La définition précédente est un exemple de propriété universelle : elle affirme qu'il existe un morphisme βf unique rendant le diagramme suivant commutatif
Comme c'est le plus souvent le cas pour les propriétés universelles, cette propriété et le fait que βX soit compact caractérisent βX à un homéomorphisme près.
Certains auteurs demandent de plus que X soit un espace de Tychonov, ou même un espace localement compact, pour les raisons suivantes :
L'application allant de X vers son image dans βX est un homéomorphisme si et seulement si X est un espace de Tychonov.
Cette application est un homéomorphisme vers un sous-espace ouvert de βX si et seulement si X est un espace localement compact.
La construction de Stone–Čech peut être effectuée pour des espaces X quelconques, mais l'application X → βX n'est alors pas un homéomorphisme, et peut même ne pas être injective.
La propriété d'extension des applications fait de β un foncteur allant de Top (la catégorie des espaces topologiques) vers CHaus (la catégorie des espaces compacts). Si nous notons U le foncteur d'inclusion (qui est un foncteur d'oubli) de CHaus vers Top, les applications de βX vers K (pour K dans CHaus) correspondent bijectivement aux applications de X vers UK (en considérant leur restriction à X et en utilisant la propiété universelle de βX). Autrement dit, Hom(βX,K) = Hom(X,UK), ce qui veut dire que β est adjoint à gauche de U. Ceci entraîne que CHaus est une sous-catégorie réflexive de Top, avec β comme réflecteur.
Le cas des entiers naturels
La compactification de Stone–Čech des entiers naturels
Dans le cas où X est localement compact, par exemple
(pour la topologie discrète) ou
, c'est un sous-espace ouvert de βX et d'ailleurs de toute compactification (cette condition est également nécessaire, car tout ouvert d'un compact est localement compact). Dans ce cas, on s'intéresse souvent à l'espace complémentaire
. Cet ensemble est un fermé de βX, et donc un compact. Pour
muni de la topologie discrète, on note
(mais cette notation n'est pas utilisée dans le cas d'un X général).
On peut voir
comme l'ensemble des ultrafiltres sur
, muni de la topologie engendrée par les ensembles de la forme
pour
.
correspond à l'ensemble des ultrafiltres triviaux, et
à l'ensemble des ultrafiltres libres ; cette construction a été décrite (et généralisée à des espaces de Tychonov quelconques) .
L'étude de βN, en particulier de
, est un domaine important de la topologie générale moderne. Les résultats principaux motivant cette étude sont les théorèmes de Parovicenko, qui, pour l'essentiel, caractérisent
, si l'on admet l'hypothèse du continu ; il s'agit des théorèmes suivants :
Tout compact admettant une base formée d'au plus
ouverts (voir aleph) est image de
par une fonction continue (ce résultat n'utilise pas l'hypothèse du continu, mais est moins intéressant en son absence).
En admettant l'hypothèse du continu,
est (à isomorphisme près) le seul espace de Parovicenko.
Ces résultats furent d'abord démontrés en considérant des algèbres de Boole et en utilisant la dualité de Stone.
Application : l'espace dual de l'espace des suites réelles bornées
Le compactifié βN peut être utilisé pour caractériser
(l'espace de Banach formé des suites bornées à valeurs réelles ou complexes, muni de la normesup), ainsi que son espace dual .
Étant donné une suite bornée
, il existe une boule fermée B (du corps des scalaires R ou C) qui contient l'image de a ; a est donc une application de
vers B. Comme
est discret et que B est compact, a est continue. Il existe donc (d'après la propriété universelle) une extension unique
, qui ne dépend pas du choix de B.
Cette extension est donc une application de l'espace des suites (de scalaires) bornées vers l'espace des fonctions continues allant de
vers les scalaires,
.
Cette application est bijective, puisque toute application de
est bornée, et peut donc être restreinte à une suite bornée. De plus, si nous munissons les deux espaces de la norme sup, cette application est une isométrie ; en effet, en prenant dans la construction précédente la plus petite boule B possible, on voit que la norme de la suite étendue ne peut grandir (alors que l'image de la fonction peut contenir des scalaires non dans la suite).
Ainsi,
peut être identifié avec
. Ceci nous permet d'utiliser le théorème de représentation de Riesz, qui montre que
peut être identifié à l'espace des mesures de Borel finies sur
.
Enfin, il faut remarquer que cette technique se généralise à l'espace
d'un espace mesurable arbitraire X. Cependant, au lieu de simplement considérer l'espace βX des ultrafiltres surX, la construction appropriée utilise l'espace de Stone Y sur l'algèbre de mesure de X : les espaces C(Y) et
sont isomorphes en tant que C*-algèbres tant que X vérifie la condition (toujours satisfaite en pratique) que tout ensemble de mesure positive contienne un sous-ensemble de mesure positive finie.
L'addition dans le compactifié de Stone–Čech des entiers
Les entiers (positifs) forment un monoïde pour l'addition. Il se trouve que cette opération peut être prolongée (mais non de manière unique) à
, transformant cet espace également en monoïde, quoique, de manière assez surprenante, en un monoïde non commutatif.
Pour tout sous-ensemble
et tout
, posons
Étant donnés deux ultrafiltres F et G sur
, on définit leur somme par
cet ensemble est encore un ultrafiltre, et l'opération + est associative (mais non commutative) sur
et prolonge l'addition de
; 0 (ou plus exactement l'ultrafiltre trivial contenant{0}) étant élément neutre pour + sur
. Cette addition est également continue à droite, au sens où pour tout ultrafiltre F, l'application de
vers
définie par
est continue.