ALMA observe une supernova, véritable usine à poussière

Publié par Adrien,
Source: ESOAutres langues:
4
Restez toujours informé: suivez-nous sur Google Actualités (icone ☆)

D'étonnantes observations récemment effectuées au moyen du Vaste Réseau d'Antennes Sub-Millimétriques de l'Atacama (ALMA) détectent, pour la toute première fois, les vestiges d'une jeune supernova regorgeant de poussière fraîchement créée. Si une quantité suffisante de cette poussière parvenait à s'échapper dans l'espace interstellaire, la raison pour laquelle tant de galaxies nous apparaissent sombres et poussiéreuses s'en trouverait probablement expliquée.


Cette image montre les restes de la supernova 1987A photographiés à différentes longueurs d'onde. Les données d'ALMA (en rouge) révèlent la poussière nouvellement formée au centre du résidu. Les données d'Hubble (en vert) et de Chandra (en bleu) indiquent l'onde de choc en expansion.
Crédit: ALMA (ESO/NAOJ/NRAO)/A. Angelich. Visible light image: the NASA/ESA Hubble Space Telescope. X-Ray image: The NASA Chandra X-Ray Observatory

Les galaxies sont susceptibles d'abriter de grandes quantités de poussière (1) dont les supernovae constituent vraisemblablement la source principale, au sein de l'Univers jeune notamment. Mais les preuves directes des capacités d'une supernova à fabriquer de la poussière sont longtemps demeurées minces et ne pouvaient rendre compte des vastes quantités de poussière détectées dans les galaxies jeunes et distantes à la fois. Les récentes observations d'ALMA apportent de nouveaux éléments.

"Nous avons découvert l'existence d'une vaste concentration de poussière au coeur des éjectas d'une supernova relativement jeune et proche de nous" révèle Remy Indebetouw, astronome à l'Observatoire National de Radio Astronomie (NRAO) ainsi qu'à l'Université de Virginie, tous deux situés à Charlottesville, Etats-Unis. "C'est la toute première fois que nous sommes en mesure d'observer l'endroit même où la poussière se forme, ce qui constitue un pas important vers la compréhension de l'évolution des galaxies".

Une équipe internationale d'astronomes a utilisé ALMA pour observer les vestiges lumineux de la Supernova 1987A (2) dans le Grand Nuage de Magellan, une galaxie naine qui tourne en orbite autour de la Voie Lactée à quelques 160 000 années lumière de la Terre. SN 1987A constitue la seconde explosion de supernova la plus proche de la Terre, après celle observée dans la Voie Lactée par Johannes Kepler en 1604.

Les astronomes avaient prévu que le refroidissement du gaz après l'explosion se traduisait par l'agglomération d'atomes d'oxygène, de carbone et de silicium, et donc la formation de vastes quantités de poussière dans les régions froides et centrales du reste de supernova. Toutefois, les observations antérieures de SN 1987A effectuées au moyen de télescopes infrarouge dans les 500 jours qui ont suivi l'explosion, n'avaient permis de détecter qu'une faible quantité de poussière chaude.

La résolution et la sensibilité inégalées d'ALMA ont permis à l'équipe de chercheurs de photographier une quantité bien plus importante de poussière froide qui émet un rayonnement intense dans les domaines millimétrique et submillimétrique. Les astronomes estiment que le résidu de l'explosion renferme à présent une quantité de poussière nouvellement formée équivalant à environ 25% de masse solaire. Ils ont également détecté la présence, en quantités significatives, de monoxyde de carbone et de monoxyde de silicium récemment créés eux aussi.

"SN 1987A constitue un cas particulier puisque son contenu n'a pas été mélangé à l'espace environnant ; ce que nous y trouvons y a donc été créé" précise Remy Indebetouw. "Les nouveaux résultats d'ALMA, inédits en leur genre, révèlent l'existence, au sein des restes de l'explosion d'une supernova, d'une vaste quantité de matière inexistante il y a quelques décennies à peine."

Toutefois, les supernovae sont tout autant capables de créer que de détruire les grains de poussière.

L'onde de choc issue de la première explosion a engendré, au cours de son déplacement, la formation d'anneaux de matière brillante comme en témoignent divers clichés obtenus précédemment par le Télescope Spatial Hubble du consortium NASA/ESA. Après avoir heurté l'enveloppe de gaz expulsée par la géante rouge en fin de vie, une fraction de cette puissante explosion a rebondi vers le centre du reste de supernova. "A un moment donné, le rebond de cette onde de choc percutera les amas denses de poussière nouvellement formée", précise Remy Indebetouw. "Il est probable qu'une fraction de poussière s'en trouvera expulsée. Difficile d'en prévoir la quantité: peut-être une faible portion, sans doute la moitié, voire les deux tiers." Si une fraction non négligeable survit dans l'espace interstellaire, cela pourrait expliquer l'existence de vastes quantités de poussière que les astronomes détectent dans l'Univers jeune.

"Les premières galaxies sont incroyablement poussiéreuses et cette poussière joue un rôle crucial dans l'évolution des galaxies" nous dit Mikako Matsuura de l'University College de Londres au Royaume-Uni. "Nous savons qu'il existe, à l'heure actuelle, plusieurs scénarii de formation de la poussière, mais les supernovae en ont constitué la source principale dans l'Univers jeune. Nous disposons enfin aujourd'hui des preuves de cette théorie."

Notes

(1) La poussière cosmique est constituée de grains de silicate et de graphite - des minéraux également présents en abondance sur Terre. La suie d'une bougie est très semblable aux grains de graphite cosmique - toutefois, la taille des grains de suie est plus de dix fois supérieure à celle des grains de graphite cosmique.

(2) La lumière en provenance de cette supernova a atteint la Terre en 1987, comme l'indique son nom.
Page générée en 0.368 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise