Un opérateur (A,D(A)) est dissipatif si . Dans le cas où X = H est hilbertien on montre que A est dissipatif si et seulement si .
Remarque: Si (A,D(A)) est un opérateur dissipatif alors l'opérateur (Id − λA) est injectif car
.
Si de plus est surjectif on dit que (A,D(A)) est maximal-dissipatif (ou m-dissipatif). On peut montrer que . En pratique pour montrer qu'un opérateur est m-dissipatif on montre d'abord à la main qu'il est dissipatif et on résout ensuite un problème variationnel pour une valeur λ0 bien choisie (par exemple avec le théorème de Lax-Milgram, voir exemple de l'équation de la chaleur traité plus bas).
Dans ce cas l'opérateur (Id − λA) est un isomorphisme (a priori non continu) de L(A,X) et on note Jλ = (Id − λA) − 1. De plus, comme
,
. Nous allons voir que cette propriété de continuité peut être améliorée (on va rendre moins fine la topologie sur (D(A), | | . | | X) en munissant D(A) d'une norme| | . | | D(A)).
Propriétés des opérateurs m-dissipatifs
Prop 1: si (A,D(A)) est m-dissipatif alors c'est un opérateur fermé.
Corollaire 1: pour
on pose | | x | | D(A) = | | x | | X + | | Ax | | X. Alors | | . | | D(A) est une norme pour laquelle D(A) est un espace de Banach et
.
Prop 2: si H est un espace Hilbertien et
est m-dissipatif alors il est à domaine dense.
Prop 3: réciproquement si
est de domaine dense, dissipatif, fermé et tel que son adjoint (A* ,D(A* )) est dissipatif alors (A,D(A)) est m-dissipatif.
Corollaire 3: toujours dans le cadre hilbertien
(i) si (A,D(A)) est dissipatif autoadjoint à domaine dense alors il est m-dissipatif
(ii) si (A,D(A)) est anti-adjoint à domaine dense alors il est m-dissipatif
Remarque: dans (ii) la condition de dissipativité n'est pas nécessaire car (A,D(A)) anti-adjoint entraîne que < Ax,x > H = 0 donc la dissipativité, voir l'exemple de l'équation des ondes plus bas.
Exemples
L'équation de la chaleur
On se donne Ω un ouvert borné de classe
de
et on cherche à résoudre l'équation de la chaleur
sur
pour une condition initiale donnée. On peut réécrire cette EDP sous la forme d'une EDO y'(t) = Ay(t) en posant X = H = L2(Ω),
et en définissant (A,D(A)) par
et
pour tout
. Nous sommes dans le bon cadre pour utiliser la théorie des semi-groupes et le théorème de Hille-Yosida; reste à montrer que l'opérateur A est m-dissipatif. Il est bien connu que le laplacien est un opérateur autoadjoint (on a par double intégration par parties) et que D(A) est dense dans L2(Ω), il suffit donc de montrer qu'il est dissipatif ou de façon équivalente que . Or tout
est de trace nulle, donc en intégrant par parties . Le corollaire 3 et le théorème de Hille-Yosida permettent enfin de conclure quant à l'existence-unicité et la régularité des solutions. Remarquer que : on retrouve bien sur le côté dissipatif et irréversible de l'équation de la chaleur.
L'équation des ondes
L'équation des ondes homogène se formule dans un domaine Ω suffisamment régulier (c'est-à-dire
en pratique) et sur un intervalle de temps [0,T) (avec T > 0) selon
On se place dans la théorie des semi-groupes en mettant l'équation précédente au premier ordre en temps. On pose alors
,
(avec v = u' ) et
l'équation devient alors
.
Le domaine du Laplacien étant
, celui de
est
sur
. Les conditions initiales seront alors prises dans H. Le produit scalaire dans H est défini pour tout couple (u,v) dans H (u = (u1,u2) et v = (v1,v2)) par
Reste à vérifier que nous sommes bien dans les conditions d'application du théorème de Hille-Yosida :
est dense dans H.
est fermé.
est dissipatif. Ce point mérite une preuve.
Preuve 1. On utilise la caractérisation (i') du théorème. Soient λ > 0 et
. L'équation résolvante s'écrit en (u,v)
d'où (λ2I − Δ)u = λf + g qui admet une unique solution dans
via Lax-Milgram (car d'une part λ2 > 0 et d'autre part les valeurs propres du Laplacien sont strictement négatives donc (λ2I − Δ) est un opérateur elliptique dont la forme bilinéaire associée vérifie les hypothèses du théorème de Lax-Milgram). Et alors v = λu − f est dans
.
L'estimation de l'opérateur résolvant Rλ vient du produit scalaire de ( * )2 par v en remplaçant u par sa valeur dans ( * )1:
D'où, puisque (u,v) = Rλ(f,g), on obtient l'estimation attendue
. Le semi-groupe engendré par
est donc un semi-groupe de contraction.
Preuve 2. On peut utiliser le Corollaire 3 pour montrer que
est m-dissipatif en montrant que
est anti-adjoint. On a alors pour tout couple (u,v) dans
Ainsi,
est anti-adjoint et à domaine dense donc m-dissipatif.