Histoire du saturnisme - Définition

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Pollutions parfois millénaires & séquelles durables

De nombreuses sources discrètes de plomb existent encore (ici équilibrateurs de roues de voitures perdu sur la chaussée)

Des pollutions d'origine préhistoriques et antiques ont des effets qui perdurent aujourd'hui :
Ainsi une étude récente a analysé des squelettes humains et animaux (os et/ou dents) âgés de 1500 à plus de 2000 ans dans un site archéologique qui est une ancienne et importante zone minière du Sud de la Jordanie.
Cette zone aujourd'hui désertique a fourni du cuivre et du plomb dès l'âge du bronze, puis aux époques nabatéenne, romaine et byzantine. Autour des ruines romaines de la ville de Phaino, on a retrouvé les restes de 250 anciennes mines de cuivre où de nombreux prisonniers romains ont été envoyés comme esclaves. On y trouve encore des « stériles » pollués par du plomb et du cuivre, mais aussi du chrome, du cadmium et du manganèse).
Les chercheurs ont voulu savoir si une pollution par les métaux lourds avait déjà eu un impact sur l'homme et l'animal aux époques préhistoriques, romaines et byzantines. L'étude a effectivement détecté les phénomènes de bioaccumulation apparus semble-t-il précocement, il y a plusieurs milliers d'années, ces mines ayant été ouvertes dès 7000 ans avant J.-C., avec des pics successifs de production de cuivre au début de l'âge du bronze, durant l'âge du fer et lors de la période romaine.
L'étude a confirmé que la dent (plus stable que l'os) était un excellent support pour rétrospectivement étudier les pollutions récentes ou antiques, à condition de respecter un protocole précis, car la dentine et l'émail dentaire accumulent moins le plomb que la racine de la dent qui elle même en accumule plus que la mâchoire, avec des différences importantes selon l'âge, et l'animal considéré (herbivore, omnivore, carnivore, mammifère, insecte..) ; Par exemple, les molaires animales contemporaine analysées à proximité du site contenaient en moyenne 48 mg de cuivre par Kg dans la racine, soit presque deux fois plus que dans l'os de la mâchoire (28 mg/kg) et bien plus que celles d'un animal comparable vivant dans une zone peu polluée (4 mg/kg). Par contre pour le plomb, elle en contenaient 126 mg par kg, ce qui est moins que dans l'os de la mâchoire des mêmes individus (avec des teneurs de 268 mg/kg de plomb pour les mâchoires de chèvre et 270 mg/kg pour la symphyse mentonière (partie de la mâchoire inférieure humaine située juste au-dessus du menton), au lieu de 18 mg/kg chez un animal comparable vivant en zone non polluée.
Les dents, comme l'os de la mâchoire bioaccumulent beaucoup plus de plomb que de cuivre. Inversement l'os crânien ou de la cage thoracique bioaccumule beaucoup plus de cuivre que de plomb (et plus sur la face externe du crâne que sur la face interne dans les deux cas, ce qui pourrait traduire une contamination externe via le cuir chevelu)
L'étude a aussi montré que les squelettes de l'époque du bronze présentent des contamination différentes de celles de la période byzantine.
Des traces d'arthrite des membres fréquentes sur les squelettes pourraient être attribuées à une intoxication par le plomb et le cuivre (qui peuvent agir en synergie et affecter la solidité de l'os, ou augmenter le risque de maladie de Parkinson).
Par ailleurs, l'étude a montré que les chèvres et moutons élevés par l'homme sur cette zone étaient et sont encore aujourd'hui atteint de saturnisme (Plusieurs campements d'éleveurs Bédouins sont encore établis dans cette région, avec chèvres et moutons). Des analyses ont montré en 2000 des taux de plomb et de cuivre dans Gymnarrhena micranthia (plante locale consommée par les chèvres et moutons) de respectivement 40 et 60 mg/kg. A noter que les moutons sont plus contaminés que les chèvres, peut-être par ce qu’ils bio-accumulent plus, ou parce qu’on laisse plus de liberté à ces dernières et qu’elles peuvent choisir leurs aliments.
L’étude a aussi montré que dès la période préhistorique, les métaux toxiques ont été dispersés sur des distances importantes à partir des zones d'extraction et traitement du minerai. On peut clairement parler de bioaccumulation, puisque sur une zone où le taux de plomb est compris entre 20 et 30 mg/kg, les moutons de l'antiquité étudiés en avaient accumulé 524 mg/kg (mesure moyenne dans la mâchoire inférieure). Sur le même site, un os humain ancien en contenait 170 mg/kg (6 fois plus que le taux de plomb du sol dans la même couche archéologique ; valeur du sol qui n'a pas du beaucoup évoluer depuis 7000 ans car le plomb est a priori peu mobile dans ce type de zone très aride). Pour le cuivre le même os en contenait 177 mg/kg, là où la couche du sol n'en contenait « que » 44 mg/kg (4 fois moins). 177 mg/kg correspond à un taux de cuivre osseux plus de 40 fois plus élevé que le taux moyen estimé normal chez l’homme au XXe siècle (4.2 mg/kg).
Les os humains de la période byzantine se sont montrés plus chargés en plomb et cuivre que ceux des hommes préhistoriques étudiés, de même que le taux de plomb des couches sédimentées à ces époques, ce qui montre une pollution et une contamination qui ont augmenté au cours du temps.
On peut aussi déduire de ces données que la vie et la mort des esclaves travaillant dans ces mines ont du être extrêmement pénibles. D’après la teneur en plomb de leurs os, les humains qui ont vécu dans les oueds pollués par les mines de la région jordanienne de Feynan étaient plus contaminés par le plomb que les humains riverains d’une zone industrielle polluée de Haute Silésie (Pologne) morts en 1993 étudiés par Baranowska et coll. (1995) (analyse d’os du sternum). Elles sont également très supérieures aux teneurs signalées chez les travailleurs de la métallurgie en Suède (40 à 100 µg/gramme d'os par Ahlgren et ses collègues (1976) et Ahlgren et Mattsson (1979).
On peut comparer ces taux à ceux mesurés dans les squelettes humains de la période préhispaniques de Ténérife (Espagne) ; 0.7 à 18.83 ppm

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