Plantes envahissantes: l'invasion des clones

Publié par Adrien,
Source: Jean Hamann - Université LavalAutres langues:
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Sur certaines sections de la Chaudière, comme ici à Vallée-Jonction, les colonies de renouées sont si denses qu'elles étouffent toutes les autres plantes.
La première est connue sous le nom de renouée japonaise, mais on l'appelle aussi bambou japonais ou bambou mexicain, en raison de sa tige creuse et de ses origines exotiques. La seconde, la renouée de Bohème, un hybride de la première, ressemble à s'y méprendre à sa cousine japonaise. Sans tambour ni trompette, ces deux plantes envahissantes sont en voie de changer le visage des berges de nombreux cours d'eau du sud du Québec. "Il s'agit d'une invasion occulte: elle se produit sous nos yeux sans que personne n'en parle. Pourtant, ces deux espèces sont les plus puissants envahisseurs que nous ayons présentement au Québec", estime Claude Lavoie, directeur de l'École supérieure d'aménagement du territoire et de développement régional (ESAD).

Le professeur Lavoie et ses collaborateurs apportent une nouvelle preuve des avancées de ces renouées en sol québécois dans un article qui vient de paraître dans River Research and Applications. Le chercheur et ses collaborateurs ont étudié la répartition de ces deux plantes envahissantes le long de la rivière Chaudière afin de mieux comprendre leur modus operandi. Leurs relevés indiquent que la partie située entre le lac Mégantic et Saint-Georges est encore relativement épargnée, mais le reste de la rivière fait l'objet d'une invasion en règle. La renouée de Bohème sévit entre Saint-Georges et Sainte-Marie, alors que la renouée japonaise domine de Sainte-Marie à Lévis.

Les analyses génétiques ont révélé qu'il n'existe qu'un génotype dans chaque espèce. "Même si ces plantes produisent beaucoup de graines, elles semblent se propager exclusivement de façon végétative, à partir de la même plante mère", explique le chercheur. Autre élément intéressant, le principal facteur qui explique la présence de ces plantes est la proximité d'une ville ou d'un village. "L'hypothèse la plus probable pour expliquer cette invasion est que ces renouées ont été introduites comme plantes ornementales sur des terrains privés situés près de la rivière et que les crues printanières arrachent les rhizomes et les transportent plus loin."

Les rhizomes des renouées peuvent plonger jusqu'à 5 mètres de profondeur dans le sol et il est très difficile de les arracher complètement; un segment de quelques centimètres suffit pour produire une nouvelle tige. Les renouées sortent de terre tôt au printemps et elles forment des colonies qui bloquent la lumière aux autres plantes. On ne leur connaît aucun ennemi naturel qui pourrait freiner leur progression. "Une fois que ces plantes sont bien installées, il est très compliqué de s'en débarrasser. Dans le cas de la Chaudière, il est probablement trop tard", estime le chercheur.

Les aménagistes du territoire peuvent tirer quelques enseignements précieux de l'invasion qui frappe la Beauce, poursuit le professeur Lavoie. La première: il ne faut jamais planter de renouées comme plantes ornementales, à plus forte raison près d'un cours d'eau. La seconde: il faut éliminer les renouées aussitôt qu'elles sont détectées sinon la situation risque de dégénérer rapidement. "Comme il est interdit d'utiliser des herbicides en bande riveraine, la seule façon de s'en débarrasser est par excavation complète. Pour que cette intervention soit efficace et acceptable sur le plan environnemental, il faut agir dès que l'on détecte des plants."

L'étude parue dans River Research and Applications est signée par Marie-Claude Duquette, Anaïs Compérot, Léah Fay Hayes, Cristina Pagola, Jean Dubé et Claude Lavoie, de l'ESAD, et François Belzile, du Département de phytologie.
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