Les déformations de surface provoquées par les grands séismes

Publié par Adrien,
Source: CNRS-INSUAutres langues:
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1-En rouge la zone de rupture induite par le séisme. L'encadré noir localise les images spot analysées par cette étude. Vallage et al 2015
Grâce à la mise au point de techniques de corrélation de pixels entre images, utilisant des images du satellite SPOT-5 acquises avant et après le séisme du Pakistan (2013, magnitude 7.7), des chercheurs de l'Institut de physique du globe de Paris (CNRS, Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité) et un chercheur de l'IGN ont pu calculer, avec une précision inégalée, le déplacement horizontal induit par le séisme en surface. En effet, la méthode permet de produire pour la première fois une nappe de déformation d'une résolution de 2.5m par pixel, ce qui représente une amélioration de 2 ordres de grandeur par rapport à ce qui avait été fait jusqu'à présent.

Les déplacements ont été mesurés au plus proche de la rupture en surface et la distribution de la déformation quantifiée sur une myriade de fractures autour de la rupture proprement dite. De telles observations sont utiles pour une meilleure compréhension des phénomènes déformant la surface terrestre, notamment le cycle sismique. Cette étude est publiée dans la revue Geology.

Mesurer au plus près de la rupture la déformation de surface due aux grands séismes décrochants continentaux (magnitudes supérieure à 7) avec les méthodes radar et optique reste souvent difficile. En effet, jusqu'à récemment, les forts déplacements à proximité directe de la faille provoquaient une décorrélation du signal radar, et par ailleurs, les méthodes de corrélation optique ou d'images d'amplitude radar n'avaient pas la résolution souhaitée pour imager le détail de la déformation. La quantité de déformation due au séisme était donc soit estimée à partir de données géodésiques en champs lointain (mesure du déplacement du sol a plusieurs centaines de mètres de la rupture) ou de donnée sismologiques, soit directement mesurée à la faille lors de relevés de terrain. Les différences observées dans l'un et l'autre cas ont conduit à l'élaboration de modèles proposant l'existence, de façon systématique, d'un déficit de glissement en surface par rapport à la quantité de glissement en profondeur déduite de la géodésie ou de la sismologie.


2-Illustration de l'amplitude du champ de déplacement induit par le séisme du Pakistan, superposée à la topographie (A) faisant apparaître les différentes chaines de montagnes composant le Makran. En B les déplacement horizontaux, en C les déplacement verticaux. Vallage et al 2015


3-Zoom sur la nappe de déplacement superposé à la topographie. En jaune un déplacement vers le Sud-Ouest de la chaîne de montagnes, en bleu un déplacement vers le Nord-Est des sédiments Quaternaires dans le bassin. En violet, zone où la déformation est distribuée sur différentes structures (cartographiées en noir) dans la zone d'endommagement au pied de la chaîne et dans la direction Sud-Est opposée aux déplacements plus loin de la faille. Vallage et al 2015


4-Cartographie détaillée des ruptures de surface dans une zone de déformation distribuée. En rose, les zones où le raccourcissement est perpendiculaire à la rupture, ce qui correspond à une déformation hautement distribuée. L'image optique (B) montre les fissures en tension où se concentre la poussée frontale délimitée par le chevauchement. L'encart C montre la coupe correspondant au profil rouge A-B, avec les différents domaines de déformation. Vallage et al 2015, figure J. Dyon
En utilisant l'outil de corrélation d'image MicMac (développé par l'IGN pour la photographie aérienne, puis adapté aux capteurs satellitaires conjointement par l'IGN et l'IPGP, avec le soutient du CNES) et des images SPOT-5, les chercheurs ont pu, en tout point de la rupture, quantifier en détail la déformation de surface associée au séisme du Pakistan*, et en déterminer le mode (décrochement ou raccourcissement) (Figure 2).

La déformation, en plus de la rupture principale, se distribue aussi sur de très nombreuses fractures à proximité directe de la faille principale, dans la zone dite endommagée. Cela s'observe essentiellement dans les zones où la rupture traverse des sédiments Quaternaires, à l'avant de la chaîne de montagnes. Le mouvement, principalement décrochant à distance de la faille (illustré en jaune et bleu sur Figure 3), devient majoritairement chevauchant dans la zone d'endommagement, au niveau de la rupture principale de surface (violet sur Figure 3). Les différences observées avec les mesures de quantité de déplacement effectuées précédemment s'expliquent par un changement majeur du style de déformation à distance et à proximité de la rupture. L'intérêt de cette méthode tient en sa capacité à distinguer les différents modes de déformation dans la zone endommagée et à mesurer en détails la déformation distribuée sur un ensemble de fractures plutôt qu'une valeur moyennée sur l'ensemble de la zone de rupture.

L'intégration de ces mesures à haute résolution a permis aux chercheurs de préciser la géométrie de la faille en profondeur, et notamment son changement de pendage à proximité de la surface, de manière à réconcilier les différentes observations. Les déformations observées directement au niveau de la rupture mettent aussi en exergue l'importance de l'effet de surface libre, la surface terrestre, sur l'amplitude locale de la déformation co-sismique quand la rupture sismique se propage jusqu'à la surface.

Pour les auteurs, ces nouvelles données permettent pour la première fois de mesurer sans ambiguïtés la partie inélastique de la déformation lors d'un grand séisme qui va pouvoir être incluse dans les modélisations de rupture co-sismique afin de reproduire au mieux les observations de terrain.
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