Comme vous le savez déjà, un Boeing 777-200 ER de la compagnie Asiana Airlines s'est écrasé lors de son atterrissage sur la piste 28 de l'aéroport de San-Francisco samedi dernier. Nous avons consacré un premier article que vous pouvez consulter ici au sujet de cet accident: lien. Depuis, de nouveaux éléments sont apparus et permettent d'en savoir un peu plus sur les conditions qui ont mené au drame.
Un Boeing 777-200 (ici en version LR) lors du salon du Bourget 2005 (photo jyb pour Techno-Science.net)
Composition de l'équipage composant les pilotes
Le commandant de bord, bien que très expérimenté, notamment sur 747, était en formation. Il n'avait que 43 heures d'heures de vol sur 777. Cependant, il était accompagné d'un instructeur qui était installé à la place du copilote. L'avion effectuant un long trajet transocéanique, un troisième pilote était présent à bord, mais ce dernier n'était pas forcément dans le poste de pilotage au moment de l'accident.
Sur le papier, il s'agit d'un équipage tout à fait performant: un élève déjà très expérimenté sur vols long-courriers qui effectue son métier de la manière la plus consciencieuse possible sous le regard d'un instructeur qui peut à tout moment corriger les erreurs et même reprendre les commandes de l'appareil si besoin. Dans la pratique, plusieurs accidents se sont déroulés avec une configuration de personnel similaire: le pilote élève peut être tétanisé face à l'enjeu de satisfaire l'examinateur tandis que ce dernier, plus préoccupé de savoir comment réagit son élève, peut laisser empirer une situation délicate. Ce phénomène a été soupçonné d'être un facteur aggravant lors de certains accidents.
Vidéo amateur du crash
L'élément le plus spectaculaire qui a été rendu public lundi est une vidéo amateur montrant les dernières secondes du vol du Boeing 777-200. Cette vidéo montre que l'avion était en approche à une vitesse lente et confirme une pente bien trop raide menant l'avion vers la baie plutôt que vers la piste. Au dernier moment, l'avion se redresse et vole au raz de l'eau, provoquant d'importantes gerbes d'eau. L'avion se cabre finalement et l'arrière touche la digue. Tandis que l'arrière se disloque, le reste de l'avion fait une étonnante figure acrobatique avant de tomber à plat et de glisser sur le sol.
Certains commentateurs ont déclaré que l'avion était alors au contact de l'eau, mais dans une telle éventualité, l'avion n'aurait pas pu reprendre de l'altitude pour se retrouver ensuite sur la piste.
Premières données des boites noires
Les premières données rendues publiques permettent d'établir que l'approche de l'avion a été effectuée à une vitesse trop lente par rapport à une approche normale. Une telle lenteur peut expliquer la pente de descente trop abrupte et donc le fait que l'avion se soit finalement retrouvé trop bas au moment d'atteindre le seuil de piste.
A ces données, il convient d'ajouter une précision importante: l'inertie des moteurs. Le Boeing 777 utilise les plus gros réacteurs du monde, ce qui est normal pour le plus gros biréacteur du monde. Les réacteurs du 777 sont même plus gros que ceux équipant l'Airbus A380 ! Cela a une conséquence: une inertie plus importante. Lorsque le pilote remet la pleine puissance, il va se passer un temps de latence avant que les réacteurs soient effectivement à pleine puissance. Et plus le régime de départ des réacteurs est lent, plus ce temps sera important.
Dans le cas du 777, ce temps de latence peut être de 6 secondes, pour remettre les gaz après une approche normale. A cela s'ajoute l'inertie de l'appareil lui même: une fois les réacteurs à régime élevé, il va se passer un temps pour que l'avion reprenne une vitesse normale. Tout cela est tout à fait commun pour un gros porteur, mais signifie qu'il faut une anticipation accrue.