Eurocontrol a été créée en 1963, à l’origine, pour unifier sous son égide la gestion du trafic aérien dans l’espace supérieur. Le Centre de Maastricht est le témoin de cette ambition, vite torpillée par les États membres, qui ont préféré garder le contrôle total de la prestation de service.
La crise de capacité des années 1980-1990 a donné à Eurocontrol l’occasion de développer ses activités au titre du CFMU et de la gestion du réseau paneuropéen. Mais l’irruption d’un nouvel acteur, la Commission européenne, et du programme Ciel Unique bouleverse les missions de l’organisation.
La Commission a créé une agence, l’EASA, qui à terme devrait reprendre les fonctions de régulation de la navigation aérienne en Europe. La convention révisée ne sera sans doute pas ratifiée par tous les États, car le mouvement de privatisation des prestataires nationaux de services de navigation aérienne remet profondément en cause le rôle de l’agence dans la gestion du réseau, des fonctions paneuropéennes et dans la gestion du Centre de Maastricht. Le projet SESAR fait d’Eurocontrol un acteur parmi d’autres dans le développement stratégique et lui retire sa fonction de chef de file de cette coordination.
Le projet SESAR (Single European Sky ATM Research) est le pilier technologique du programme Ciel Unique ou SES (Single European Sky). Il vise à doter l’Europe d’une infrastructure ATC (Air Traffic Control) performante pour les 30 années à venir. Ce projet est coordonné avec le projet NextGen de la FAA (Federal Aviation Authority) qui a des ambitions identiques pour les États-Unis.
SESAR cherche à définir un système de gestion du trafic aérien capable d’en assurer la fluidité et la sécurité et à mettre en place le programme de modernisation des infrastructures pour y parvenir.
Le projet SESAR veut :
SESAR comprend trois phases principales :
Pour gérer la phase de développement, un organe de coordination temporaire a été créé le 27 février 2007 : l'entreprise commune SESAR (SESAR JU). Cette entreprise commune trouve sa base légale sous l’article 171 du Traité de l’UE. Elle est composée de deux membres fondateurs : la Commission Européenne et Eurocontrol. De nouveaux membres désireux de participer à cet organe peuvent y adhérer selon des règles strictes visant à empêcher des conflits d’intérêt dans les marchés publics.
Le but du SESAR JU est de coordonner les efforts de recherche et de développement du projet SESAR dans le cadre du Plan directeur ATM (ATM Master Plan) défini par la première phase du projet, avec pour objectif de rationaliser l’emploi des ressources financières et techniques des partenaires impliqués dans le projet SESAR.
Partant du constat que la fragmentation excessive du système de contrôle aérien induit des coûts élevés (une étude d’Eurocontrol montre que le système ATC européen coûte plus du double que celui des États-Unis) et crée des inefficacités dans la gestion du trafic (basse productivité des services ATC, trajectoires de vol sub-optimales, risques de sécurité dus à des procédures non harmonisées), le programme Ciel Unique vise à améliorer la coopération entre les fournisseurs de service ATC et, à terme, d’en permettre la consolidation.
Le règlement européen 551/2004 du 10 mars 2004 crée l’obligation de mettre en place une région unique européenne d’information de vol pour l’espace supérieur (au-dessus du niveau de vol 285) et d’organiser cet espace en blocs d’espace aérien fonctionnels (ou FAB Functional Airspace Bloc). La reconfiguration de l’espace aérien devrait être fondée sur les besoins opérationnels, indépendamment des frontières existantes, ce qui constitue une innovation majeure par rapport à la situation actuelle où chaque État gère son propre ciel et où les délégations d’espace sont très limitées (accords entre États permettant pour des raisons opérationnelles à un fournisseur de service de contrôler des routes dans l’espace d’un autre État).
Dans l’optique du règlement, les blocs d’espace aérien fonctionnels : a) sont étayés par un dossier de sécurité ; b) permettent une utilisation optimale de l’espace aérien, compte tenu des courants de trafic aérien ; c) sont justifiés par la valeur ajoutée globale qu’ils apportent, y compris l’utilisation optimale des ressources techniques et humaines, sur la base d’analyses coût/efficacité ; d) assurent un transfert fluide et souple de la responsabilité du contrôle de la circulation aérienne entre les unités des services de la circulation aérienne ; e) assurent la compatibilité entre les configurations des espaces aériens supérieur et inférieur ; f) respectent les conditions découlant des accords régionaux conclus au sein de l’OACI ; g) et respectent les accords régionaux, en particulier ceux concernant les pays européens non-membres de l’UE.
L’approche retenue pour la mise en place des FAB est dite bottom-up (approche ascendante), c’est-à-dire que l’initiative en est laissée aux États qui doivent les bâtir en coopérant entre eux et avec Eurocontrol.
En réalité, la mise en place des FAB se heurte aux mêmes obstacles et aux même réticences que ceux qui ont empêché Eurocontrol de jouer un rôle fédérateur plus affirmé en Europe. À ce jour (mars 2008), aucun FAB n’a été mis en place. Les études de faisabilité actuellement en cours sont :
Face à l’avancement insuffisant de ces projets ainsi qu’à leur contenu insatisfaisant, la Commission Européenne envisage un second paquet législatif, qui serait élaboré en 2008, pour accélérer l’intégration du ciel européen. Dans ce contexte, l’appui d’Eurocontrol sera requis pour assister les États afin de parvenir à des résultats concrets et mesurables.
(sources : texte cité + communication de la Commission COM(2007)101 du 15.03.2007)