Les exceptions suivantes peuvent survenir dans pratiquement tous les programmes :
D'autres erreurs peuvent être interceptées par le compilateur, par exemple les erreurs de type, dans les langages à typage statique.
Dans certains langages à objets, le type d'une exception doit impérativement être une classe. Une hiérarchie prédéfinie et extensible de types d'exceptions, correspondant au type des erreurs qu'elles représentent est fournie. D'autres langages, comme C++, autorisent aussi les types primitifs.
Dans un bloc de traitement, le programmeur a deux options :
Beaucoup de langages de programmation (par exemple C++, Java) ne permettent que la terminaison pure et simple du bloc fautif. On ne peut réparer ni reprendre les opérations. En Python, les mécanismes de métaprogrammation et de meta-meta-programmation natifs permettent en plus de modifier le programme à la volée, par exemple pour auto-réparer ou reprendre un programme.
Lorsqu'une condition d'erreur est détectée (par une primitive de signalement, une trappe processeur, le système d'exploitation ou encore l'environnement d'exécution du programme), on dit qu'elle est signalée : un bloc de traitement d'erreur (un handler) est recherché dans la liste des gestionnaires actifs. L'exécution du programme est déférée au bloc de traitement, qui effectue des actions correctrices et décide si le calcul où l'erreur a été signalée est terminé ou bien repris (si c'est possible, c'est-à-dire en présence de restarts).
Il se peut qu'aucun gestionnaire n'ait été prévu par le programmeur, auquel cas un gestionnaire par défaut, dont le comportement est pré-défini, est sélectionné.
Exemple en Delphi ou en Lazarus :
procedure TForm1.Button1Click(Sender: TObject); var f: Real; // soit f un nombre réel begin f:= 1; // on affecte la valeur 1, jusqu'ici tout va bien try // on débute un bloc protégé f:= 1/0; // provoque une division par zéro, ou alors f vaut +infini f:= sin(f); // sinus de +infini est indéfini sinon except // on gère les exceptions on e: Exception do // on appelle e l'exception qui vient d'arriver Application.MessageBox( PChar('Message: '+e.Message), 'Exception', 0); end; // fin du bloc protégé Application.MessageBox( PChar('Valeur de f: '+FloatToStr(f)), 'Resultat', 0); end;
Java offre un SGE terminal, donc sans réparation ni reprise.
Exemple de traitement d'une division par zéro :
public class FooBar { FooBar () { } void foo (SomeObj a, String b) { int resultat; try { resultat = bar (b); } catch (Exception e) { System.out.println ("erreur pendant l'exécution de bar: " + e.toString ()); resultat = 666; } return resultat; } int bar (String s) { System.out.println ("tiens, un " + s); System.out.println ("faisons quelque chose de mal..."); int a = 42 / 0; // <- quelque chose de mal a = a + 7; return a; } }
Dans CLU [Lyskov-Snyder 79] et Java, une distinction est faite entre :
void foo () throws ThisExceptionType { ... },
Les « checked exceptions » essayent de résoudre un problème de contrat. L'interface d'un module (d'une bibliothèque de classes) représente un contrat entre l'auteur du module et son utilisateur : l'argument est qu'un tel contrat ne devrait pas passer sous silence les exceptions susceptibles d'être propagées hors des frontières du module.
En spécifiant les exceptions dans les signatures des méthodes, on introduit toutefois un problème. En effet, les méthodes clientes doivent choisir dans l'alternative :
Les méthodes utilisant des checked exceptions contaminent leurs clients avec l'obligation de décorer leur signature, s'ils n'installent pas de GE pour ces exceptions. Cette contamination trahit en partie le contrat d'indépendance entre le lieu du signalement d'une exception et le lieu de son traitement, en exposant toutes ces déclarations d'interfaces dans le chemin d'appel ; en somme elles nous ramènent aux inconvénients des langages de programmation sans SGE (transmission de l'exception par une valeur de retour spéciale, prévue en tout point de la chaîne d'appels). Les « checked exceptions » violent finalement la philosophie des exceptions (la non-localité entre le lieu de la condition et le lieu de son traitement).
Du coup, la bibliothèque standard de Java utilise en pratique des runtime exceptions pour les opérateurs les plus courants (arithmétique, collections, allocation mémoire) afin éviter la pollution lexicale des checked exception.
Les SGE à terminaison portent une vue radicale et rigide sur les exceptions : toute exception signalée entraîne la mort du signaleur. Le programmeur ne peut souvent utiliser le SGE que comme un « pare-feu » contre les situations exceptionnelles, pour contenir une situation urgente et irréparable, sauver ce qui peut l'être avant d'abandonner le navire ...
En pratique, les exceptions signalées peuvent n'être que relativement bénignes, ou transitoires ; dans ce cas, un idiome combinant le SGE, des variables, des tests, des boucles, doit être mis en œuvre pour recommencer un calcul qui aurait échoué pour des raisons bénignes. De tels idiomes sont la réponse ad-hoc du programmeur enfermé dans un SGE sans réparation et reprise du contexte signalant.
En Smalltalk, ces difficultés sont mitigées par les possibilités suivantes :
Les mots clefs retry et retryUsing: permettent, respectivement d'exécuter à nouveau le bloc protégé par le handler sans utiliser de bouclage explicite, ou d'exécuter un nouveau bloc à la place du bloc qui a signalé l'exception. Voici un exemple :
| fileContents | fileContents:= ['myfile.txt' asFilename readStream contents] on: Error do: [:ex | | newName | newName:= Dialog prompt: 'Problem reading file. Another name?'. ex retryUsing: [newName asFilename readStream contents]]
Certaines exceptions sont dites « continuables ». Cela signifie qu'un gestionnaire peut envoyer un message resume (ou resume : qui transmet son argument au retour de l'expression signalante) à l'exception, ce qui provoque le transfert du contrôle sur le retour de l'expression signalante.
Voyons un exemple, sur un bout de programme effectuant la lecture des « options » d'un fichier de configuration (couples variable = valeur). Le premier fragment analyse la prochaine option située dans un stream représentant le fichier :
MyApplication>>readOptionsFrom: aStream | option | [aStream atEnd] whileFalse: [option:= self parseOptionString. "nil if invalid" option isNil ifTrue: [InvalidOption signal] ifFalse: [self addOption: option]]
Le second fragment utilise le premier pour lire la configuration complète ; le gestionnaire de l'exception « InvalidOption » y est défini.
MyApplication>>readConfiguration [self readOptionsFrom: 'options' asFilename readStream] on: InvalidOption do: [:ex | (Dialog confirm: 'Invalid option line. Continue loading?') ifTrue: [ex resume] ifFalse: [ex return]]
Puisqu'on a introduit la possibilité de reprendre un calcul sur l'instruction suivant le signalement, on doit se garder de détruire la pile d'appels au moment du signalement : cette destruction doit prendre place au moment où le programme sort du dernier gestionnaire impliqué dans le signalement.
Les SGE des langages précédents ne considèrent pas la possibilité de réparer le contexte signalant l'exception et de redémarrer le calcul dans le contexte ainsi réparé. Smalltalk permet de fournir une valeur de retour de substitution pour l'expression signalant une exception, mais le gestionnaire n'a pas accès à l'environnement lexical fautif.
Une condition est une généralisation d'une erreur [Pitman 01] : toutes les conditions ne sont pas indésirables.
À la hiérarchie des types d'exceptions des SGE à terminaison correspond une hiérarchie de types de conditions, incluant une branche pour les conditions non-fatales. Cette hiérarchie est décrite avec le Common Lisp Object System, c'est donc également une hiérarchie de classes d'exceptions.
Dans le SCCL, un bloc de traitement d'un gestionnaire de condition est une fonction fermée sur l'environnement lexical du gestionnaire d'exception, et qui s'exécute dans l'environnement dynamique de la routine où la condition est signalée ; le contexte dynamique de la routine signalante n'est pas détruit.
Cela signifie que le signalement n'implique pas de transférer le flot de contrôle de façon non locale : on ne détruit pas la pile d'appels au moment du signalement. Le signalement débute par un appel de fonction au GE adéquat ; il peut être écrit comme suit :
(defun signal (condition) (funcall (find-first-active-handler-of-type (type-of condition)) condition))
Un restart est une fonction contenant les instructions nécessaires à la réparation d'une situation exceptionnelle, et fermée sur un environnement lexical proche du lieu du signalement. Il est donc situé, dans la chaîne d'appels, entre le GE adéquat et la condition signalée. Un restart est typiquement invoqué par le gestionnaire d'une condition pour modifier l'environnement lexical ou dynamique de la procédure signalant la condition (réparer la situation) et effectuer un saut non-local vers un point de cette procédure (reprise).
Nous mentionnons les opérateurs les plus significatifs du système de conditions.
Établir un GE | HANDLER-BIND |
Établir des restarts | RESTART-BIND |
Trouver des restarts | FIND-RESTART |
Invoquer un restart | INVOKE-RESTART |
Signaler une condition | SIGNAL, ERROR, WARN ... |
Saut non-local vers une marque | THROW |
Marquer le cadre courant | CATCH |
(catch symbol) et (throw symbol) sont à la disposition du programmeur Lisp pour, respectivement, marquer avec un symbole le cadre courant, et détruire la pile d'appels en la remontant jusqu'à la première marque correspondant au symbole passé en argument. Ils sont utilisés implicitement par le système de condition.
Si handler-bind implique un catch, les primitives de signalement ne débutent jamais par un throw. Throw n'est invoqué que si le gestionnaire effectue un saut non-local vers son contexte lexical (qui est différent de son contexte dynamique au moment où il est appelé), ce qui signifie qu'on veut effectivement détruire la pile d'appels.
Le SCCL peut être utilisé juste comme les SGE à terminaison : on établit un gestionnaire, on signale, on se demande quoi faire.
1 . (defun foo () 2 . (tagbody 3 . (print « foo ») 4 . (handler-bind ((some-condition 5 . (lambda (condition) 6 . (print (type-of condition)) 7 . (go after-the-fact)))) 8 . (bar)) 9 . after-the-fact 10. (print "après bar, dans foo")) 11. 12. (defun bar () 13. (print « bar ») 14. (error "C'est bien une erreur" 'some-condition) 15. (print "ce code est inatteignable"))
Examinons cet exemple, du point de vue du flot de contrôle. La trace d'un appel à foo est :
3 . foo 13. bar 6 . SOME-CONDITION 10. après bar, dans foo
La décision de détruire la pile d'appels est prise par le « (go after-the-fact) » du gestionnaire pour some-condition. Le système Lisp doit faire un throw juste avant d'exécuter le go.
Le schéma suivant exprime les étapes mises en œuvre lorsqu'on utilise un restart.
Reprenons ces étapes (cas de la reprise) :
1. établissement du gestionnaire G (pour le type de condition C) dans l'environnement dynamique du programme (cela signifie que G est accessible en tout cadre de la chaîne d'appels sous son cadre d'établissement) ; G peut capturer des variables lexicales du cadre où il est déclaré (c'est une fermeture lexicale),
2. appel de la forme « protégée » par G,
3. appel à une nouvelle procédure, d'où sera signalée une condition de type C,
4. établissement d'un restart R protégeant une expression de cette procédure, dans l'environnement lexical de cette dernière,
5. l'expression protégée de la procédure signale une condition de type C : le gestionnaire G est trouvé dans l'environnement dynamique (c'est le gestionnaire actif le plus récent pour les conditions de type C),
6. G décide de reprendre le calcul, il invoque le restart R,
7. R effectue, dans le contexte lexical de la procédure signalante une réparation (si besoin) et transfère le contrôle à la procédure (saut non-local), qui reprend son travail (selon toute raison, en #4).
Bien sûr, si le gestionnaire décide d'abandonner le calcul (#6 bis), un saut non-local est effectué vers le cadre où G a établi ses liaisons lexicales (et en particulier l'étiquette utilisée pour le saut) ; la pile d'appels est détruite, R est détruit, et juste après le saut, G lui-même est détruit.
Nous développons l'idée d'utiliser le système de conditions pour exploiter les résultats d'un solveur de contraintes. Un solveur de contraintes, lorsqu'il trouve une solution, la signale à la routine qui a demandé le calcul. Si la routine est satisfaite de la solution, elle peut arrêter le solveur ; elle peut également reprendre le calcul pour obtenir la solution suivante.
On commence par définir un nouveau type de condition, correspondant à une solution trouvée par le solveur, avec un slot pour la solution :
(define-condition backtrack-solution (condition) ((sol:initarg solution:reader solution)))
On établit un gestionnaire d'exceptions dans la routine qui a besoin des résultats du solveur ; ici, on choisit d'analyser le résultat du solveur au fur et à mesure de sa progression :
1 . (defun foobar (...) 2 . (let ((solutions-we-dont-like)) 3 . (handler-bind 4 . ((backtrack-solution ; type de la condition 5 . (lambda (condition) 6 . ;; on décide quoi faire 7 . (let ((sol (solution condition)) 8 . (when (good-enough sol) 9 . (return-from foobar sol)) 10. (push sol solutions-we-dont-like) 11. (invoke-restart 12. (first (find-restarts condition))))))) 13. ;; l'appel initial au solveur 14. (backtrack-with args in the env)) 15. (choose-best-amongst solutions-we-dont-like)))
On observe que le gestionnaire peut décider, en fonction de la « qualité » de la solution, de la retourner (ligne #9), ce qui implique l'abandon du calcul en cours et la destruction des cadres associés à ce calcul ; ou bien de l'empiler (ligne #10) et de reprendre la recherche (lignes #11-#12).
Dans le code du solveur, on doit signaler la condition bactrack-solution lorsqu'une solution est trouvée :
(defun backtrack-with (vars future inst foo) ;; s'il n'y a plus de variable à instancier, on signale une solution (if (not future) (cerror "Autres solutions" 'backtrack-solution :solution (instances vars)) ... ))
La primitive cerror condense en une seule opération l'établissement d'un restart et le signalement d'une condition. On aurait pu écrire, plus verbeusement, mais avec le même effet :
(tagbody (restart-bind ((more-solutions (lambda () (print « restarting ») (go local-restart-point)))) (error "Autres solutions" 'backtrack-solution :solution (instances vars))) local-restart-point)
Le premier langage à avoir systématisé la gestion des exceptions a été le PL/I (circa 1970).
Il permettait d'activer dans la portée d'un bloc une ou plusieurs des conditions suivantes, et de leur associer un traitement, l'association restant valable jusqu'à
Les conditions reconnues étaient : AREA, CHECK (changement de valeur d'une variable), CONDITION (condition définie par le programmeur), CONVERSION, ENDFILE, ENDPAGE, KEY, UNDEFINEDFILE, FIXEDOVERFLOW, OVERFLOW, UNDERFLOW1, ZERODIVIDE, STORAGE, STRINGRANGE, SUBSCRIPTRANGE, ERROR, FINISH, ANYCONDITION.
Exemple :
on check(valeur, somme, verif) call anomalie;
exécutait le programme anomalie chaque fois que l'une des trois valeurs valeur, somme ou verif voyait sa valeur changer (on pouvait ainsi implémenter l'équivalent de ce que sont aujourd'hui les triggers dans les bases de données relationnelles.
ERROR était activé pour chaque condition non traitée explicitement, en plus du traitement implicite (en général un message d'erreur, ou rien du tout si elle n'était pas activée par défaut pour des raisons de performance, comme par exemple STRINGRANGE ou SUBSCRIPTRANGE).
FINISH était invoquée systématiquement à la fin de tout programme, quelle que soit sa cause. En calcul scientifique, on pouvait en profiter par exemple pour effectuer une sauvegarde de toutes les données afin de reprendre le calcul plus tard à partir du point d'arrêt.
On acquittait une exception par REVERT et on la transmettait au niveau supérieur (puisqu'il y avait presque toujours une chaîne d'interruptions en cascade) au moyen de RESIGNAL.