Une nouvelle forme de radioactivité artificielle

Publié par Michel le 30/05/2008 à 00:00
Source: American Institute of Physics
Illustration: Raciti et al., Physical Review Letters
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La structure de base de la matière est connue depuis près d'un siècle, mais les scientifiques apprennent constamment de nouvelles choses à force de triturer les atomes.

Un atome se compose d'une partie relativement lourde en son centre, le noyau, et d'une partie plus légère, une flotte d'électrons qui "gravitent" autour du noyau. Les électrons déterminent les propriétés chimiques, électriques et optiques de l'atome, mais le noyau a aussi son importance. Il contient la majeure partie de la masse et de l'énergie de l'atome, et ce sont par exemple les réactions entre noyaux qui sont responsables de la puissance du Soleil.

La nature s'amuse parfois. D'ordinaire, les atomes d'hydrogène ont un noyau avec un seul proton, mais parfois ce noyau peut posséder un neutron supplémentaire. Cette version, ou isotope, de l'hydrogène est appelé H-2 puisqu'il est composé de deux unités nucléaires. Une autre version de l'hydrogène, H-3, possède un noyau se composant d'un proton et de deux neutrons. De même, la forme principale de l'hélium, He-4, a quatre particules nucléaires, mais on trouve également l'isotope He-3 qui se compose de deux protons et d'un neutron. Tous les autres éléments ont aussi de nombreux isotopes ; certains sont stables, ce qui signifie qu'ils peuvent perdurer pendant des millions d'années, et certains sont instables, ce qui veut dire qu'ils se fragmentent en plusieurs éléments après une durée caractéristique appelée demi vie.

La radioactivité est le processus par lequel les noyaux instables se transforment en noyaux plus stables. Le terme "radio" ne se réfère pas aux ondes radio émises depuis une station et que l'on capte par une antenne, mais aux émissions, soit sous forme de particules, soit sous forme d'ondes électromagnétiques, rayonnées par le noyau parent. Historiquement les formes principales de radioactivité ont été identifiées par les mots "radiations alpha, bêta et gamma" (les trois premières lettres de l'alphabet grec). Un rayon alpha ou particule alpha n'est rien d'autre qu'un noyau He-4. Les rayons bêtas sont des électrons. Et les rayons gamma sont en fait des ondes de grande énergie, plus intense que les rayons x.

Le nouveau type de radioactivité observé, découvert lors d'une expérience effectuée récemment à l' Istituto Nazionale di Fisica Nucleare, un laboratoire nucléaire italien, se compose de fragments nucléaires constitué de deux protons. On pourrait donc le considérer comme un nouvel isotope de l'hélium. He-2, comme il pourrait donc s'appeler, est fortement instable et se fragmente très rapidement. La fabrication de cette nouvelle espèce nucléaire a demandé beaucoup d'ingéniosité. D'abord, un faisceau d'ions de néon-20 est projeté sur une feuille de béryllium. Dans cette collision quelques noyaux de néon perdent deux protons et se transforment en noyaux de néon-18. Puis, ces mêmes noyaux rencontrent une feuille de plomb. Cette deuxième collision a pour effet d'exciter les noyaux Ne-18 dans un état fortement instable, la conséquence de cette instabilité étant pour ces noyaux de se fragmenter de nouveau. Mais il existe plusieurs manières pour cela. Parmi les options de désintégration, les physiciens italiens ont découvert un processus rare et jamais encore démontré expérimentalement dans lequel les noyaux Ne-18 se transforment en noyaux oxygène-16 accompagnés d'un composant He-2.


La nouvelle forme du noyau d'hélium, He-2, n'est constituée que de deux protons.
Ce "diproton" très instable a été découvert suite à la fragmentation
d'un noyau de néon-18 en oxygène-16 plus He-2.
Ce scénario (figure du haut) est différent de celui pour lequel
Ne-18 se désintègre directement en deux protons et un O-16 (figure du bas)

Selon un des chercheurs, Giovanni Raciti du laboratoire de LNS-INFN, ce mode de désintégration "deux-proton" a été prédit il y a déjà une cinquantaine d'années. Quelques expériences entreprises auparavant en avaient donné des preuves ambigües: deux protons émergeaient bien de la désintégration mais il était impossible de savoir s'ils avaient été émis un par un ou en même temps depuis un noyau Ne-18 entier ou depuis une nouvelle particule. La nouvelle expérience montre définitivement que les deux protons sont émis ensemble par la dissociation d'un élément He-2.

Cette nouvelle forme d'hélium ne possède a priori aucune utilité pratique car elle ne survit même pas un milliardième d'une seconde. Raciti pense cependant que l'observation de cet isotope ténu permettra de mieux comprendre comment sont "fabriqués" certains noyaux très instables dont le nombre de protons excède celui de leurs neutrons et, réciproquement, sur la façon dont des noyaux lourds sont élaborés à l'intérieur des étoiles (Physical Review Letters du 16 mai 2008)

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