Cartographie
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Un marais délaissé pendant la période médiévale
Bien avant la formation des marécages suite au retrait progressif de l’océan au début du Moyen Age, la Petite Flandre était un golfe marin faisant partie de l’ancien golfe de Saintonge ou golfe des Santons dont elle occupait la partie septentrionale et se distinguait par la présence d’une vingtaine d’îles. C’est à partir des îles que débute la conquête des vastes marais par une poldérisation rationnelle qui ne fut cependant entreprise qu’à partir du XVIIe siècle par des ingénieurs hollandais, époque à partir de laquelle ce marais reçoit son nom.
Bien que les anciennes paroisses de Muron (formés par les « alleux » de Muron et de l’île d’Albe), de Tonnay-Charente et de Genouillé relevaient toutes de la puissante abbaye bénédictine de Saint-Jean-d'Angély, cette ancienne partie marécageuse du littoral de l'Aunis ne fut pas l’objet d’un aménagement au Moyen Age. Plusieurs raisons expliquent ce manque d’intérêt par ce puissant ordre monastique dont, entre autres, la faible salinité des eaux de l’ancien golfe qui ne permettait pas de créer des salines et l’absence d’argile pour y fixer une industrie de la construction afin de favoriser l’habitat.
Cependant, vers la fin de la période médiévale, des travaux de mise en valeur de la Petite Flandre par le comblement de certaines parties du marais ont été entrepris et ont servi à fixer l’habitat. Des « villeneuves » ont donc été créées dont une au nord de Tonnay-Charente, « qui crée le marais des Groies délimité actuellement par le canal de Genouillé », une autre près de Rochefort (Villeneuve-Montigny) et une autre Villeneuve entre Ardillières et Landrais. Cependant, la région était très loin d’être mise en valeur et une grande partie était délaissée faisant de ces marais une région inhospitalière et pratiquement inhabitée.
La création du Marais de la Petite Flandre au XVIIe siècle
Il faut attendre la fin du XVIe siècle pour que commence réellement l’aménagement de ces marais maritimes et fluviatiles, constamment inondés dès l'automne et devenus insalubres et pestilentiels surtout lors des saisons chaudes. C’est alors que le Hollandais Humphrey Bradley, à la demande du roi Henri IV, est appelé à entreprendre le dessèchement du marais de Saint-Louis, situé au nord de Tonnay-Charente et dépendant alors entièrement de cette paroisse.
A cet égard, Humphrey Bradley reçoit le titre honorifique de « Grand maître des digues du Royaume ». Il constitue alors des sociétés avec ses associés, fait venir des ingénieurs de son pays et encourage les gros propriétaires à participer à ses projets de poldérisation des marais littoraux. Humphrey Bradley est incontestablement l’ingénieur principal de l’aménagement du littoral français du nord au sud ainsi que de la côte de la Méditerranée, ayant engagé « la plus vaste entreprise de ce genre que la France ait jamais connue ». Cependant sur la côte charentaise et précisément dans le Marais de la Petite Flandre, il ne put achever les travaux qu’il avait envisagé, seule la construction de la levée sur laquelle passait la route royale de Rochefort à Paris fut réalisée pendant son mandat.
Dans le même temps, au tout début du XVIIe siècle, plus précisément en 1607, une dame de Tonnay-Charente, Jeanne de Saulx-Tavannes, d’une famille d’aristocrates fonciers, les Mortemart, céda des terres à des Hollandais, les frères Coomans, et à un Flamand du Brabant. Ils eurent en charge tous les marais inondés de Saint-Louis et prirent le relais à Humphrey Bradley. Leur rôle dans la région fut considérable et c’est à eux que revient la dénomination de « Petite Flandre » après qu’ils aient fait venir une vingtaine de familles flamandes en 1613 pour réaliser les travaux de dessèchement et après avoir créé la « Société des Marais de la Petite Flandre ». Les Hollandais qui étaient déjà passés maîtres dans les techniques des polders commencèrent à creuser en tout premier lieu le Canal de Saint-Louis, ce dernier fut le principal collecteur auquel furent greffés progressivement d’autres canaux de dessèchement (de Loire, de la Daurade, de Genouillé). Devant le succès de cet aménagement, d’autres sociétés de dessèchement des marais furent créées, notamment vers l’est et l’ouest. A l’est et au nord de Rochefort, le marais de Loire-les-Marais fut le second marécage à être assaini après celui de la Petite Flandre. Les travaux furent entrepris en 1718 sur le modèle de celui des Hollandais et les propriétaires fondèrent le « Syndicat des Marais de Loire » qui subsiste encore aujourd’hui. Ce marais fut converti en terre d’élevage équin grâce à l’arsenal de Rochefort qui favorisa l’élevage des chevaux dans le Marais de Rochefort par un édit royal de 1685 acquérant par la suite une solide réputation.
Les Comans exercèrent pendant tout le XVIIe siècle une très forte influence dans la région et un des leurs, Thomas de Comans, fils d’un des aménageurs de la Petite Flandre, réalisa une table funéraire pour l’église Saint-Etienne de Tonnay-Charente.
En 1634, la société dirigée par l’ingénieur aunisien Pierre Siette entreprit le drainage des marais situés au nord de Rochefort couvrant alors les anciennes paroisses de Loire-les-Marais, Breuil-Magné, Saint-Laurent-de-la-Prée ainsi que celles de Ciré et d’Ardillières. Cet ingénieur du roi entreprit également l’assèchement du marais de Tonnay-Charente situé à l’est de la paroisse en faisant réaliser notamment le canal de Genouillé.
1627 : création de la paroisse de Saint-Louis-de-la-Petite-Flandre
La mise en valeur de ces terres anciennement marécageuses et insalubres attira rapidement de nouvelles populations grâce « aux avantages de plus en plus grands, concédés aux sociétés de défrichement », au point que le roi Louis XIII fit construire une église et fonda une paroisse en la dissociant de celles de Muron et de Tonnay-Charente. Cette dernière prit le nom de Saint-Louis-de-la-Petite-Flandre en 1627 en hommage au roi auquel le nom du canal lui revient également.
Son existence fut bien éphémère puisqu’un décret royal en date du 7 mars 1827 la réunit de nouveau à Muron. Aujourd’hui, ce village a totalement disparu.