Abbaye de Murbach | |
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Latitude Longitude | |
Pays | France |
Région | Alsace |
Département | Haut-Rhin |
Ville | Murbach |
Culte | Catholique romain |
Type | Abbaye |
Début de la construction | 727 |
Style(s) dominant(s) | Roman |
Protection | Monument historique |
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L'abbaye de Murbach est située en Alsace, au fond de la vallée vosgienne de Guebwiller après la commune de Buhl, où une bifurcation mène vers le vallon de Murbach.
Depuis ce site sont visibles les deux hautes tours de grès, vestiges d'une célèbre abbaye romane. Sur la clé de voute du porche d'entrée figurent les armes du prince-abbé : le lévrier d'argent surnommé autrefois le « chien de Murbach » par les habitants de la région. L'abbaye comptait parmi les plus riches et les plus influentes du Saint-Empire romain germanique.
L'abbaye de Murbach a été fondée en 727 par le comte Eberhard d'Eguisheim, neveu de sainte Odile et puissant seigneur qui venait de perdre son unique héritier. Il appela pour ce faire saint Pirmin, qui avait déjà fondé ou organisé de nombreux monastères et notamment Reichenau. Selon la chronique du moine et savant Herman, Pirmin vint à Murbach accompagné de douze moines de Reichenau. Il semble cependant que Pirmin ait plutôt organisé à Murbach une petite communauté de moines, installée depuis le début du VIIe siècle à Bergholtz-Zell. L'abbaye prendra le nom de Vivarius Peregrinorum (ce qui attesterait selon certains auteurs l'origine écossaise ou irlandaise des premiers moines) et un certain Romanus sera placé à la tête du couvent.
Le 12 juillet 727, le roi franc Thierry IV accorde au monastère le privilège de l'immunité et confirme les donations d'Eberhard. Le 12 mai 728, l'évêque Widegern de Strasbourg accorde aux moines le droit d'élire librement leur abbé. L'abbaye de Murbach deviendra très vite florissante, en raison des prestigieux dons et legs dont elle bénéficia. Sa bibliothèque impressionnera les savants de l'époque.
Le 13 janvier 772, Charlemagne confirme à l'abbaye son immunité. En 792, il appelle l'abbé de Murbach Sindbert sur le siège épiscopal d'Augsbourg. Le souverain deviendra dès lors et pendant une année, abbé laïc de Murbach (Pastor Murbacensis). Charlemagne conservera par ailleurs pendant de nombreuses années le titre de recteur de Murbach.
Le 4 juillet 926, les Hongrois dévastent l'abbaye et assassinent sept moines, qui seront vénérés comme des martyrs dans l'Église d'Alsace jusqu'à la Révolution.
L'abbaye sera alors restaurée sous la direction de l'abbaye de Cluny et grâce à de généreux dons de l'impératrice Adélaïde de Bourgogne. À la demande de son épouse Théophanu, l'Empereur Otton II confirme à l'abbaye le 27 avril 977 toutes ses possessions et tous ses privilèges.
Dans son roman Il nome della rosa traduit en français sous le titre Le Nom de la rose, au chapitre Tierce du Premier jour, l'écrivain italien Umberto Eco cite cette abbaye comme un atelier de copie encore actif au XIVe siècle.
Au Moyen-Age, l'abbaye de Murbach était particulièrement riche, possédant des biens dans près de 350 localités, du Palatinat à la Suisse, et notamment la ville de Lucerne. L'abbaye aura non seulement des terres et des châteaux-forts mais aussi des établissements thermaux, des verreries et des mines.
En 1228, l'empereur Frédéric II accorde à l'abbé Hugues de Rothenbourg le titre de prince du Saint-Empire. Par la suite, l'abbé de Murbach aura le privilège de ne plus siéger au sein du Conseil des prélats d'Empire comme la majorité des abbés de l'époque mais de siéger lors des Diètes impériales au sein du Conseil des princes d'Empire (où seuls une dizaine de supérieurs de monastères avaient droit de siéger). Par ailleurs, l'abbé de Murbach avait, au même titre que ses homologues de Fulda, Kempten et Wissembourg, préséance sur tous les abbés réguliers de l'Empire.
L'empereur Charles Quint accorde également en 1544 à l'abbaye un nouveau privilège, celui de battre monnaie.
Par ailleurs, en 1554, l'abbaye de Murbach est réunie perpétuellement à l'abbaye de Lure, fondée au VIe siècle par saint Desle.
En 1570, Jean Ulrich de Raitenau est sacré prince-abbé de Murbach. Il fait nommer en 1576 son neveu, Wolfgang Dietrich de Raitenau, comme coadjuteur, bien que celui-ci ne soit âgé que de 19 ans. En février 1587, à la mort de son oncle, Wolfgang Dietrich lui succède, mais dès le mois suivant, est nommé prince-archevêque de Salzbourg et se résigne de l'abbatiat. Le couvent élit pour lui succéder Gabriel Giel de Gielsberg, mais cette élection ne trouve pas l'agrément du Pape. Les moines sont contraints d'élire comme abbé, le cardinal André d'Autriche. C'est le début de la commende qui durera jusqu'au milieu du XVIIIe siècle et sera une grande source de conflit entre le couvent, le Pape et le souverain (l'empereur puis le roi de France).
L'abbaye est par ailleurs dévastée entre 1625 et 1640 par les troupes du Bernard, duc de Saxe-Weimar. En 1648, l'Alsace est en grande partie cédée par l'Empire au Royaume de France. L'abbaye de Murbach conserve son immédiateté impériale mais perd le droit de battre monnaie.
En 1704 et après plusieurs abbés commendataires, dont certains ne vinrent jamais à Murbach, un coadjuteur est élu au sein du couvent. Il s'agit de Célestin de Beroldingen, qui succède en 1720 au prince-abbé Philippe-Eberhard de Löwenstein-Wertherim-Rochefort. C'est sous son abbatiat que les moines décident de quitter leur vallon isolé pour s'installer à Guebwiller, capitale de la principauté ecclésiastique, où le prince-abbé résidait déjà. Le nonce apostolique en Suisse refuse. Des travaux de reconstruction de l'abbaye deviendront le prétexte pour les moines de quitter Murbach (où ils ne reviendront pas).
En 1736, dom Célestin est contraint d'abdiquer au profit d'un nouvel abbé commendataire, François-Armand-Auguste de Rohan-Soubise, futur cardinal et prince-évêque de Strasbourg. En contrepartie, le couvent peut à nouveau élire un coadjuteur en son sein. Il s'agira de Léger (Casimir) de Rathsamhausen, qui deviendra prince-abbé en 1756. Trois ans plus tard, Dom Léger obtient du pape Clément XIII l'autorisation officielle pour le couvent de s'établir à Guebwiller et en 1764, l'abbaye, qui ne comptait plus que 10 religieux, est sécularisée par le Pape. Le monastère devient un chapitre de chanoines nobles mais l'abbé demeure prince d'Empire et conserve tous ses droits sur le chapitre collégial de Thann.
En 1789, le chapitre est saccagé et fermera ses portes l'année suivante. Le dernier prince-abbé, Benoît-Frédéric d'Andlau-Hombourg, meurt en 1839 exilé à Eichstätt.
Source : Gallia Christiana