L'amibe dysentérique a une biologie très originale qui aboutit, selon les circonstances, à un dualisme évolutif se traduisant par les deux aspects morphologiques décrits, mais aussi par des biotopes, modes de nutrition et pouvoirs pathogènes très différents.
L'amibe minuta réalise, aux moindres frais, le cycle parasitaire normal assurant la pérennité et la dispersion de l'espèce. Elle vit à la surface de la muqueuse du gros intestin, surtout dans les zones de stagnation relative du contenu intestinal : cæcum et côlon ascendant, sigmoïde et ampoule rectale. Elle s'y nourrit de bactéries et de levures, et s'y multiplie par division binaire asexuée. Périodiquement, elle s'arrête, s'arrondit et s'enkyste.
Forme de résistance et de dissémination, le kyste est sphérique, à paroi nette, de 7 à 12 microns de diamètre. Il contient de 1 à 4 noyaux caractéristiques et, du moins dans les formes jeunes, des inclusions trapues, réfringentes à frais (cristalloïdes) et se colorant fortement en noir par l'hématoxyline ferrique (chromidiums). Il est rejeté dans le milieu extérieur avec les selles.
Le cycle évolutif est direct, bouclé lorsqu'un sujet neuf déglutit les kystes infectieux souillant ses aliments ou sa boisson (rôle des mains sales des porteurs de germes et rôle vecteur passif des mouches).
Dans l'intestin, le kyste libère une petite amibe métakystique à 4 noyaux qui, après une nouvelle division nucléaire, se scinde en 8 amoebules de type minuta qui s'installent sur la muqueuse du côlon.
Le passage à la forme histolytica peut se faire à tout moment sous l'influence de divers facteurs dont certains seulement sont élucidés : flore associée, pH, déficit en IgA sécrétoires, fléchissement de l'état général... L'amibe change alors de biologie : pénétrant dans l'intimité de la muqueuse, grâce à des enzymes protéolytiques, elle devient hématophage et se multiplie activement provoquant une nécrose tissulaire. Certaines, revenues à la surface de la muqueuse, perdent leur caractère hématophage et redonnent des formes minuta.
Au stade végétatif, l'amibe dysentérique peut se présenter sous deux formes :
On peut trouver également des stades de division asexuée de chacune des deux formes précédentes et, pour la forme minuta seulement, des stades prékystiques : amibes arrondies ayant chassé de leur cytoplasme les résidus de la digestion.
N'est amibien que celui qui héberge Entamoeba histolytica, dont, seule, la découverte, sous l'une de ses 3 formes, permet d'affirmer l'amibiase.
Cette mise en évidence devra être demandée à des biologistes confirmés par l'expérience ; entre leurs mains, elle aboutira toujours à un diagnostic de certitude, positif ou négatif.
L'amibe dysentérique est la seule qui, en pratique, ait un rôle important en pathologie humaine. Ses actions n'en sont pas moins très variées : affections non apparentes des porteurs sains et colites amibiennes chroniques paucisymptomatiques dues à la forme minuta, ou épisodes dysentériques aigus et redoutables métastases extra-intestinales de la forme histolytica.
Dans la pratique courante, en zone d'endémie, c'est la dysenterie qui révèle une amibiase ; nous la décrirons donc en premier lieu.