Le théorème de Desargues est l'un des (sinon le) plus important théorème de la géométrie projective. Il lie deux triangles et les droites qu'ils déterminent. Il est lié à la notion de groupes harmoniques.
En géométrie projective, son énoncé est le suivant :
Soient ABC et A'B'C' deux triangles sans point commun tels que les droites (AA'), (BB') (CC') soient concourantes. Alors, les points d'intersection des droites
sont situés sur une même droite.
Dans le cas où aucun point d'intersection n'est un point impropre, on obtient la configuration ci-contre:
Le dual de ce théorème en donne aussi la réciproque :
En géométrie projective, une démonstration simple consiste à utiliser une application projective qui transforme les triangles (ABC) et (A'B'C') en (A1B1C1) et (A'1B'1C'1) de telle sorte que les points d'intersection de (A1B1) et (A'1B'1) et de (A1C1) et (A'1C'1) soient impropres. Les droites (A1B1) et (A'1B'1) sont alors parallèles ainsi que les droites (A1C1) et (A'1C'1). On est alors revenu à la configuration précédente qui prouve que (B1C1) et (B'1C'1) sont parallèles et que leur point d'intersection est donc impropre (situé sur la même droite que les deux précédents). On en déduit alors la propriété sur les droites de départ.
En géométrie "classique", cette forme du théorème de Desargues peut se démontrer en imaginant que notre dessin représente en perspective un tetraèdre SABC coupé par un plan (A'B'C'). Les droites (AB) et (A'B') étant dans le plan (SAB) leur point d'intersection apparent est un point d'intersection réel commun au deux plans (ABC) et (A'B'C'), il en est de même du point d'intersection des droites (BC) et (B'C') et du point d'intersection des droites (AC) et (A'C'). Les plans (ABC) et (A'B'C') sont sécants suivant une droite (d) qui contient ces trois points d'intersection.
Au début du XXme siècle, David Hilbert tente une définition axiomatique du plan affine. Sur un espace muni de points, il définit des droites comme des ensembles de points vérifiant certains axiomes dont
Il découvre alors que ces axiomes ne permettent pas de démontrer le théorème de Desargues. Il faut l'existence de l'espace ou de l'axiome de la congruence. En d'autres termes, cet énoncé a valeur d'axiome en géométrie (affine ou projective) plane.
En 1902, Moulton exhibe un exemple de plan — le plan de Moulton — vérifiant les trois axiomes précédents et dans lequel le théorème de Desargues est faux.
En géométrie affine, le théorème de Desargues doit être complété pour prendre en compte les cas particuliers dus au parallélisme. La géométrie arguésienne permet de faire apparaitre ces énoncés particuliers comme des corollaires du cas général :
Si ABC et A'B'C' sont deux triangles, sans point commun tels que
alors les droites (AA'), (BB') et (CC') sont concourantes ou parallèles.
Dans la première configuration, on suppose que deux des droites (par exemple (AA') et (BB')) sont sécantes en S. La preuve s'effectue en construisant le point M sur (SC) tel que (A'M)//(AC). Le théorème de Thalès permet de prouver qu'alors (MB')//(CB). Or il n'existe qu'un seul point situé, d'une part sur la parallèle à (AC) menée par A', d'autre part sur la parallèle à (BC) menée par B' et ce point est C'. Donc M et C' sont confondus et les points SCC' sont donc alignés.
Dans la seconde configuration, on ne trouve aucune droite sécante : elles sont donc parallèles.
Réciproque : Soient ABC et A'B'C' deux triangles sans point commun tels que
alors (BC)//(B'C').
Avec des droites concourantes, nous retrouvons une conséquence du théorème de Thalès. Avec des droites parallèles, la démonstration utilise l'existence des parallélogramme (AA'B'B) et (AA'C'C) pour en déduire l'existence du parallélogramme (BB'C'C).