En un mois après sa parution, 3500 exemplaires de sa première édition étaient vendus, 3 ans après, la vente s'élevait à 8500 exemplaires. Dès 1882, le livre est traduit deux fois en russe, en français, en italien et en allemand. La seul traduction en allemand jusqu'à présent est parue dans la librairie de E. Schweizbart, faite par le zoologiste Julius Victor Carus, qui avait déjà traduit précédemment parmi d'autres L'Origine des espèces et L'Expression des émotions chez l'homme et les animaux de Darwin ; ce n'est qu'en 1899 que la deuxième édition paraît chez le même éditeur.
Darwin reçoit 100 exemplaires d'auteur de son livre, et en envoie beaucoup dès octobre 1881 à des amis ou collègues spécialistes. Leurs commentaires vont « de l’accord à l'enthousiasme », tandis que les critiques de certains journaux pour le grand public – notamment aux États-Unis et en Belgique – récusent les affirmations de Darwin, puisque les vers de terre sont nuisibles. En Allemagne et Autriche, par contre, on présente une opinion positive dans de nombreux journaux. Sur ce point, il est important que le physiologiste Victor Hensen, qui professe à l'université de Kiel ait expérimenté parallèlement à Darwin, faisant un exposé sur les rapports entre le ver de terre et le défrichage du sol, et ait ainsi pavé la route pour les thèses de Darwin.
Le quotidien Die Presse de Vienne recommande le livre dès le 9 novembre 1881 à ses lecteurs, car Darwin l'a « écrit avec la simplicité et la clarté » qu'on lui connaît ; il ne contient « aucun terme technique » et est donc un « livre captivant au plus haut point », – « captivant comme un conte de fées. » Une revue en deux parties commence en décembre 1881 dans l'Illustrirte Zeitung (de) par exemple avec l'affirmation que « la preuve convaincante est apportée de ce que ces vers de terre familiers, et si souvent peu appréciés, jouent un rôle très important dans l'entretien de la nature. » Et début 1882, dans une table ronde organisée par l'hebdomadaire Die Gegenwart (de) sur les vers de terre : « Depuis le 10 octobre, le jour de parution du dernier ouvrage de Darwin, ils font l'objet d'attention de la part de gens qui, plus tôt, ne les auraient jamais considérés, et tous les journaux et revues racontent leurs hauts faits. » Au même endroit, on trouve un parallèle avec l'étude de Darwin sur l'origine des espèces (« à petites causes, grands effets ») et il est remarqué que la thèse de Darwin de la naissance de bonne terre végétale par l’action des vers est confirmée « par des expériences directes de V. Hensen. » La critique dans Die Gegenwart conclut ainsi :
« Des milliers d'yeux par ailleurs assez observateurs, ont déjà vu l'activité des vers de terre, sans en tirer des conclusions qui nous paraissent maintenant presque évidentes. C'est toujours le privilège d'un homme, au regard perçant dans les profondeurs, et qui sait évaluer les moindres actions, de soulever de tels problèmes, et par là d'attirer des êtres les plus bas et les plus méprisés au centre des intérêts. »
Malgré de nombreux commentaires favorables, les thèses de Darwin ne restent pas sans opposition même dans le monde germanophone. Tout d'abord, l'agronome Ewald Wollny – il a la réputation de meilleur pédologue de son temps – s'exprime négativement en 1882 dans la revue spécialisée dont il est l'éditeur Forschungen auf dem Gebiete der Agrikulturphysik, et il tient également les expériences de Hensen pour fautives. Wollny, « une sommité d'alors dans le monde de l'agronomie scientifique, » essaie dans les années qui suivent à appuyer sur l'expérience sa position que les vers de terre sont nuisibles, contrairement aux affirmations de Darwin et Hensen. Il rapporte en 1890 sur ses expériences, entreprises en 1883/1884 et de 1888 à 1890. Il écrit dès son introduction :
« Contrairement aux positions prises jusqu'à présent par l’auteur, les recherches préliminaires entreprises ont eu un résultat surprenant en faveur des vers. […] Dans aucune des expériences, les plantes n'ont montré quelque dommage dû aux vers. »
Avec la « conversion » de Wollny, écrit Otto Graff dans sa rétrospective sur « la question des vers de terre aux et XXe siècles », « la question des vers de terre a été résolue par la science en faveur d'une utilité manifeste de ces animaux. » Les expériences de Wollny ont entre autres établi que des augmentations substantielles de production des cultures les plus diverses peuvent être réalisées par les vers de terre. Une reconnaissance quasi-officielle des vers de terre comme animaux utiles à l'agriculture s'ensuit quand Victor Hensen est invité par Albert Schultz-Lupitz (de) à faire un exposé sur les vers de terre devant l'assemblée d'hiver de la Société Allemande d’Agriculture (de).