En 1833, la loi Guizot oblige chaque commune à ouvrir une école primaire. La même année, Marie-Denys Cochin publie Le Manuel des salles d’asiles. Ce manuel donne des conseils sur le fonctionnement de ces établissements, des modèles d’emploi du temps, etc. Ce projet d’ouverture des salles d’asiles est destiné aux enfants de deux à six ans issus des milieux pauvres. Les salles ont à la fois pour but l’éducation des enfants et de libérer les femmes de la contrainte de garder leurs enfants. Ce projet est adopté sur le plan national. Cette institution sera à l’origine de l’école maternelle. Mais en 1833, les salles d’asile sont encore une invention récente et peu de villes en possèdent (9 à Paris et Strasbourg, 4 à Lyon, 1 à Chartres). La véritable naissance des salles d’asile remonte en France en 1826. C’est une initiative féminine encore une fois qui aboutit à la création d’un établissement pouvant recevoir quatre-vingts enfants.
En Sarthe, les municipalités multiplient les loteries, fêtes de charité afin de financer leur installation. À la Flèche, un projet d’ouverture est confié à la mère de Marie en 1834. La salle sera fondée le 27 février 1834. Dans cette commune, l’installation semble très rudimentaire : il s’agit plus d’un lieu où l’on garde les enfants loin des intempéries et des mauvaises rencontres qu’un lieu d’éducation. Les activités proposées sont de courte durée afin de ne pas ennuyer et dégoûter les enfants : prière, instruction, travail manuel et récréation. Marie Pape-Carpantier participe à l’encadrement des enfants, tout en se formant à la Flèche puis au Mans. Elle commencera comme simple surveillante et le 20 décembre, Marie Pape-Carpantier est nommée à la direction de la salle d’asile. Elle n’a que dix-neuf ans et est responsable d’une centaine d’enfants. Elle recevra les précieux conseils de M. Pape ou de M de Neufbourg. Marie Pape-Carpantier, directrice, doit être présente de sept heures du matin en hiver et neuf heures en été jusqu’à huit heures du soir et elle doit d’enseigner les premiers principes : instruction religieuse, notions élémentaires de la lecture, de l’écriture, du calcul auxquelles s’ajoutent les chants, la couture et l’ouvrage manuel.
En 1839, Marie tombe malade. Elle est épuisée par tout ce travail et par les responsabilités auxquelles elle doit faire face. Les familles la regrettent ainsi que l’inspecteur de l’instruction publique qui déclarera : « on ne peut espérer retrouver plus facilement dans une directrice le rare mérite qui distinguait mademoiselle Carpantier ». Elle devient demoiselle de compagnie auprès de Madame Pion-Noirie avec qui elle se lie d’amitié mais Marie reprendra très vite ses activités passées.
Le 4 juillet 1842, on lui confie la direction de la principale salle d’asile du Mans. Mais Marie n’aime pas la façon dont ces salles sont dirigées et n’apprécie pas la « méthode » prônée par Le Manuel des salles d’asiles, qui à l’époque devait être suivi de manière très rigoureuse. Selon elle, « la méthode c’est la lettre morte. Il faut que l’instituteur apporte la couleur, le mouvement, l’à propos, l’avis ». Elle insiste sur l’importance de la « leçon de choses », qu’elle conçoit comme une approche de la connaissance avant tout sensible, faite de sensations et d’intuitions plus que de principes, permettant aux jeunes enfants d’ouvrir leur intelligence et de s’approprier le monde à travers le corps et son langage. Marie Pape-Carpantier restera au Mans pendant cinq ans soit jusqu’en 1847 où elle quittera la Mans pour Paris, accompagnée de sa mère, pour l’école normale des salles d’asile. La salle d’asile s’avère être la base naturelle de l’école primaire en ce que dans cette première structure pédagogique, l’esprit et le cœur des enfants sont développés.
Dès 1845, Marie Pape-Carpantier propose de changer la salle d’asile en « école maternelle ». En 1846, elle publie Conseils sur la direction des salles d’asile (remarqué par le ministre de l’instruction publique, l’académicien Narcisse-Achille de Salvandy). Puis elle présente son projet à son successeur, Lazare Hippolyte Carnot, (père du futur président de la république Sadi Carnot). La haute commission des études s’occupe de la réforme des salles d’asile. En effet leur nom rappelle trop la misère et l’aumône. Il sera remplacé par celui d’école maternelle. L’arrêté est signé le 28 avril 1848 par Carnot. Elle est nommée directrice de la « maison d’études » destinés aux futurs enseignants et directrices. L’objectif, semblable à celui des salles d’asile, est de répondre aux curiosités de l’enfant, d’attirer son attention sur le monde. Le but premier n’est donc pas d’en faire des petits savants puisque l’on ne pratique que l’initiation : lecture, écriture… L’enfant a besoin de s’amuser et ce lieu répond parfaitement à cela. Marie Pape-Carpentier sera directrice de l'école normale maternelle à Paris, pendant 27 ans.
Le terme d’école maternelle retombe dans l’oubli jusqu'à ce que Jules Ferry alors ministre de l’Instruction publique, et son chef de cabinet, Ferdinand Buisson, influencés par Pauline Kergomard ne l’impose à nouveau en 1881 dans les lois de Jules Ferry.
Sous le Second Empire, elle est inspectrice des salles d’asile, placées sous la protection de l’impératrice Eugénie. En 1861, Marie Pape-Carpantier dirige le cours pratique et forme donc les enseignantes, qui, d’après les derniers textes, devront peu enseigner. Par la suite, elle se consacre à l’éducation des filles. Mais le sujet s'avère d’une grande complexité. Par le biais de ses livres Madame Pape-Carpantier fait un plaidoyer, afin que ceux qui ont le pouvoir se soucient de l’instruction des femmes pour enfin leur faire la place dont elles sont dignes. Elle est alors considérée comme une féministe notamment à cause de la rédaction de sept articles sur la question des femmes, « une question de justice et de bien être, intéressant la société et l’humanité ». Il faut que les femmes trouvent leur place auprès des hommes et qu’elles accèdent enfin à l’éducation.
Ses travaux sur les salles d'asiles sont récompensés à Londres lors de la troisième Exposition universelle de 1862.
Sa réputation atteint son apogée le jour où elle s’exprime dans l’enceinte de la Sorbonne en 1867. Elle doit présenter la méthode des salles d’asile et prononce cinq conférences du 21 août au 19 septembre. Marie sait de quoi elle parle et si le ministre lui a confié le soin de parler des jeunes enfants c’est parce que « une femme, une mère, une doyenne des salles d’asile, trouverait auprès des instituteurs le crédit que donnent la pratique et l’expérience ». Ainsi est reconnu par le ministre Victor Duruy, la valeur de la directrice du Cours pratique.
Les réformes pédagogiques voient leur diffusion facilitée grâce aux conférences que Marie Pape-Carpantier prononce.
Sous la présidence de Mac-Mahon en 1874, sous le ministère Cumont, Marie est dépossédé de sa fonction d'enseignante aux cours pratiques mais réhabilitée quelques mois plus tard. Elle meurt épuisée et affaiblie le 31 Juillet 1878 à neuf heures du matin dans sa maison de Villiers-le-Bel.
Dans ses dernières volontés, elle lègue ses livres aux écoles. Il est très difficile aujourd’hui de retrouver ses écrits.
Beaucoup d’écoles maternelles portent son nom ainsi qu'une rue de Paris, dans le 6e arrondissement.