En mathématiques et plus particulièrement en algèbre, le théorème de Kronecker traite des groupes abéliens finis.
Le théorème de Kronecker est aussi appelé théorème fondamental des groupes abéliens finis. Il stipule que tout groupe abélien fini est isomorphe à un produit direct de groupes cycliques.
Ce théorème doit son nom à Leopold Kronecker qui l'a démontré la première fois en 1870 dans un article intitulé Auseinandersetzung einiger Eigenschaften der Klassenzahl idealer complexer Zahlen Monatsber.
Soit G un groupe abélien fini.
Il existe de nombreuses manières de démontrer ce théorème. Une des méthodes les plus expéditives utilise la théorie des représentation des groupes. Il en existe d'autres utilisant par exemple les caractères. La démonstration proposée ici reste dans le cadre strict de la théorie des groupes. Elle se fonde sur une décomposition en somme directe.
La démonstration se fonde sur la construction d'un projecteur φ dont l'image est le groupe cyclique C1 d'ordre θ l'exposant du groupe. Les projecteurs d'un groupe abélien sont étudiés dans le paragraphe Projecteur de l'article Produit direct (groupes).
Soit B une famille génératrice (g1,g2,...,gk) tel que l'ordre de g1 soit égal à θ. Une telle famille existe toujours car le groupe est fini. Il est toujours possible d'adjoindre à cette famille un élément g1 d'ordre θ.
La technique consiste à définir le morphisme sur C1 comme étant égal à l'identité, puis de prolonger ce morphisme sur le groupe engendré par g1 et g2 puis sur le groupe engendré par g1, g2 et g3 jusqu'à gk. La démonstration procède donc par récurrence sur k.
Existence de la décomposition
Il suffit de définir φ comme égal à l'identité. φ est un projecteur dont le noyau est réduit à l'élément neutre.
Notons (g1,g2,...,gp) la famille B de G. Alors si G' est le groupe engendré par les éléments (g1,g2,...,gp - 1), il vérifie l'hypothèse de récurrence. Il existe donc un projecteur φ' défini sur G' dont l'image est égale à C1.
Notons m l'ordre de gp. L'intersection H du sous-groupe <gp> et de G' est un groupe cyclique car c'est un sous-groupe du groupe cyclique <gp>. Soit u son ordre, u divise m d'après le théorème de Lagrange. Notons v l'entier défini par u.v = m. L'élément v.gp est un générateur de H (cf troisième propriété du paragraphe Théorème fondamental des groupes cycliques).
L'élément v.gp est un membre de H, or l'application φ' est définie sur H, il existe donc un entier t tel que:
v.u.gp est égal à 0 car u.v est l'ordre de gp. Donc u.t.g1 est aussi égal à 0 ce qui montre que u.t est un multiple de θ. Il existe donc un entier w tel que:
u.v est l'ordre de gp, un élément du groupe G. L'ordre de tout élément de G divise θ par définition de l'exposant d'un groupe. En conclusion il existe un entier x tel que x.u.v soit égal à θ. En remplaçant θ par sa valeur dans l'égalité (i) on obtient:
On définit alors φ par l'égalité suivante:
Si G est bien la somme de G' et
Soit g + n .gp et g' + n' .gp deux écritures d'un même élément du groupe G. Alors g - g' est à la fois un élément de G' et de <gp> car il est égal à (n' -n). gp. Cela démontre l'existence d'un entier l tel que g = g' + l.v.gp et l.v = n' - n.
φ est un endomorphisme de G, en effet :
Enfin, par construction de φ, l'image de φ est égal à C1 et la restriction de φ à son image est l'identité. L'application φ est un projecteur d'image C1. en conclusion G est somme directe de C1 et du noyau de φ.
Si G est d'ordre 1. Le théorème est évident.
Supposons le théorème démontré pour tous les groupes abéliens finis d'ordre strictement inférieur à n. Soit G un groupe abélien fini d'ordre n. Alors il existe un projecteur sur un groupe cyclique d'ordre l'exposant de G. G est donc somme directe du groupe cyclique et du noyau K du projecteur.
L'hypothèse de récurrence montre que K est somme directe d'une suite de sous-groupes cycliques C2,...,Ck tel que si i est un entier compris entre 2 et k - 1, alors l'ordre de Ci+1 divise l'ordre de Ci. De plus l'ordre de C2 divise l'ordre de C1 qui est égal à l'ordre de l'exposant de G, car l'ordre de tout élément de G divise l'exposant de G.
L'analyse de la somme directe de la suite de sous-groupes C1, C2,...,Ck démontre alors le théorème.
Unicité de la décomposition :
L'existence est donnée par la démonstration précédente. Prouvons l'unicité par une récurrence sur k.
Le groupe est cyclique et a1 est égal à l'ordre du groupe, ce qui démontre la proposition.