Abbaye Notre-Dame de Châtillon | ||
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Latitude Longitude | ||
Pays | France | |
Région | Bourgogne | |
Département | Côte-d'Or | |
Ville | Châtillon-sur-Seine | |
Culte | Catholique romain | |
Type | Abbaye | |
Rattaché à | Evêché de Langres | |
Début de la construction | XIIe siècle | |
Fin des travaux | XVIIIe siècle | |
Protection | Monument historique (partiellement) | |
Localisation | ||
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L'ancienne abbaye Notre-Dame de Châtillon (Sancta Maria de Castellione) était une abbaye située à Châtillon-sur-Seine, au nord de la Bourgogne, et dans l'actuel département de la Côte-d'Or. Cette abbaye de chanoines réguliers augustins aurait été fondée vers l'an 1130. Elle était alors affiliée à la congrégation d'Arrouaise. Elle devint affiliée à la Congrégation de Sainte-Geneviève en 1635. Cette abbaye a survécu jusqu'en 1793, il n'en reste plus aujourd'hui que les bâtiments conventuels et l'abbatiale (église de l'abbaye).
L’abbaye Notre-Dame de Châtillon, dite Sancta Maria de Castellione, a pour origine l’ancien chapitre collégial de la forteresse épiscopale de Châtillon. Grâce à l'évêque de Langres Brunon de Roucy, les prêtres du chapitre devinrent des chanoines (qui participèrent en autres à l'éducation du célèbre Saint Bernard de Clairvaux), sous l'appellation de chanoines de Notre-Dame du Château, sans doute à la fin du Xe siècle. Ils décidèrent de se régulariser vers 1130, sous l'impulsion de Saint-Bernard et de l'évêque de Langres Guillenc, et devinrent dès lors des chanoines réguliers, suivant la règle d'Arrouaise, du nom d'une abbaye d'Artois fondée en 1090, chef d'ordre de 28 maisons. L'affiliation de Notre-Dame à cette riche congrégation date officiellement de 1142. La règle d’Arrouaise a pour particularité de durcir la règle augustinienne : en plus des vœux de silence, pauvreté et chasteté, les moines doivent totalement s’abstenir de manger de la viande, et ils doivent participer aux travaux manuels, ce qui tend à les rapprocher des Cisterciens.
Les chanoines réguliers, alors installés au sein de l'église Saint-Vorles, quittent celle-ci au milieu du XIIe siècle. Ils s'installent au nord-est de la ville dans une plaine bordée par la Seine : le faubourg de Courcelles-Prévoires. La nouvelle abbaye est bâtie grâce à de nombreux dons : parmi les bienfaiteurs se trouvent trois évêques de Langres, deux ducs de Bourgogne et un comte de Champagne. L'abbaye reçoit en outre plusieurs cures des villages environnants, ainsi que celle de l'église Saint-Vorles (l'abbé devient en effet le curé primitif de cette église). D'après quelques rares témoignages, les bâtiments de l'époque médiévale étaient d’une très belle et exquise structure, d'après une description faite avant les destructions du XVIe siècle.
L'abbaye connaît un véritable essor à cette époque. C'est un lieu qui fourmille de vie, de nombreuses personnes sont présentes, qu'ils soient religieux (les chanoines, ainsi que le personnel religieux) ou laïques. La ferveur spirituelle est aussi très vivante. L'abbaye noue des contacts avec des abbayes voisines comme celles de Fontenay, du Val des Choues, ou encore de Molesme.
La règle d'Arrouaise, encore bien suivie auparavant commence à montrer des signes d'affaiblissement dès la moitié du XIIIe siècle. Par exemple, la consommation de viande devient autorisée dès 1257, décision confirmée par le Pape Alexandre IV. D'autre part, les chanoines, qui devaient s'occuper des églises inféodées à l'abbaye, ont de plus en plus tendance à nommer des vicaires pour s'acquitter de ces tâches à leur place. Le voeu de pauvreté n'est guère plus respecté, les chanoines commencent en effet à accumuler des biens et à en faire profiter leurs familles. Un premier partage des biens (entre l'abbé, les chanoines et les titulaires d'offices claustraux), qui a lieu vers 1330, s'inscrit dans cette tendance. L'abbaye, jouant de son statut d'affiliée à la congrégation d'Arrouaise, échappe aux contrôles de l'évêché de Langres, ce qui accentue le relâchement. Placée sous la garde du duc de Bourgogne, l'abbaye devait aider celui-ci financièrement, mais ces engagements ne seront guère respectés. On peut aussi y ajouter le "recrutement" de frères convers issus de familles nobles, plus intéressés par le matériel que par le spirituel. Quelques conflits émaillent cette période, notamment avec le duc de Bourgogne en 1459 concernant la nomination du nouvel abbé.
Le régime de la commende est mis en place en 1494, date à laquelle François de Dinteville est nommé abbé de Notre-Dame, sans doute grâce au pape Alexandre VI. Auparavant, les abbés de Notre-Dame étaient élus par leurs pairs. Ils sont désormais nommés, la plupart du temps par le roi de France. On peut y voir là une certaine forme de clientélisme, un moyen par lequel les puissants récompensaient leurs serviteurs. Bien souvent, ces serviteurs acceptent cette charge par pure motivation financière. La vie spirituelle de l'abbaye entre donc en décadence. Le conflit opposant Charles le Téméraire à Louis XI touche directement Châtillon, puisqu'en 1475, la ville est envahie par les troupes royales, et l'abbaye ruinée. Vinrent ensuite les guerres de Religion : le pouvoir royal avait besoin d'argent pour combattre le protestantisme, aussi fallut-il lever de nombreuses taxes. L'abbaye dut vendre de nombreux domaines afin de pouvoir payer. Les abbés suivant ne firent pas grand chose pour relever l'abbaye de ses ruines. Gui de Montrigaud, surnommé le fléau des chanoines (flagellum religiosorum) en est un parfait exemple. Les plus importantes destructions eurent lieu à la fin du XVIe siècle, grâce au baron Gellan de Thénissey, nommé par Charles de Mayenne (chef de la Ligue et ennemi d'Henri IV) pour défendre la ville des troupes du roi : la ville de Châtillon en sortit très endommagée, tout comme l'abbaye, dont la plupart des bâtiments d'origine disparurent. L'église abbatiale put cependant être sauvée de la ruine. Pendant ce temps, les religieux s'étaient réfugiés aux alentours de Châtillon. Le calme revint en 1601, date à laquelle Henri IV confia la charge d'abbé à une femme, la comtesse Diane d'Andoins (qui était aussi l'une de ses maîtresses), qui n'exerça bien évidemment pas la charge et la délégua à un abbé fiduciaire qu'elle avait nommé. Mais le Pape ne voyait pas d'un bon oeil que le roi de France donnât cette charge à une femme. Le roi décida donc de la confier au fils d'une famille châtillonnaise, les Legrand. Quatre abbés de cette famille se succèdent durant le XVIIe siècle : la charge d'abbé tend à devenir un bénéfice familial.
Le XVIIe siècle est une période de réforme pour le catholicisme. Des réformes furent tentées à Notre-Dame, mais elles n'eurent pas beaucoup d'effets. L'évêque de Langres imposa aux chanoines un régime de réforme en 1585, mais il ne fut pas respecté. Claude Esprit, simple infirmier de l'abbaye, ne supportait pas de voir l'abbaye dans cet état, aussi alla-t-il voir le roi à Troyes en 1630 pour forcer les chanoines à respecter la volonté de l'évêque et le régime de réforme de 1585. De retour à Châtillon, il fut pris à parti par les chanoines, et jeté en prison. Il s'évade en 1634 et se réfugie à Paris, à l'abbaye Sainte-Geneviève du Mont (située à la place de l'actuel Panthéon), siège de la Congrégation de France (dite des Génovéfains). Avec l'appui du roi, il parvient à imposer l'affiliation de Notre-Dame de Châtillon à cette règle, officiellement adoptée en 1635 par l'envoi de chanoines génovéfains à Châtillon.
On a pu observer une certaine forme de renouveau au sein de l’abbaye entre la moitié du XVIIe siècle et le XVIIIe siècle, renouveau intellectuel, mais aussi retour au calme et à la règle, qui sont les principes fondateurs de toute communauté monastique. Le chanoine François Hocmelle (1692-1730) symbolise bien ce renouveau, puisqu'il classa les archives de l'abbaye et rédigea les annales de l'abbaye sous la forme d'un cartulaire. Cela n'empêche pas les querelles de survenir, en particulier avec François le Métel de Boisrobert, favori de Richelieu, nommé abbé en 1639, et qui aurait même détourné l'argent de l'abbaye à son profit, et qui fut l'objet de nombreux procès. Henri Lenet, qui est abbé de 1662 à 1710 est sans doute l'abbé le plus connu. Il a contribué à réaménager l'abbaye, ses jardins et il continua les travaux entrepris par Claude Esprit. Il reste connu de nos jours pour avoir aménagé une esplanade bordée d'arbres, située en face de l'abbaye, existant toujours de nos jours sous le nom de Cours l'abbé. D'ailleurs à sa mort, il légua toute sa fortune à l'abbaye, aux chanoines, ainsi qu'à divers établissements religieux. Le dernier abbé fut Louis Le Bascle d'Argenteuil, abbé de Vézelay, nommé en 1756.
A la fin du XVIIIe siècle, il ne restait plus que dix chanoines, qui furent très vite dispersés par la tourmente révolutionnaire. Le 2 novembre 1789, les biens de l'Eglise deviennent des biens nationaux, grâce à un décret de l'Assemblée constituante. Le 18 mai 1790 est dressé un inventaire des biens de l'abbaye, très complet, qui montre l'étendue des possessions de l'abbaye. Suite à un arrêté du Directoire de Châtillon-sur-Seine datant du 12 mars 1791, la vente des biens de l’abbaye a lieu les 27 et 28 juin 1791. Cette vente, qui touche tous les objets (195), même les plus anodins, appartenant à l'abbaye, rapporte au total 7649 livres et 15 sols. Les domaines de l'abbaye sont quant à eux séparément vendus aux enchères, pour des sommes très élevées. Les sommes récoltées partent remplir les caisses de la Nation.
Il ne reste que peu de vestiges de l'ancienne abbaye :