Le château du Rocher
à Mézangers en Mayenne est une demeure du XIIIe siècle, XIVe siècle, XVe siècle et XVIe siècle qui se reflète avec charme dans un étang. Construite en granit, elle est éclairée de fenêtres hautes et cantonnée de tours à toits pointus. Une galerie de cinq arcades en anse de panier, animant la gracieuse façade Renaissance, relie l'ancien corps de logis du XIIIe siècle à la chapelle du château (XIVe siècle). Jardins à la française.
Le château fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques depuis le 13 août 1963.
Origine
D'après l'Abbé Angot, Saint Aldric fonda dans un lieu nommé Ripiacus (du latin rupes, rocher) des établissements agricoles dont il disposa par testament en faveur de son frère Isaac. L'auteur des Actus pontificum Cenomannis, qui vivait à la même époque, prétend qu'Évron était situé in villa Rupiaco. La colline du mont Rochard, qui est proche, aurait la même origine étymologique.
Le château est cité en 1282 sous le nom de Rochier; Le seigneur dou Rocher (avant 1398), le fief au seigneur du Rocher (1446), Capella hospicii seu castelli du Rocher (1650); La baronnie du Rocher (1741) ; La terre, fief, seigneurie et baronie du Rocher, 1775.
La chapelle
La chapelle, dédiée à Sainte Catherine, dotée le 16 novembre 1446 par Nicolas Ballayne, prêtre, du lieu des Naillères, et par Foulques Le Maire du Petit-Bréhuon, ne fut décrétée qu'en 1494, afin que Dieu, nostre créateur, disent les fondateurs, de sa bénigme grâce sans laquelle nul bien n'est rémunéré, veuille ouïr et exaucer nos biensfaitz. Elle devait alors être desservie dans les églises de Mézangers et de Sainte-Gemmes. Une statue de la sainte, qui date au moins de cette époque, est conservée au château. Le service religieux se faisait dans la chapelle actuelle dès 1524 au moins.
Parmi les titulaires :
Jean du Boisbellanger, 1507
Jacques Plançon, 1524
Jean de Bouillé, 1537
Léonor de Bouillé, 1605, 1609
Louis Lautier, du diocèse d'Aire, docteur en théologie, 1699
Charles Demaine, du diocèse de Sisteron, docteur en théologie, chanoine de Saint-Nicolas du Louvre, 1714, 1741
Prosper Morard de Galles, du diocèse de Grenoble, chanoine de Troyes, abbé de Preuilly, 1767, 1775
Un château primitif antérieur au XIVe siècle a peut-être laissé des vestiges (cf. épaisseur des murs intérieurs) vers l'angle où se joignent les deux corps de bâtiments actuels.
Au XIVe siècle / XVe siècle on construit un manoir plus habitable, visible encore à l'ouest et au nord, sur les étangs, avec ses tours multiples.
Dans les premières années du XVIe siècle, le goût des constructions plus luxueuses et des aspects artistiques plus recherchés se répand. Dans les murs sombres sont enchâssés de gracieux étagements de portes, fenêtres, lucarnes et frontons capricieusement fouillés par le ciseau des moulures, d'arabesques, de figures, d'entrelacs. Au Rocher, laissant subsister seulement les façades nord et ouest, le sieur de Bouillé démolit celles de l'est et du sud, coupant en deux les charpentes et les divers appartements afin de donner à sa cour d'honneur l'aspect des demeures princières et de satisfaire ses goûts d'artiste. L'aile qui s'éclaire au midi, entreprise la première, le fut par des ouvriers moins experts. La chapelle, qui est à angle opposé, semble du même faire. Mais entre les deux, en plein soleil levant, court une galerie d'une ordonnance merveilleuse, d'un dessin et d'un fini achevés dans l'ornementation. M. Léon Palustre affirme avec assurance qu'elle est l'œuvre d'artistes normands, de Caen même, dit-il. Ils prirent sur place le granit et l'employèrent seul pour ces sculptures délicates qui ont si bien résisté aux injures du climat.
L'église d'Hambers, possède un autel de la Renaissance construit vers 1530 aux frais d'un prêtre, de famille noble, originaire de la paroisse, Eustache de la Haie. L'abbé Angot croit pouvoir l'attribuer aux artistes qui construisaient, à la même époque exactement, la galerie du château du Rocher. Dans tout l'arrondissement de Mayenne et dans celui de Laval, l'autel d'Hambers, et le château du Rocher sont des œuvres uniques. La chapellenie qu'Eustache de la Haie attribua à l'autel qu'il fit construire, dotée en 1528, fut décrétée en 1534. C'est la date précise où l'on construisait la galerie Renaissance du château du Rocher, vers 1535, dit M. Léon Palustre.
Au rez-de-chaussée, cinq arcades, au cintre surbaissé, les trois médianes closes à hauteur d'appui par une murette et séparées par des pilastres, supportent sur des chapiteaux curieusement fouillés une corniche saillante et des frises où les volutes, fleuronnées de têtes humaines, s'enroulent autour de charmants chérubins. Les pilastres, continuant leur ascension, encadrent deux larges baies carrées qui, avec trois fenêtres plus étroites, ajourent la galerie supérieure ; ils coupent ensuite la corniche des combles et soutiennent deux lucarnes superposées, la plus haute flanquée d'arcs-boutants qui lui donnent élégance et légèreté. Partout sont prodigués les ornements, écussons, trophées, arabesques,avec le même fini et la même délicatesse.
Au XVIIIe siècle, Benoît Eynard, grand maître des Eaux et Forêts de la généralité de Tours, acquéreur du domaine le 18 avril 1728, aménage de nouveaux appartements à la suite de l'aile nord. Les jardins, les bois, les pelouses sont aussi l'objet de ses soins; il procède au nivellement du terrain et veille à l'exploitation du domaine, pour laquelle il fait construire les immenses greniers dont parle le châtelain de Bourgon, son voisin. L'entrée du château, auparavant située au sud, étroite, incommode, est aménagée de manière à mieux faire valoir la partie centrale du bâtiment.
À la fin du XIXe siècle, de nouvelles restaurations sont entreprises par le comte Horric de Beaucaire.