Tant au niveau microscopique, où l'oreille perçoit la moindre variation de chaque composante, qu'au niveau macroscopique où la musique construit un certain ordre dans l'écoulement entropique du temps, l'art parvient à projeter dans l'avenir. Mais plutôt que de calquer une approche déterministe de la composition avec des lois harmoniques, des théories en composition musicale, et une règle de conduite de la pensée musicale, les compositeurs ont redéfini à la fois une nouvelle psychoacoustique musicale débarrassée des conceptions linéaires de l'acoustique classique, et les exigences d'une poïétique qui conserve les critères fondamentaux d'immédiateté et de spontanéité. Réflexions sur le fond, réflexions sur la forme. Deux tendances qui n'ont jamais été aussi intimement liées dans les préoccupations du compositeur, et que l'ordinateur a su réconcilier.
Aujourd'hui, la progression exponentielle de la capacité des ordinateurs, permet à tout ordinateur individuel la mise en place de productions identiques, où l'auditeur participe à l'élaboration de sa propre œuvre.
Les systèmes actuellement mis en œuvre essaient de rassembler, au sein de réseaux ouverts (banque de données de sons ou de modules de composition), des connaissances et des apprentissages particuliers offerts par chacun pour fournir à tous une matrice universelle. En s'attachant à l'architecture de l'œuvre, les compositeurs ont perçu comment la structuration s'effectue non seulement par des modèles théoriques ou développés à partir du matériau, mais aussi par des intuitions immédiates des métamorphoses de ces modèles. Ce formalisme homogène fournit une création, unique par nature et pourtant déjà jointe aux révélations de l'univers.
Une telle création contrecarre notre vision linéaire d'un temps qui s'écoule dans une direction. En introduisant la notion de processus compositionnel, de sémantique processuelle ouverte, les compositeurs sont parvenus, avec l'informatique musicale, à intégrer l'évolution temporelle de l'œuvre ; non plus la procédure elle-même, une quelconque stratégie du changement, mais bien certaines phases continues de ce changement. Les nouvelles modélisations musicales des processus de composition, à l'œuvre dans la musique assistée par ordinateur en devenir, traduisent cet affrontement permanent du sonore informel et de son organisation musicale.
Plus récemment, les travaux de René-Louis Baron, principalement axés sur l'intelligence artificielle, ont permis d'obtenir la génération automatique d'une multitude de mélodies orchestrées dites « à caractère populaire », c'est-à-dire « agréable à l'oreille » et aisément mémorisables par l'humain. La découverte est basée sur de nouvelles règles musicales permettant, en temps réel, une interactivité « homme-machine » et, dans le domaine de la robotique, une réactivité musicale à tout paramètre physique extérieur. Le procédé et le dispositif sont actuellement protégés par brevets internationaux. Ils permettent notamment de minimiser le poids des programmes informatiques de composition musicale appliquant ce procédé (20 à 50Ko). Cette faculté majeure permet d'embarquer le logiciel dans une puce musicale à faible coût afin d'envisager une production industrielle visant des applications diverses (téléphonie, jouets, jeux vidéo, etc.).
La composition musicale, comme toute forme de création artistique, postule une traduction non réfléchie d'un univers métasensible que l'on a cherché à connaître. Elle réclame donc, de fait, une réflexion sur le bien-fondé des relations entre diverses formes de représentation : son musical, matériau sonore d'une part (son, instrument, timbre…, mais aussi créations virtuelles d'espaces ou illusions auditives), création de l'œuvre d'autre part.
Dans un second temps la réflexion des chercheurs s'est donc focalisée sur certains points forts de la structure musicale, dans une direction fonctionnelle : comment « fonctionne » l'œuvre pour un auditeur ? Des psychologues, des créateurs et des informaticiens ont essayé de propager des réflexions communes au travers d'institutions spécialisées dans l'informatique musicale. Elles débouchent à l'heure actuelle sur des programmes informatiques rebaptisés composition musicale assistée par ordinateur (CMAO), ou aide à la composition, et où la représentation occupe tout à la fois le niveau local du matériau et le niveau global de la structuration de l'œuvre.