une divulgation mondiale.
"Nous avons discuté des résultats de Graves avec nos collègues américains et avons mis l'accent sur des contradictions entre ce que nous avions détecté et ce qui est publié par le réseau de surveillance spatial US", indique un responsable français du système radar. "Il nous a été répondu que 'si les informations n'étaient pas publiées dans le catalogue, c'est que ces objets n'existaient pas.'... Cependant il apparaît que certains de ces objets inexistants possèdent des panneaux solaires !"
Le colonel Yves Blin, chef du bureau Espace de la division Espace/SIC de l'EMA, indique que la France attendrait jusqu'à ce qu'elle ait obtenu, à l'aide du radar allemand, des informations complémentaires sur les 20 à 30 satellites secrets en question avant de commencer des négociations sérieuses avec les Etats-Unis sur une approche commune pour la publication des informations sur les orbites de satellites. "En ce moment nous n'avons pas assez de cartes en main pour entamer des négociations," affirme le colonel français. "Nous avons besoin de plus de temps, d'être sûrs de ce que nous observons. A l'heure actuelle nous disons à nos amis américains: 'nous avons vu des choses que vous pourriez souhaiter garder en dehors du domaine public. Nous accepterons de le faire si vous acceptez en retour de cesser de publier l'emplacement de nos satellites sensibles."