Au sens général du terme, une anticipation correspond à une phase où sont développées des idées qui n’apparaîtront effectives — sous la forme de techniques, de régimes politiques, etc. — que « plus tard », en général des années voire des dizaines d’années après l’intuition initiale.
En gestion des risques, la notion d'anticipation est importante. Lorsqu'on perçoit un danger, le plus souvent sous la forme de signaux faibles, on peut anticiper les risques. On a par exemple réussi à anticiper le danger lié à la non conformité des systèmes d'information au problème de l'an 2000.
Le changement climatique et la raréfaction des ressources naturelles constituent des dangers globaux. En particulier, la dépendance au pétrole de notre civilisation industrielle induit une menace vis-à-vis de notre modèle de développement. Tous les experts s'accordent aujourd'hui pour penser que la production mondiale de pétrole va atteindre dans les prochaines années un maximum, que l'on appelle pic pétrolier (peak oil en anglais), selon un modèle théorisé par Marion K. Hubbert (pic de Hubbert). Les avis des experts divergent sur la date de survenue de ce pic, qui dépend de l'estimation des réserves de pétrole et de la projection de la consommation mondiale.
Le département de l'énergie des États-Unis a publié en 2005 une étude sur le pic pétrolier, le rapport Hirsch. Il décrit trois scénarios possibles d'anticipation :
Dans le monde anglo-saxon, il existe des initiatives d'anticipation des risques constitués par le changement climatique et le pic pétrolier visant à accroître la résilience de l'économie : réorganiser l'agriculture (permaculture) et les villes (villes en transition).
Dans le même ordre d'idées, les initiatives en matière de développement durable constituent une anticipation de ces risques.
L'histoire des sciences a été marquée par plusieurs anticipations plus ou moins nettes. Bien que rares, certaines sont célèbres, notamment les vues héliocentrique d'Aristarque de Samos au IIIe siècle av. J.-C., soit dix-huit siècles avant Copernic. Toutefois, Thomas Kuhn et d’autres historiens des sciences ont mis en garde contre les anachronismes scientifiques. Si les anticipations en science sont ce qu’elles sont, des théories abandonnées, c’est qu’au moment où ces vues ont été développées, elles n’apportaient rien par rapport au modèle qui prévalait. Ainsi, dans le cas d’Aristarque, l’assise du géocentrisme était telle que ses idées révolutionnaires ne pouvaient susciter que de l’indifférence.
L’anticipation correspond à un genre littéraire et cinématographique lié à la science-fiction, regroupant des œuvres dont l’action se déroule dans un futur proche ou hypothétique. Le genre abonde dans les représentations liées à des sociétés humaines prophétisées par les auteurs comme autant d'utopies ou de dystopies pouvant libérer ou asservir l’Humanité. L’An 2440, rêve s’il en fut jamais de Louis-Sébastien Mercier, publié en 1771, illustre parfaitement cette tendance : il s’agit d’un roman d'anticipation, dans lequel l’auteur imagine comment sera le monde quelque six cents soixante-dix ans plus tard, dans un Paris libéré par une révolution paisible et heureuse de l’oppression et où règnent la raison, les lumières, la justice des Lumières. Néanmoins, « anticipation » n’est pas un synonyme de science-fiction. Plusieurs œuvres de science-fiction ne peuvent être classées dans la catégorie « anticipation ». Par exemple, E.T. l'extra-terrestre de Steven Spielberg est un film de science-fiction, car il met en scène un personnage d’extraterrestre, mais ce n’est pas un film d’anticipation, car rien n’indique que l’action se déroule dans le futur.