Près de 12 ans après son retrait du service actif, le sort du Clemenceau semble cette fois-ci scellé. Il est arrivé dimanche dernier au chantier de démolition de Graythorp, à proximité de Hartlepool, au nord-est de l'Angleterre. C'est dans le bassin de ce chantier que l'ancien porte-avions français sera dépollué puis démonté. C'est pour nous l'occasion de faire un point sur la fin de l'ancien porte-avions.
L'ex porte-avions Clemenceau, mouillant à Toulon, après son désarmement
Avant son ultime voyage, une équipe de plongeurs de la Marine avaient préalablement nettoyé la partie immergée de la coque. Il s'agissait d'enlever les algues afin d'éviter toute prolifération non désirée de végétaux marins bretons sur les côtes anglaises. Le remorquage s'est quant à lui déroulé en deux parties. Pour le départ de la rade de Brest et le voyage en haute mer, l'ex porte-avions a été pris en charge par des remorqueurs de la Marine Nationale. Au large de Hartlepool, ce sont des remorqueurs du chantier de démolition qui ont pris le relais.
Le Clemencau a ainsi fait son entrée à reculons dans le grand bassin du chantier de démolition, tiré par quatre remorqueurs. Durant deux mois, une muraille va être érigée autour de l'ancien porte-avions. Cette paroi formera ainsi un bassin adapté aux dimensions du navire. Ce petit enclos qui sera ensuite vidé de son eau, permettra à l'ancien bâtiment de guerre de se retrouver en cale sèche.
Il s'en suivra une première phase de démontage où le mobilier encore présent à bord ainsi que les éléments d'aménagement (vitre, revêtements intérieurs ...) seront retirés. C'est à la suite de cette phase de préparation que les travaux de dépollution, comprenant le désamiantage complet, seront effectués. Cette phase devrait durer cinq mois. Le découpage commencera avant la fin de ces cinq mois en commençant par les parties dépolluées.
La démolition en elle même durera neuf mois. Le chantier total doit durer un an. En janvier 2010, le Clemenceau sera ainsi complètement redevenu matière première. Sur sa masse actuelle, c'est-à-dire 26 000 tonnes, 92% devraient être récupéré. Le métal a déjà été acheté par un industriel anglo-néerlandais Corus, filiale de l'indien Tata Steel.
Malgré sa porté symbolique, la coque Q790, ex-Clemenceau, n'est qu'un exemple parmis d'autres de sa génération de navires. A elle seule, la Marine Nationale comptabilise 35 bâtiments désarmés qui attendent d'être ferraillés. S'ils ont des tailles et des formes différentes, ces navires de guerre ont en commun d'avoir été construits dans les années 50 et 60 selon des procédés de fabrication d'une époque où les préoccupations environnementales ne faisaient pas partie des contraintes industrielles. Ces bateaux sont ainsi chargés d'amiante tout comme le Clemenceau.
La liste de ces navires va s'allonger dans les mois qui viennent. Le prochain est le bateau atelier Jules Vernes qui effectue en ce moment ses derniers mois de service. Mais il serait réducteur de ne parler que des navires militaires français. Car, en tout, plusieurs milliers de navires militaires et marchands construits durant les 30 glorieuses arrivent à bout de souffle. Cette flotte constitue à la fois un gros potentiel en matériaux à recycler, un gros potentiel économique lié au recyclage lui-même, mais recèle aussi de nombreux polluants. Une grande partie de ces unités naviguent sous des pavillons de pays tels que le Panama ou le Libéria, et feront sans doute moins l'objet d'attentions environnementales lors de leur démantèlement que le Clemenceau.