Deux études publiées en décembre dans Journal of Clinical Investigation tentent de percer le secret de certaines espèces de singes, les mangabeys enfumés et les singes verts d'Afrique. Ces singes sont susceptibles d'être infectés par le VIS (Virus de l'Immunodéficience Simienne), l'équivalent simiesque du VIH (Virus de l'Immunodéficience Humaine), mais ne développent jamais le Syndrome d'ImmunoDéficience Acquise (SIDA). Ces travaux ont été menés, d'une part, par une équipe de l'école de médecine de l'Université de Pennsylvanie, et d'autre part, par une équipe française de l'Institut Pasteur à Paris.
Les chercheurs se sont intéressés à certains gènes potentiellement impliqués dans la progression de la maladie et la résistance au SIV chez ces 2 espèces différentes de singes.
En particulier ils ont cherché à comprendre comment certains singes africains qui sont infectés par le VIS et qui répondent au virus de la même manière que d'autres singes tels que les macaques rhésus, ou encore l'homme face au VIH, ne deviennent jamais malades comme le sont ces derniers. Les scientifiques ont comparé les modifications dans le profil d'expression des gènes en réponse à l'infection par le VIS chez les mangabeys enfumés et les singes verts, qui restent en bonne santé après l'infection, et chez les macaques rhésus qui développent un syndrome de type SIDA une fois contaminés. Ces gènes identifiés pourront potentiellement être des cibles antivirales dans l'avenir.
Les conclusions de ces travaux montrent que les mangabeys enfumés et les singes verts ont une réponse antivirale naturelle très forte dès l'infection par le SIV, impliquant une forte augmentation de la production de molécules de type interféron de type 1. Cependant cette réponse est transitoire et dure environ 4 semaines avant de diminuer pour revenir à un niveau proche de celui sans infection. Au contraire, la forte réponse antivirale chez les macaques rhésus reste constante au cours de l'infection, entrainant une activation massive des cellules immunitaires principales cibles du VIS, qui sont alors plus susceptibles d'être infectées et donc détruites par le virus, contribuant à l'immunodéficience observée chez cette espèce. Seulement les mangabeys enfumés et les singes verts sont donc capables de contrôler cette réponse au cours du temps, par des mécanismes de régulation active encore peu connus tels que l'expression de gènes impliqués dans l'inhibition de l'activation de la réponse immunitaire, et ainsi d'empêcher la progression de la maladie vers le stade SIDA.