Hydrogène: et si l'on copiait les plantes ?

Publié par Michel,
Source: CNRSAutres langues:
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Sur le papier, l'hydrogène est une source d'énergie sans pareille. À condition de trouver une solution durable pour le produire en masse. Des chimistes s'en rapprochent en s'inspirant... de la photosynthèse des plantes.

Candidat au statut de source énergétique de masse, l'hydrogène a un gros atout sur son curriculum vitae: sa combustion n'engendre aucun gaz à effet de serre. Hélas, il n'en existe aucun gisement sur Terre. Il faudra donc le produire industriellement si l'on veut qu'il remplace un jour l'essence de nos voitures. Tout récemment, Ally Aukauloo, Pierre Millet et Élodie Anxolabéhère-Mallart, à l'Institut de chimie moléculaire et des matériaux d'Orsay (ICMMO), viennent de franchir deux nouvelles étapes vers un procédé propre et économiquement viable de synthèse de l'hydrogène. Leur source d'inspiration ? Les plantes, et plus précisément la photosynthèse, qui leur permet de créer de la matière à partir de l'énergie solaire. Cette idée pourrait rapidement gagner du terrain parmi les nombreuses pistes envisagées pour la production d'hydrogène.

Pour produire de l'hydrogène avec de l'eau, la nature propose donc la photosynthèse. Comme l'explique Ally Aukauloo, "au cours d'une première étape, la photosynthèse permet l'absorption de la lumière solaire, sa conversion en énergie chimique, puis l'acheminement de celle-ci vers un centre réactionnel du végétal où sont dissociées les molécules d'eau (qui perdent alors des électrons pour former de l'oxygène gazeux et des protons). Ensuite, les protons et les électrons qui en sont issus sont utilisés sur d'autres sites réactionnels, pour la synthèse de nouvelles molécules tels des sucres ou... de l'hydrogène." Évidemment, ces différentes étapes nécessitent une "usine" moléculaire d'une rare complexité, et façonnée par des millions d'années d'évolution. Et comme le précise le chimiste, "pour l'heure, il est exclu de la reproduire artificiellement. Toutefois, les outils de la chimie permettent de s'en inspirer". On parle de procédés bio-inspirés.

Prenons le cas de la première étape de la photosynthèse. Elle est l'œuvre de la chlorophylle, un pigment qui capte et convertit l'énergie lumineuse. La dissociation de l'eau se produit sur un complexe chimique à base de manganèse. De multiples combinaisons seront à tester avant de trouver le système chimique qui réalisera artificiellement cette étape le plus efficacement possible. Mais les chimistes d'Orsay, dans le cadre d'un financement de l'Agence nationale de la recherche, ont posé une première pierre en développant des systèmes moléculaires capables de casser une molécule d'eau. Comment ? En greffant entre elles deux molécules. "La première est un complexe à base de ruthénium, qui s'active chimiquement lorsqu'il capte la lumière, détaille Ally Aukauloo. Il cède alors une charge électrique positive au second complexe sur lequel est accrochée une molécule d'eau. Celle-ci se polarise puis se dissocie, cédant des protons à la solution dans laquelle elle se trouve."

Et que faire de ces protons ? De son côté, la nature utilise à cette étape des complexes chimiques, appelés hydrogénases, qui catalysent la synthèse de la molécule d'hydrogène. Pour reproduire cette fonction, l'équipe de l'ICMMO vient de synthétiser un nouveau complexe, composé d'un atome de cobalt enchâssé dans une cage formée par d'autres espèces chimiques. Avantage: "Il ne nécessite pas l'emploi de métaux précieux, précise le chercheur. De plus, la possibilité de jouer sur la nature chimique de la cage dans laquelle se trouve l'atome de cobalt permet d'adapter les propriétés de notre catalyseur à différentes situations."

Malgré ces succès, les chercheurs restent extrêmement prudents, rappelant qu'une "feuille" artificielle capable de produire de l'hydrogène industriellement à partir d'eau et de la lumière du soleil n'est pas pour demain. Pour autant, Ally Aukauloo s'enthousiasme: "Nous nous rapprochons lentement de ce Graal. Et pouvons peut-être envisager un prototype de laboratoire d'ici à dix ans." Un futur pas si lointain !
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