Explorer l'époque de réionisation de l'Univers par le rayonnement à 21 cm

Publié par Michel,
Source et illustrations: Observatoire de parisAutres langues:
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L'Univers est entré dans un âge sombre, juste après que les atomes d'hydrogène se soient recombinés, et avant que les premières sources (étoiles et quasars) puissent se former et envoyer leur première lumière. Cette lumière a commencé à réioniser l'hydrogène, d'abord autour des sources, puis progressivement l'Univers entier s'est réionisé. Cette époque de réionisation est estimée durer entre les redshifts de 12 à 6 (ou quand l'Univers avait entre 3 et 7 pourcents de son âge). Observer la raie émise par l'hydrogène à 21cm, décalée vers les longueurs d'onde métriques, pendant cette époque, permettra d'étudier la formation des premières structures de l'Univers. Les astronomes de l'observatoire de Paris ont prédit le signal à 21cm par des simulations numériques, traitant le transfert radiatif avec moins d'approximations que les travaux précédents. Ils prouvent que le signal serait plus fort et plus facile à observer au début de l'époque.


Image d'une simulation de l'époque de réionisation.
L'échelle est indiquée dans la figure, 1 Mpc ~ 3 10^22 m.
Le cube simulé représente une partie de l'Univers au redshift z~7.5, quand l'IGM est 50% réionisé.
L'IGM ionisé est représenté en bleu translucide et l'IGM neutre est entouré par des surfaces rouges et bleues.
Une fois que l'IGM est ionisé, il est optiquement mince et transparent,
mais l'IGM neutre est optiquement épais.

Quand les premières étoiles se sont formées (il y a environ 13,3 milliards d'années), l'image du jeune Univers était très différente d'aujourd'hui. Après le Big Bang, la température du fond cosmologique était assez haute pour maintenir les baryons dans un état de plasma, puis elle est tombée en raison de l'expansion adiabatique de l'Univers. Environ 400 000 ans après le Big Bang, les protons se sont recombinés avec les électrons libres pour former des atomes d'hydrogène neutres: c'est le premier changement de phase de l'Univers. Le rayonnement du fond cosmologique (CMB) émis pendant cette recombinaison nous indique que la formation des structures dans l'Univers démarre avec un champ très homogène en densité. Puis l'Univers entre dans l'âge sombre, qui dure jusqu'à ce que les premiers objets liés gravitationnellement se forment et émettent la première lumière. Les premières étoiles étaient enfouies dans un Milieu InterGalactique (IGM) principalement neutre, mais le rayonnement UV des premières étoiles a commencé à réioniser l'IGM. C'est le deuxième changement de phase de l'Univers, de l'état neutre à l'état ionisé (quand l'Univers avait entre 1 et 7 pourcents de son âge), appelé l'époque de réionisation.

L'époque de réionisation commence à la naissance des premières étoiles. Nous ne savons pas exactement quand les premières étoiles se sont formées, ceci n'est pas donné dans les simulations, par manque de dynamique et de résolution spatiale. La fin de la réionisation devrait se produire au redshift z~6, comme le prouve l'observation des spectres d'absorption des quasars distants, indiquant un IGM complètement ionisé après ce redshift. Observer et explorer l'IGM pendant l'époque de réionisation est très important pour étudier la formation des premières étoiles et des premiers quasars.

Le rayonnement (1) à 21 cm, émis à la transition entre l'état singlet et triplet de l'atome d'hydrogène dans son état fondamental d'énergie, est excellent pour explorer l'IGM pendant la réionisation, parce que l'IGM se compose de 75% d'hydrogène et de 25% d'hélium (en masse). Comme le rayonnement à 21 cm est optiquement très mince, il se propage sans être absorbé ou dispersé par des nuages de poussière et de gaz. Il est très utile pour étudier la topologie et d'autres propriétés de l'IGM pendant la réionisation. Dans la prochaine décennie, de grands radio-interféromètres métriques (LOFAR, MWA, SKA) commenceront à être opérationnels et à observer le signal 21 cm à ces redshifts élevés (z=6-11).


Les cartes de signal à 21cm prédites par les simulations, à 3 époques différentes (z=10, 8.5 et 7.6).
Chaque panneau correspond à une région 1° par 1° du ciel, et l'épaisseur de la tranche est ~ 2 Mpc.
Le signal à 21 cm est observé par la différentielle de la température de brillance Delta-Tb, en mK.
Le signal est soit en émission (dTb > 0 mK) soit en absorption (dTb < 0 mK).
Une fois que l'IGM est ionisé par les sources UV, il n'y a plus d'atome d'hydrogène, et plus de signal 21cm,
d'où la prédiction 0mK dans la région ionisée orange, délimitée par le contour noir.
Pendant les premières phases de la réionisation, le signal est observé en régime d'absorption forte
(par le gaz d'hydrogène plus froid que le CMB), en particulier autour des sources.

La modélisation du signal par des simulations numériques avant l'observation est une étape essentielle afin d'optimiser la conception des instruments et l'analyse de données. L'équipe de l'Observatoire de Paris a prédit le signal à 21 cm pendant la réionisation par des simulations de transfert radiatif. On doit connaître ou estimer beaucoup de paramètres physiques de l'IGM et de nombreuses propriétés des sources, pour dériver le signal à 21cm: le champ de densité, la vitesse, la fraction d'ionisation, la température cinétique, le flux local de photons Lyman-alpha de l'hydrogène , etc.... Tous ces éléments ont été estimés et calculés avec moins d'hypothèses simplificatrices que les études précédentes afin de prédire une carte plus exacte du signal 21 cm pendant la réionisation. Ces calculs ont montré qu'un flux local de Lyman-alpha non homogène multiplie l'amplitude du signal à 21 cm par un facteur 10, par rapport aux travaux précédents qui supposaient un flux homogène de photons Lyman-alpha. Ces résultats impliquent que les observations de la réionisation très tôt dans l'Univers (z>10) bénéficieront probablement d'une valeur signal-sur-bruit plus élevée que pendant les stades avancés. En outre, différents sortes de sources ionisantes ont été considérées, modifiant les propriétés statistiques du signal à 21 cm. Les observations permettront donc de contraindre la nature des premières sources.

Note:

(1) En fait, c'est une transition interdite, dont la probabilité est très faible, mais nous pouvons l'observer grâce au grand nombre d'atomes d'hydrogène sur chaque ligne de visée.
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