Un antidote au mercure dans le béluga ?

Publié par Redbran le 02/12/2023 à 08:00
Source: Université Laval
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Il y a déjà un bon moment que les scientifiques ont rapporté la présence de méthylmercure dans les animaux sauvages consommés par les Inuits et qu'ils ont documenté les risques que ce polluant neurotoxique pose à la santé humaine. De nouvelles études menées par l'équipe de Pierre Ayotte, de la Faculté de médecine et de l'Institut national de santé publique du Québec, montrent que certains de ces aliments contiennent aussi deux molécules protectrices, dont l'une pourrait contrecarrer les effets toxiques du méthylmercure.


Javier Yaya Tur/Ciudad de las artes y las ciencias

Le professeur Ayotte et deux membres de son équipe, Ariane Barrette et Marc Lebordais, ont profité de la Réunion scientifique Sentinelle Nord 2023 pour présenter les résultats de leurs récents travaux sur la question. Cette rencontre, qui a eu lieu les 15 et 16 novembre au Centre de congrès de Québec, a regroupé près de 300 personnes, dont des représentants des communautés nordiques et des organisations partenaires publiques et privées.

En général, les chercheurs qui étudient la présence de contaminants dans l'alimentation traditionnelle inuite sont porteurs de mauvaises nouvelles. Les recherches menées depuis quelques années par l'équipe du professeur Ayotte sur deux micronutriments - le sélénonéine et l'ergothionéine - constituent une heureuse exception à cette règle. Ces deux composés très semblables (l'atome de sélénium présent dans le premier est remplacé par un atome de soufre dans le second) auraient des effets protecteurs pour le système nerveux et ils contrecarreraient les manifestations de maladies liées au vieillissement.

"Ils sont produits par des microorganismes marins et terrestres, et ils se retrouvent, par une voie que nous ne connaissons pas encore, dans tous les tissus et organes de certains animaux consommés traditionnellement par les Inuits. Nos travaux montrent que la peau de béluga est une source importante de sélénonéine et d'ergothionéine alors que la viande de caribou est une source importante d'ergothionéine", résume le professeur Ayotte.


Le mattaaq est formé de la peau et du gras sous-cutané du béluga. Cet aliment prisé au Nunavik est riche en sélénonéine et en ergothionéine.
Martin Fortier

À l'aide d'échantillons de sang prélevés sur 1326 personnes de 16 ans et plus vivant au Nunavik, les chercheurs ont découvert que les concentrations de sélénonéine et d'ergothionéine étaient respectivement 34 fois et 5 fois supérieures à celles mesurées chez des personnes vivant dans le sud du Québec. "Nos analyses montrent que plus la consommation d'aliments traditionnels est grande, plus les concentrations sanguines des deux composés sont élevées", souligne le professeur Ayotte.

Les effets protecteurs de ces deux composés, en particulier l'effet détoxifiant du sélénionéine sur le méthylmercure, forcent un réexamen du niveau d'exposition à certains polluants qui serait attribuable à l'alimentation traditionnelle inuite. "Il est possible que, pour une consommation donnée d'aliments traditionnels, le risque de contamination au méthylmercure soit moins élevé qu'on le croyait. Il se pourrait également que les Inuits puissent consommer davantage d'aliments traditionnels sans augmenter les risques pour leur santé, s'ils s'assurent d'un apport suffisant en sélénonéine et en ergothionéine. Avant de tirer des conclusions nettes en ce sens, nous devons toutefois accumuler plus de preuves", conclut prudemment le professeur Ayotte.
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