Mouvements de malades - Définition

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Une production des connaissances en débats

L'activisme thérapeutique

Le vocable d' « activisme thérapeutique » s'impose pour désigner la volonté de débattre et d'influer sur le mode de production des connaissances sur la maladie. Celui-ci peut être défini comme recouvrant la zone d'intersection et de friction entre les savoirs des malades et les cadres collectifs, publiques, qui les structurent. Dit autrement et plus précisément, les savoirs des malades se disent, au double sens du génitif :

  • en tant que la conception du malade est elle-même intriquée dans une conception de la place de l'homme dans la société et dans l'environnement, puisque le malade n'est pas dans une situation expérimentale pure mais dans un milieu mental, social et environnemental dont l'activisme thérapeutique fait signe des problèmes à traîter ;
  • en tant que la conception des savoirs est elle-même intriquée dans une conception de la place de l'existant (et non pas simplement du vivant) dans le champ médical, sauf à verser dans une politique de la vie pure, du déni de prise en compte de ce qui nourrit et contraint de tels savoirs, – qui est ce sur quoi l'activisme thérapeutique a à se positionner, en tant qu'il n’est pas porteur d’un modèle de solution, mais vecteur de production de problèmes pratiques discutables au sens concret où il s’agit de faire vivre un problème, de donner à ses dimensions multiples les moyens de se déployer et d’intéresser, de rendre discutables les choix conflictuels qui leur correspondent.

Expertises profanes

La création en 1992 du TRT-5, groupe interassociatif français de malades du sida, porte ainsi la marque de la volonté d'intégrer une expertise « profane » dans le procès d'organisation de la lutte contre la maladie, s'agissant des médicaments du sida, dans la visée d'une modification institutionnelle de la tradition clinique. Le fait traduit alors la reconnaissance de l'irréductibilité des formes de connaissance, comme obstacles de fond à l'alignement des pratiques sur des protocoles conçus de « l'extérieur », celle du rôle des négociations entre les différents acteurs pour mener à bien les « essais thérapeutiques », et ce dès leur conception, et la nécessité d'intégrer rapidement dans le cours du fonctionnement les éléments qui émergent dans l'environnement de l'organisation.

La représentation des minorités

Cette aspiration à plus de démocratie, comme on peut le voir dans d'autres luttes pour la reconnaissance, d'autres revendications de minorités, s'applique ainsi à la question de la représentation, lancinante pour les groupes d'autosupports travaillant collectivement, de manière réflexive, entre soi, l'expérience individuelle de la maladie, et se constituant en représentants des malades auprès d'autres instances (médecins, État, laboratoires pharmaceutiques) : comment ma voix individuelle peut-elle devenir commune, représentative, et comment puis-je par moment la céder, et laisser d'autres parler en mon nom ?

« le fait que différentes sortes de hiérarchies sociales s'entrecroisent et interfèrent avec la politique de l'expertise ne fait que compliquer encore l'histoire et lui ajouter un caractère poignant. Ces considérations montrent les véritables dimensions du problème : il est peu probable que les modalités de la construction du savoir scientifique puissent être substanciellement modifiées, sauf si les efforts faits en ce sens s'inscrivent dans un contexte de luttes sociales qui remettent en cause d'autres systèmes de domination bien établis. »

— Steven Epstein, La grande révolte des malades, Les Empêcheurs de penser en rond, Paris, 2001, p. 256

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