Jean Errard (c.1554 - 1610) était un mathématicien et architecte militaire lorrain, qui, converti au protestantisme, s’est engagé au service du roi de France Henri IV. Introducteur en France de la fortification italienne, il est ainsi un précurseur de Vauban.
Jean Errard est né à Bar-le-Duc vers 1554 dans une famille de notables. Il est certain qu'il a adhéré au protestantisme au plus tard en 1572, car il fréquente l’Eglise réformée française d'Heidelberg, (ce qui ne l'empêcha pas de servir par la suite le catholique Charles III de Lorraine). Il est inscrit à l'Université de la ville en 1573. Sans doute a-t-il trouvé refuge au Palatinat pour des motifs religieux, le protestantisme étant proscrit dans les duchés de Bar et de Lorraine.
Après de bonnes études de mathématique et de géométrie, il entra en 1580 au service de Charles III de Lorraine. Au début des années 1580, il vit en Lorraine et a épousé Barbe de Rains (ou Reims), fille d'un conseiller à la chambre des comptes du Barrois. Il dédicace son Premier livre des instruments mathématiques (Nancy, 1584) au duc de Lorraine Charles III qui en a financé la publication. Ainsi paraît le Premier livre des instruments mathématiques mécaniques… Néanmoins, préférant être fidèle à sa foi lors des guerres de la Ligue, il entre au service des princes de Sedan pour lesquels il défend la petite place forte de Jametz au cours d’un long siège (1588-1589). Assiégés par les troupes lorraines de Charles III à la fin de 1587, les Sedanais, après un conseil de guerre auquel assista l’ingénieur, signent la capitulation le 24 juillet 1589, et se réfugient à Sedan.
Par sa longue défense de Jametz, la réputation d'Errard parvint à Henri IV, nouvellement couronné, qui l'appela à son service. Il sert ensuite Henri IV, participant à différents sièges pour celui-ci (Amiens, 1597), dressant les plans de fortifications notamment en Picardie. . Il accompagne alors son souverain dans les différentes campagnes menées pour reconquérir son royaume, s'occupe des opérations de siège, construit des bastions et édifie de nouvelles fortifications. Il rédige aussi plusieurs ouvrages exposant ses réflexions géométriques et appliquant la géométrie aux fortifications. Il s’est largement appuyé sur les ingénieurs militaires italiens alors très en avance sur ceux des autres pays européens. En 1599, Henri IV, pour le remercier, le nomme ingénieur ordinaire de fortifications des provinces de Picardie et Île-de-France, et ainsi, il poursuit son œuvre à sa mort (19 ou le 20 juillet 1610) qui suit de peu celle du roi.
Jean Errard est le premier à appliquer en France le principe de la fortification bastionnée et à en exposer les principes. Ses travaux lui valent le qualificatif de "père de la fortification française". La géométrie conditionne sa pensée stratégique : Errard y explique tous les procédés qui permettent de tracer sur le terrain les différents polygones, réguliers ou irréguliers, indispensables pour bien fortifier une place. La règle majeure de son oeuvre théorique réside dans le fait que la défense d'une place doit reposer davantage sur l'infanterie que sur l'artillerie, dont le feu à son époque n'est pas efficace de face.
Son système se compose de bastions, pouvant accueillir deux cents fantassins, tirant de face, et larges d'environ 70 mètres. Ils sont flanqués de batteries d'artillerie, de 30 mètres de large - le principe des ouvrages avancés inspirera Vauban. Ses plans prévoient des chemins couverts pour défendre les glacis (notion de "défilement"), ainsi que des demi-lunes entre les bastions pour protéger les portes courtines (notion de "flanquement"). Le principal inconvénient de ce système défensif est de présenter des bastions dont le plan à angles trop aigus ne présentent pas toutes les garanties de sécurité pour les assiégés. Les principes théoriques d'Errard inspirent les travaux de l'ingénieur Jean Sarrazin, du Chevalier Deville (1595-1656), qui affine la notion de flanquement et divise le chemin couvert, et Blaise Pagan (1607-1667), inspirateur de Vauban, promoteur de la demi-lune (évolution de la barbacane), pour qui le bastion résulte du tracé sinueux brisé de l'enceinte.
Laon, Calais, Beauvais, Amiens, Abbeville, Bayonne, Antibes, Saint-Tropez, Doulens, Montreuil-sur-Mer
Errard a fait également plusieurs traductions dont les Éléments d'Euclide.