La pile d'un pont est un appui intermédiaire supportant le tablier de l’ouvrage. Il s’agit d’un appui massif et permanent, par opposition aux palées qui sont des appuis plus légers et temporaires.
Jusqu’à l’apparition du béton et de l’utilisation de la fonte puis de l’acier, les ponts étaient en maçonnerie. Les ponts romains étaient robustes, en plein cintre, et reposaient sur des piles épaisses, d'une largeur égale à environ la moitié de l'ouverture de la voûte.
Ce n’est qu’à partir de 1750, avec Jean-Rodolphe Perronet, que l’épaisseur des piles va pouvoir être réduite. Alors qu'il est considéré comme une règle absolue de leur donner une épaisseur égale au cinquième de la portée, Perronet propose et réussit à faire admettre l'adoption d'épaisseurs égales au dixième de la portée et de surbaissements variant entre 1/5ème et 1/7ème. Ces allègements permettent de réduire de façon importante l'obstacle à l'écoulement des eaux constitué par l'ouvrage. Avec 92 mètres de hauteur, les piles du viaduc des Fades en France, inauguré le 10 octobre 1909, sont les piles en maçonnerie traditionnelle les plus hautes jamais construites.
Un progrès considérable est ensuite fait grâce à l'invention du ciment naturel moderne découvert en 1791 par James Parker en Angleterre et surtout grâce aux travaux de Louis Vicat en France (1813-1818) qui pose les bases de l'industrie des liants hydrauliques et donc du béton. L’alliance avec l’acier voit naître le béton armé qui permet la réalisation d'ouvrages de plus en plus hardis et économiques. Paul Séjourné sera le dernier grand théoricien des ponts en maçonnerie et ses méthodes et formules de calcul des piles demeurent toujours d’actualité.
Les piles vont alors gagner en finesse et en hauteur. Dès 1937, une hauteur considérable est atteinte avec le pont du Golden Gate Bridge, aux États-Unis qui présente des pylônes de 230 mètres de hauteur.
Un nouveau bond en avant va se produire avec l’apparition de deux nouvelles technologies : le béton précontraint mis au point par Eugène Freyssinet en 1928 puis le béton hautes performances dans les années 1980. La combinaison des deux va permettre la réalisation des piles de très grande hauteur.
On distingue dans les piles de ponts en maçonnerie une partie résistante et une partie remplissage :
Les dimensions des appuis résultent de la prise en compte de quatre critères : la stabilité au renversement, la résistance à la compression de la maçonnerie de l'appui, la pression admissible sur le sol, et l'esthétique.
Mais les piles des premiers ponts n’étaient pas calculées et les caractéristiques des ouvrages résultaient de formules empiriques. Les piles des premiers ouvrages étaient d’une grande robustesse de façon à assurer la stabilité de l'appui en phase de construction : chaque pile était autostable sous la poussée de la voûte déjà construite. Par la suite, l'évolution technique, comme la construction simultanée des voûtes, a permis de les affiner.
L’épaisseur des piles au droit de la ligne des naissances de voûtes est donnée par les formules de Paul Séjourné.
Dans ce cas, la hauteur de l’ouvrage, mesurée entre le dessus du tablier et le sol est comprise entre a/3 et a/2, a étant l’ouverture de l’arche, qui est en général un arc de cercle ou un arc d’ellipse.
L’épaisseur de la pile dépend uniquement de la portée des arches a/8 La hauteur totale de l’ouvrage est ici généralement comprise entre1,5 a et 2,5 a. Les arches sont en plein cintre et leur épaisseur E dépend à la fois de la portée a des arches et de la hauteur H de l’ouvrage : Toutefois si la porté a est faible (a<8 m), il sera préférable de prendre pour E la formule suivante : E = 0,15 a +0,4 Piles hautes
Si H = 2,5 a, E = 0,1 a + 0,04H
Si H < 2,5 a, E = 0,125 a + 0,04H