La majeure partie de l’histoire chinoise fut placée sous l’autorité centrale des dynasties féodales. L’organisation de la ville entrait dans les fonctions du gouvernement, et rares étaient les villes où les plans de développement urbain n’existaient pas. Par conséquent, l’agencement de la ville reposait essentiellement sur le code confucéen qui sous-tendait le système féodal.
En 1267, Hu Bilie, le premier empereur de la dynastie Yuan commença à construire sa capitale de Dadu sur le site de l’actuelle Beijing. Il lui fallut douze ans. La ville se trouvait sur un espace carré et couvrait une superficie d’environ 50km². Une haute muraille entourait toute la ville, avec trois portes à l’est, à l’ouest et au sud, des remparts, et deux entrées au nord de la ville. Des vestiges archéologiques attestent que les voies principales, qui formaient un axe nord-sud et est-ouest à travers la ville, mesuraient 28 mètres de large. Les rues secondaires faisaient 14 mètres et les ruelles 7. L’ordonnancement de la ville était extrêmement rigoureux, avec des rues et des quartiers nettement démarqués. Dadu a été conçue à grande échelle. Beijing, la capitale des dynasties Ming et Qing qui suivirent, fut construite sur les fondations de la capitale des Yuan. La ville de Dadu fut construite au XIIIe siècle selon les principes du grand classique de Confucius, Zhou Li, Kaogong Ji, Le rite des Zhou, les compétences techniques. Cet ouvrage, écrit il y a 1800 ans énonce : « Pour concevoir une capitale, il faudra qu’elle repose sur un terrain carré mesurant neuf li de côté (environ 4,5 kilomètres), avec trois portes de chaque côté de ses remparts. Il devra y avoir neuf rues et neufs avenues, suffisamment larges pour que neuf charrettes de chevaux côte à côte puissent y passer. Le palais se situera au cœur de la ville, avec le temple ancestral sur la gauche, le temple des dieux sur la droite, les bureaux à l’avant, et la place du marché à l’arrière ».
Le Temple de Confucius à Qufu offre une exception apparente au code de construction confucéen. N’importe quelle personne familière de la culture traditionnelle chinoise reconnaîtra ces colonnes de dragons sculptés, symboles de l’empereur. Or ces dix colonnes de dragon sont localisées dans le Temple de Confucius à Qufu et non pas dans l’un des plais impériaux. N’est-ce pas là une violation du code confucéen ? En fait, pas vraiment, dans la mesure où ces colonnes de dragons furent érigées en l’hommage de Confucius et l’idéologie confucéenne.
L’idéologie confucéenne et son code de conduite s’avérèrent être des moyens très efficaces pour maintenir l’ordre et la stabilité de la société féodale chinoise. En tant que système approuvé par l’état qui combinait la politique, la philosophie, et la morale, le Confucianisme atteignit progressivement le statut de religion et son fondateur, Confucius, fut vénéré comme une divinité. Le culte du peuple chinois voué à Confucius conduisit peu à peu à sa déification. Parmi ses nombreux titres figurent le « Seigneur par qui rayonne la Culture », « le Grand Talentueux », « Le Sage Parfait » et le « Premier Maître », le «Sage ». Ses descendants directs furent gratifiés de titres héréditaires de noblesse par divers empereurs tout au long de l’histoire de Chine. En 1055, sa 46ème génération de descendant fut honorée du titre de Duc Yansheng, ce qui signifie, « Abondance de sainteté ». Tout ce temps, la Résidence de la Famille de Confucius devint la plus grande résidence officielle de Chine après celle de l’empereur. Les descendants de Confucius conservèrent cette position durant les 880 années suivantes, avec 36 générations servant au plus haut rang officiel du public de la hiérarchie impériale. La famille de Confucius est la seule de l’histoire de Chine à ne pas avoir perdu ses titres de noblesse alors que les dynasties connaissaient des apogées et des déclins, ce qui est beaucoup plus éloquent que ce qui pourrait être dit de nombreuses familles royales qui ont traversé les siècles.
En 476 av. J.-C., deux ans après la mort de Confucius, sa résidence fut transformée en temple suite à un décret officiel. Les empereurs des dynasties suivantes dépêchèrent souvent des fonctionnaires pour offrir des sacrifices à ce temple, et beaucoup d’empereurs le visitèrent en personne. Ainsi, les colonnes de dragon du Temple de Confucius ne représentent pas une violation du code hiérarchique accentué par l’idéologie confucéenne. Au contraire, ils honorent la personne de Confucius.