Les bisous prodigués au charmant petit animal peuvent entrainer des infections. (Photo: iStockphoto)
La bouille sympathique de Rémy, le rat gastronome du film Ratatouille, et les aventures rocambolesques vécues par Ron Weasley et son rat Croûtard dans la saga des Harry Potter ont séduit les enfants de par le monde. Pas étonnant que le rat domestique gagne en popularité depuis quelques années! Certains parlent même de "l'effet Ratatouille". Docile et câlin, cet animal peut néanmoins transmettre à ses propriétaires une zoonose appelée fièvre par morsure (FMR). Et contrairement à ce que laisse entendre son nom, cette infection peut être contractée par un baiser ou une égratignure. Non traitée, elle se révèle mortelle dans 7 à 10 % des cas. Cela fait dire à la résidente en pédiatrie Karine Khatchadourian que "les enfant ne devraient pas posséder un rat comme animal de compagnie".
Au cours de sa résidence au CHU Sainte-Justine, Mme Khatchadourian a observé que les rats domestiques constituaient un problème croissant en pédiatrie. Depuis 2000, on a répertorié un cas de FMR chez un adulte et deux chez des enfants au Canada. Mais entre janvier 2006 et septembre 2007, l'hôpital pour enfants a accueilli un jeune atteint de FMR et deux autres potentiellement infectés. "Au service des maladies infectieuses, nous étions plutôt perplexes et soucieux devant une telle concentration de cas", raconte la résidente en pédiatrie, qui les a rapportés dans la revue Paediatrics & Child Health.
Diagnostic ardu
Les pustules hémorragiques aux pieds font partie des symptômes de la fièvre par morsure.
La FMR se caractérise par une fièvre forte et soudaine, des douleurs articulaires et des lésions importantes aux mains et aux pieds. "Diagnostiquer cette maladie demeure très difficile, car on peut la confondre avec plusieurs autres infections virales et bactériennes comme la méningococcémie, la maladie de Lyme et la fièvre pourprée des montagnes Rocheuses", signale Karine Khatchadourian, qui a quitté le Québec il y a peu pour poursuivre ses études en endocrinologie pédiatrique à Vancouver. Et comme ce n'est pas une maladie à déclaration obligatoire, peu de cas sont officiellement documentés. Depuis 1938, seulement 65 cas ont été détaillés dans la littérature médicale et la plupart sont américains.
Les enfants traités au CHU Sainte-Justine, un garçon et deux filles âgés de 7 à 13 ans, présentaient tous une variété de symptômes pouvant mener à des erreurs de diagnostic: fièvre élevée, douleurs abdominales, vomissements, forts maux de tête, diarrhée, douleurs au cou, aux poignets, aux hanches et aux genoux et lésions et pustules hémorragiques aux mains et aux pieds.
Malgré une batterie de tests, les pédiatres en sont arrivés à un diagnostic de FMR lorsqu'ils ont découvert que ces enfants possédaient un rat depuis un certain temps. Aucun n'avait été mordu, mais tous avaient été légèrement égratignés par leur rongeur et l'avaient embrassé à quelques reprises. Un seul cas a pu être confirmé grâce à une culture microbiologique. Tous les patients ont recouvré la santé après un traitement à la pénicilline.
Karine Khatchadourian
Prévention
Pour les pédiatres, les répercussions sociales de ce phénomène sont grandes, estime Karine Khatchadourian. "Ils devraient interroger les parents sur la présence d'animaux à la maison et, dans le cas des rats, leur expliquer les conséquences de leur choix." Sans les forcer à se départir de leur animal, les pédiatres devraient être fermes dans leurs recommandations, ajoute-t-elle.
Elle doute même de la pertinence de vendre ces animaux dans les magasins spécialisés et à la SPCA, où l'on peut se les procurer pour quelques dollars, contrairement aux chiens et aux chats, qui sont beaucoup plus couteux. "Les employés de ces établissements manipulent les rats avec des gants, observe-t-elle. Même chose pour les techniciens de laboratoire. Il n'est pas réaliste de demander aux enfants de faire de même ou de leur interdire de cajoler et d'embrasser leur petit rongeur."
Alors, avis aux parents: si votre enfant veut absolument un animal de compagnie, tenez-vous-en au chien ou au chat...