Pourquoi un retour du néo lamarckisme ?
Le néo-Lamarckisme connaît donc un certain renouveau dans la communauté scientifique à la faveur d’un ensemble très important de découvertes dans les domaines de la microbiologie et de la biologie moléculaire. En effet ce faisceau de recherche vient, si ce n’est contredire, du moins moduler fortement les dogmes de la théorie de l’évolution et la théorie synthétique (aussi appelé néo-darwinisme)
Depuis la théorie synthétique, les biologistes considèrent que le système génétique est le seul responsable de l'hérédité des variations phénotypiques, et cette transmission entre les générations est largement indépendante des changements environnementaux.
Cependant, de nombreuses hérédités « non génétiques » sont actuellement admises, et permettent une transmission des caractères induits ou appris. Nous pouvons citer en premier lieu les phénomènes épigénétiques, mais également les mutations adaptatrices, l'hérédité comportementale, l'hérédité supportée par les relations sociales, le langage, les symboles, etc...
C’est principalement le strict hermétisme du génotype de la lignée Germinale comme elle a été écrite par Weismann qui est aujourd’hui remis partiellement en cause par les scientifiques.
En effet elle implique que les descendants n’héritent que de l’information génétique provenant des noyaux de la lignée germinale des parents, et que ces noyaux ne reçoivent aucune information provenant de la lignée somatique. De façon aléatoire, dans la lignée germinale et l’évolution n’a donc d’impact que sur celle-ci. Cette théorie interdit de facto toute hérédité des caractères acquis ou induits par l’environnement.
Plus généralement le néo-Darwinisme admet qu’il n’y a que l’information génétique qui est transmise aux descendants, portée par les chromosomes de la lignée germinale. Ceci implique que les phénotypes transmis aux descendants doivent respecter la ségrégation méiotique, c'est-à-dire les lois de Mendel.
Or de nombreuses études mettent en lumière des hérédités violant ces lois, le plus souvent supportées par des mécanismes épigénétiques, comme par exemple les paramutations ou bien l’ « absorption » d’ADN exogène dans les spermatozoïdes de nombreux métazoaires.
Ces exemples relancent donc le débat sur la possibilité que l’environnement puisse avoir une « empreinte » sur l’hérédité, et démontrent la transmission de caractères induits, ce qui équivaut à une certaine hérédité des caractère acquis, concept associé dans la littérature au néo-lamarckisme.
Cependant ces phénomènes épigénétiques héritables ont généralement un impact qui se dilue au fil des générations, ou bien un aspect réversible. La portée de ces variations est de quelques générations et ne peuvent donc pas être le principal support de l'évolution.
Elles ne se substitueraient donc pas à l'hérédité du système génétique, mais serait responsable d'une certaine modulation de celui-ci.
Le rôle des mécanismes épigénétiques dans l'évolution.
Un des principaux enseignements de Darwin est de nous montrer qu'une des principales qualités de la Vie est son pouvoir d’adaptation aux variations de son environnement dans l'espace et dans le temps.
Il y a plusieurs échelles temporelles dans ces variations environnementales
Cependant il existe également des variations de l'environnement d’échelles de temps intermédiaires, de l'ordre de quelques dizaines de générations. Or la variation génétique ne peut pas répondre à ces variations. En effet, l'impact des mutations génétiques sur l'évolution des phénotypes peut être très long avant de donner des caractères nouveaux, du moins chez les organismes pluricellulaires.
La réponse à ces variations intermédiaires serait cette hérédité épigénétique. L'évolution aurait sélectionné des mécanismes de variation phénotypique rapides, héritables sur quelques générations
En effet un certain nombre de phénomènes épigénétiques agissent comme des « interrupteurs » moléculaires, modulant l’expression des gènes, et permettant ainsi à l'organisme d'avoir un « panel phénotypique » large afin de s’adapter rapidement à l'environnement.
De plus l'avantage de ces mécanismes épigénétiques, assez complexes, par rapport à des mécanismes de modulations transcriptionelles plus simples, serait justement cette hérédité.
Ainsi un premier organisme modifierait au cours de sa vie un ou plusieurs caractères en réponse à l’environnement par « switch » épigénétique induit par un certain nombre de censeurs de l’environnement.
Si cette modification donne un avantage reproductif et qu’il transmet cette variation à ses descendants, ils bénéficieront eux aussi de cette avantage reproductif.
Ici il n’y a pas eu modification de la séquence d’ADN. Ainsi, si après quelques générations les conditions abiotiques reviennent à leurs conditions initiales, les descendants pourront rapidement se « réadapter », car ayant déjà potentiellement toute l’information génétique pour cela.
Dans la nature on observe de nombreux cas où les phénotypes ne suivent pas la fréquence de modification qu’il devrait avoir si l’on tient compte uniquement de l’horloge des mutations génétiques. En effet il existe des phénotypes qui ne subissent des variations sur des temps assez cours, de l’ordre de quelques générations, mais aussi très longs (on parle de canalisation).
Il existerait donc des « échelles de l'évolution » supportés par des mécanismes biologiques différents afin de répondre à des variations de l'environnement d'échelles de temps variée.
Cette « plasticité héritable » à un donc un enjeu fondamentale très important pour la compréhension de l'évolution, particulièrement dans la période actuel où les organismes doivent faire face à une pression de sélection très forte, en grande partie dut à l’homme, mais aussi pour comprendre comment les populations naturelles vont s’adapter au réchauffement climatique.