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Bien longtemps après le lancement, quelques ingénieurs opiniâtres découvrent une anomalie critique dans l'équipement de communication de Cassini, pouvant provoquer la perte de toutes les données transmises par la sonde Huygens.
Comme Huygens n'a pas la taille nécessaire pour émettre directement à destination de la Terre, il est prévu qu'il transmette ses données télémétriques au cours de sa traversée de l'atmosphère de Titan, par radio à Cassini les relayant vers la Terre à l'aide de son antenne principale de 4 m de diamètre. Des ingénieurs, notamment Claudio Sollazo et Boris Smeds employés par l'ESA à Darmstadt, sont troublés par, à leur avis, l'insuffisance des tests en conditions réelles de ce mode de transmission, avant le lancement. Smeds réussit, avec quelques difficultés, à convaincre ses supérieurs de réaliser de nouveaux tests pendant le vol de Cassini. Début 2000, il émet des données télémétriques simulées, avec des puissances d'émission et des décalages Doppler variables, depuis la Terre vers Cassini. Cassini s'avère incapable de relayer les données correctement.
En voici la raison : quand Huygens descend vers Titan, son mouvement sera accéléré vu depuis Cassini, provoquant un décalage Doppler de son signal radio. De ce fait, les circuits du récepteur de Cassini sont prévus pour tenir compte du décalage de la fréquence de réception ... mais pas son microprogramme : le décalage Doppler n'affecte pas seulement la fréquence porteuse mais aussi la durée qui sépare chaque bits de données codé par une clef de décalage de phase, et transmis à 8192 bits par seconde, et de cela la programmation du système n'en tient pas compte.
La reprogrammation du système étant impossible, la seule solution fut un changement de trajectoire. Huygens a été largué avec un mois de retard, en décembre 2004 au lieu de novembre, et s'est approché de Titan d'une manière lui permettant d'émettre sa télémétrie vers Cassini perpendiculairement à sa trajectoire, réduisant de manière importante le décalage Doppler de ses émissions.
Cette modification de trajectoire a compensé la faille de conception et a permis la transmission des données bien que l'un de ses deux canaux d'émission ait été perdu pour une autre raison.
Huygens était programmé pour transmettre ses données télémétriques et scientifiques à Cassini en orbite, les relayant à destination de la Terre, au moyen de deux émetteurs-radio redondants en bande S, dénommés canal A et canal B. Le canal A était la seule voie de transmission pour une expérience de mesure des vitesses des vents par l'étude de petits changements de fréquence provoqués par le déplacement de Huygens. Dans une volonté délibérée de redondance, les images de la caméra de descente furent scindées en deux lots de 350, chacun transmis par un canal.
Mais il s'avèra que Cassini, à cause d'une erreur du logiciel de commande, n'ouvrit jamais le canal A. Le récepteur de la sonde en orbite ne reçut jamais la commande de mise en marche, selon la communication officielle de l'ESA qui annonça que l'erreur de programmation était de leur fait, la commande manquante faisant partie d'un logiciel développé par l'ESA pour la mission Huygens et que Cassini avait exécuté tel qu'il avait été livré.
La perte du canal A a réduit à 350 au lieu de 700 comme prévu, le nombre d'images disponibles. De même toutes les mesures de décalage radio par effet Doppler furent perdues. Des mesures de décalage radio de Huygens, moins précises que celles que Cassini aurait faites, ont été obtenues à partir de la Terre, ce qui ajouté aux mesures des accéléromètres de Huygens et des repérages de la position de Huygens par rapport à la Terre réalisés par le VLBI, ont permis de calculer les vitesses et directions des vents sur Titan.