Contention mécanique et pratique en psychiatrie française - Définition

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Une approche nécessairement subjective

Canguilhem (1966) dans Le normal et le pathologique pense que le pathologique ne peut pas se définir de manière objective. Il met donc l’accent sur la dimension subjective de la maladie et conséquemment la place qu’il faut redonner au patient. Les principales études relatant le vécu de patients ayant été contenu mécaniquement font apparaître un vécu majoritairement péjoratif selon Palazzolo (2002).

Un cadre légal « inexistant »

Lorsque la mise en œuvre de la contention mécanique nécessite l’usage de la force physique, cet acte est-il toujours du ressort des infirmières ? D’une manière plus large l’emploi de la force physique par les infirmières est-il licite au regard de la loi ?

Pannetier (2004) a réfléchi à la question de l’usage de la contention physique avec un patient agité. Ce dernier constate que ni le décret de compétence infirmière ni le Code pénal n’autorise l’usage de la force physique pour contraindre. Selon lui, seuls les articles 122-5, 122-6 et 122-7 du nouveau Code pénal pourraient justifier l’usage de la force physique en cas de légitime défense.

L’impact de la normalisation des soins dans le champ de la psychiatrie

Dans un souci d’améliorer la qualité des soins, l’ordonnance d’avril 1996 a rendu la démarche d’accréditation obligatoire. La loi Kouchner du 4 mars 2002 en représente le cadre législatif qui renforce les droits des patients. Dans ce contexte, l’Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES, 1998), a défini des indications et contre-indications afin d’améliorer les conditions d’isolement du patient.

Le mot isolement apparaît explicitement pour la première fois en 1993 avec la circulaire dite Veil et rappelle que cette pratique doit être « médicalement justifiée ». Enfin en février 2002, le rôle propre infirmier s’enrichit, dans le cadre d’une prescription médicale, de la surveillance de la chambre d’isolement.

L’essentiel des textes encadrant cette pratique, née il y a deux siècles, s’inscrivent dans les deux dernières décennies. La codification de l’utilisation de la chambre d’isolement par une autorité officielle permet d’avoir une référence, à la fois éthique et pratique, en offrant des normes d’utilisations de cet outil. Avant, on peut penser que cet outil était utilisé en fonction de la philosophie de soin du service et ou de l’intentionnalité du soignant.

Une double mission

Il ne s’agit pas de savoir si la contention est de nature sécuritaire ou soignante : la contention est, par sa nature, un acte sécuritaire traditionnellement réalisée par des soignants. Si cet acte peut paraître indissociable de la pratique soignante, c’est que la mission de la psychiatrie française ne fait pas de distinction entre soigner et réguler l’ordre social. Il y a confusion entre but et moyen, entre soin et sécurité. Le sociologue Robert Castel, dans la préface d'Asiles d’Erving Goffman (1968), y voit l’origine de tous les malentendus.

Des moyens structurels et humains en baisse

Le virage sociologique consécutif à la disparition du diplôme d'infirmier de secteur psychiatrique (ISP) constitue la mort symbolique d’un habitus de classe qui aliénait implicitement les infirmiers à l’usage de la force physique dans le but de maintenir l’ordre. Le nouveau profil sociologique des étudiants infirmiers, avec un taux de féminisation passant de 60 % à plus de 90 % depuis 1992, ne permet plus la reproduction d'un habitus de classe traditionnellement dévolu aux hommes. Le paradigme originel n’est donc plus valide et la question de la sécurité à l’hôpital doit être repensée.

Une discrimination insidieuse atteint ainsi les infirmiers travaillant en psychiatrie. Ces derniers se trouvent d’autant plus souvent en première ligne dans les situations qui impliquent l’usage de la force physique. Les infirmiers vivent ces situations débouchant sur une véritable problématique identitaire soignante. Pinquier (1999) souligne l’augmentation de l’utilisation de la chambre d’isolement du fait de la féminisation des équipes soignantes. Parallèlement les hospitalisations sans consentement ont augmenté de 57 % entre 1988 et 1998 selon le rapport Piel et Roeland (2001) et le nombre de lit a baissé ces dernières années contribuant à concentrer les cas les plus difficiles.

Enfin la médiatisation du décès d'infirmier et aides-soignants, en février et octobre 2005, vient alimenter les craintes des professionnels de psychiatrie.

L’utilisation de la contention mécanique peut être thérapeutique mais pas forcément pour le patient. Gray et Diers (1992) soulignent l’impact du stress des soignants sur les patients contribuant ainsi à favoriser l’utilisation de la contention. Pour Outlaw et Cowery (1992), la contention mécanique est un événement à vertu anxiolytique pour l’équipe. Ils pensent que son utilisation n’est pas forcément utile pour le patient.

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