En 1789 en Angleterre, Edmond Cartwright invente la machine à peigner le coton et reçoit pour cela une récompense de 10.000 livres du parlement en 1792. Cet ingénieur sans fortune emploiera jusqu'à 400 ouvriers, tandis le rival Robert Owen en fait travailler 4.000 rapidement au même moment dans la ville-champignon écossaise de New Lanark. Son invention multiplie le potentiel de celles réalisées en 1765 par James Hargreaves, la fileuse Spinning-Jenny), puis en 1769 par Watt (machine à vapeur avec condensateur) et en 1768 Arkwright avec la fileuse waterframe.
Toujours en 1789, mais dans le Rhode Island, l'immigré anglais Samuel Slater (en) s'associe à Moses Brown, qui créé une usine textile à Pawtucket, avec son gendre William Almy, et son neveu Smith Brown. Samuel Slater apporte les technologies développées en 1768 par Arkwright puis quitte la firme Almy, Brown & Slater pour crééer la sienne avec son fils John en 1818.
La nouvelle machine de Edmond Cartwright, qui fonctionne à la vapeur, décuple la productivité des filés de coton en seulement dix ans et profite d'un charbon deux fois moins cher grâce aux nouvelles voies de communication construites dans la région de Manchester, dès 1761 avec le canal de Bridgewater, bientôt suivis par d'autres. Sur la seule période de 1789 à 1793, le parlement anglais autorise la création de 53 sociétés par action pour la construction de canaux, qui vont lever en 4 ans près de 5 millions de livres, essentiellement par le biais d'annonces dans les journaux. Entre 1760 et 1830, 6.000 kilomètres de canaux sont creusés en Angleterre.
Les prix des vêtements en coton baissent, même si dans un premier temps celui de la matière première augmente de 50%, face à l'explosion de la demande. Dans le port de Liverpool le prix de la livre de coton (indice cotlook) passe de 30 à 45 dollars entre 1790 et 1800, avant de retomber à 10 cents, mais seulement en 1840, l'offre de coton brut ne s'adaptant que progressivement à la demande.
Les États-Unis (comme colonie anglaise puis État indépendant) n'ont accueilli que 5% environ des 11 millions d'esclaves victime de la traite, avec 350 000 à 600 000 personnes, selon les estimations, contre plus de 1,6 million pour les Antilles britanniques, environ 1,7 million pour les Antilles françaises et plus de 4 millions au Brésil.
En 1750, sur 1,5 million d'habitants, l'Amérique du Nord compte 350 000 esclaves noirs. En 4 générations, un siècle plus tard, leurs descendants sont 11 fois plus nombreux : 4 millions d'esclaves noirs, soit dix fois plus qu'à Saint-Domingue, où l’économie sucrière était la plus profitable du monde, et plus du double de la population d'esclaves que le Brésil ait jamais eu dans toute son histoire.
La percée du coton au début du XIXe siècle n'est pas seulement technologique. Les nouveaux industriels de la région de Manchester et du Nord des États-Unis font preuve d'un savoir-faire marketing impressionnant pour l'époque. La consommation de coton par habitant est multipliée par sept en Angleterre entre 1830 et 1860. En 1840, 80% de toutes les machines à vapeur d'Europe tournent en Angleterre.
Après avoir explosé au tournant du siècle, la productivité des usines de coton britannique quadruple encore entre 1830 et 1845. Les gains de productivité sont réinvestis dans des baisses de prix et les capitaux circulent vers d'autres industries, qui embauchent aussi, augmentant la demande solvable.
Le résultat est désastreux pour les cotons indiens, qui sont quasiment rayés de la carte mondiale à partir de 1830, causant d'immenses dégâts chez les planteurs comme les tisserands.