En dehors des molécules habituelles – azote, oxygène, gaz carbonique, etc. –, l'air contient bien souvent des traces de gaz polluants et autres substances. Aujourd'hui, l'analyseur ultrarapide et transportable B-Trap, qui fait déjà l'objet de deux brevets, permet de les détecter en un clin d'œil. "Nous vivons aujourd'hui dans une logique de sécurité, et il peut s'avérer nécessaire de détecter, en temps réel et sur place, des substances toxiques afin de déclencher une alerte, par exemple", explique Michel Heninger, du Laboratoire de chimie physique d'Orsay, chercheur dans l'équipe à l'origine de B-Trap.
Or jusqu'à présent, ce type d'analyse prenait du temps. Il fallait faire un prélèvement et le rapporter au laboratoire pour le traiter sur une machine nécessitant un opérateur averti. Pire: les seules machines capables d'une analyse vraiment précise, absolument intransportables car de la taille d'un petit appartement, étaient destinées aux grosses molécules de l'industrie pétrolière et pharmaceutique et inadaptées aux petites molécules qui composent l'air. La prouesse de l'équipe du Laboratoire de chimie physique d'Orsay est donc d'avoir miniaturisé et adapté la technique de spectrométrie de masse de ces volumineuses machines. Cette technique consiste à identifier les substances selon la masse des molécules qui les composent, puisque cette caractéristique est unique à chaque type de molécule.
Au final, B-Trap, très simple à utiliser, a les dimensions d'un petit réfrigérateur et coûte 100 000 euros environ seulement. Il permet de détecter une molécule donnée sur un million ou même sur un milliard. "Et nous pouvons obtenir jusqu'à une mesure par seconde !", commente Michel Heninger. Des résultats si encourageants que le projet fut lauréat du Concours national d'aide à la création d'entreprises de technologies innovantes en 2003 et 2004, ce qui a conduit en 2005 à la création d'une start-up, Alyxan.
Elle fait déjà l'objet de plusieurs contrats d'étude avec la Délégation générale pour l'armement afin de mesurer en permanence l'atmosphère régnant dans les sous-marins. Dans cette atmosphère confinée, par exemple, une fuite de fréon, utilisé dans les systèmes de refroidissement, peut provoquer des cas d'asphyxie. "Une collaboration est aussi en cours avec l'Institut français du pétrole pour l'étude des émissions de gaz produites par les voitures", commente le chercheur. "Et nous collaborons aussi avec la médecine du travail de l'université Paris-Sud afin d'analyser l'atmosphère sur les lieux de travail. Problématique que nous pourrions bien sûr étendre aux habitations privées." Étant donné la prise de conscience actuelle des questions de santé publique, Alyxan devrait avoir de beaux jours devant elle.