L'accueil des enfants dans les écoles des minorités
Après le départ en exil du 14e dalaï-lama Tenzin Gyatso, en mars 1959, le gouvernement tibétain est officiellement dissous par les autorités chinoises le 28 mars 1959. Les Tibétains forment un gouvernement provisoire clandestin le 9 avril suivant. Claude B. Levenson indique qu'une des premières proclamations de ce gouvernement provisoire accuse les autorités chinoises :
- « d'avoir enlevé des milliers d'enfants et d'adolescents tibétains conduits en Chine en vue de les endoctriner afin d'en faire des valets dociles de sa politique de colonisation ».
Selon Laurent Deshayes, après avoir sollicité les familles afin d'envoyer leurs enfants étudier à Pékin, la RPC « impose l'envoi d'enfants à Pékin où ils recevront une éducation communiste ». Un texte mis en ligne par l'Université Laval située au Québec, indique deux raisons à ce déplacement d'enfants ; d'une part ils devaient recevoir une éducation politique et d'autre part être initiés à la culture Han.
- « des milliers d'enfants furent arrachés à leur famille pour recevoir en Chine une éducation marxiste-léniniste .»
- « Enfin, une autre forme de la politique d'immigration consistait à déporter de jeunes enfants issus des minorités nationales vers la région de Pékin en vue de les initier à la culture han. Cette dernière mesure fut inégalement appliquée parce qu'elle provoquait la révolte chez les minoritaires, notamment les Tibétains, qui ne semblaient pas comprendre les «bienfaits» de l'éducation han. »
- « À cette époque [le « Grand Bond en avant » (1958-1962)], les déclarations du gouvernement chinois portaient constamment sur la «supériorité des Han», la «mission civilisatrice des Han», le «devoir moral» pour les non-Han d'accéder au niveau des Han. Pour le gouvernement, les Han, perçus comme «plus avancés», constituaient «le guide des peuples». La tâche du Parti communiste et du gouvernement était donc d'«aider les peuples minoritaires à rattraper le peuple han dans la grande marche vers le socialisme». Pour leur part, les Han considéraient les groupes minoritaires comme des arriérés ou des barbares, voire des chiens, des requins ou des bons à rien qu'il faut tirer de leur infériorité »
Jean Dif qui a visité le Tibet, évoque « la déportation d'enfants tibétains dans la région de Pékin, en vue de les initier à la culture han ».
Les juristes de la commission internationale précisent dans leurs rapports de 1959 sur le Tibet :
- « Les nourrissons étaient tous retirés à leurs parents en présence d'un médecin chinois, puis remis à des nourrices. Pour se justifier quand ils enlevaient les enfants à leurs parents, les chinois racontaient ou bien qu'ils allaient les instruire, ou bien que ces enfants gênaient leurs parents.».
La tibétologue Françoise Pommaret indique que les enfants tibétains sont envoyés en Chine pour « y étudier et y être endoctrinés ». Certains reviendront en espérant accéder à des postes de responsabilité. En réalité ils seront en général expédiés dans des contrés reculées pour « gagner une expérience révolutionnaire », ils y resteront confinés jusqu'au début des années 1970.
Kalovski Itim dans son pamphlet « Le vrai visage du Dalai-Lama » indique que les étudiants tibétains de l'Institut des minorités nationales devaient être formés comme des dirigeants révolutionnaires et non comme simples administrateurs.