En psychanalyse, la position dépressive est une phase survenant vers le quatrième mois de vie du nourrisson. Elle fut décrite par Melanie Klein.
La position dépressive est un moment important de la maturation du Moi chez le jeune enfant sans langage, ou infans. Des causes tant extérieures que internes peuvent l'activer.
L'accès à la position dépressive, initialement, est capacité de surmonter la position paranoïde-schizoïde, dont les traits sont proches de la psychose. Le fonctionnement mental du bébé, alors comparable à une psychose, devient proche de traits observables dans la dépression - bien que la comparaison du pathologique au développement normal reste limitée. La préoccupation du nourrisson, qui selon cette théorie passe d'une position à l'autre, change alors radicalement.
Concrètement, le nourrisson commence par reconnaitre sa mère. Mais bientôt, il reconnaitra différents membres de son entourage, comme son père. Cette reconnaissance de la personne est un point d'importance, mais la position dépressive étudie plutôt l'aspect intrapsychique de cette reconnaissance, la dynamique qui lui est associée et qui constitue une attitude mentale se manifestant toute la vie, mais plus particulièrement dans les épisodes dépressifs.
Grossièrement, une première identité du nourrisson se constitue ; l'approche théorique mettra donc en relation reconnaissance de l'autre et reconnaissance de soi.
Si elle étudie la vie psychique la plus précoce, Klein ne s'intéresse cependant pas à la relation mère-enfant en tant que telle. Il s'agit bien d'étudier la réalité psychique, chez le nourrisson.
L'accès à la position dépressive implique la possibilité de l'élaboration d'un fonctionnement intégré à partir de la position paranoïde justement définie par une forte fragmentation de la vie psychique.
La mère sera donc reconnue. Le clivage de l'objet s'assouplit : là où il y avait un bon sein et un mauvais sein, selon le schéma de l'objet partiel, le bébé commence à intégrer sa mère comme une personne aux différents aspects, et notamment à la fois satisfaisante et frustrante, rassurante et inquiétante, parfois présente et parfois absente. Ces différentes facettes de l'objet ont de moins en moins pour conséquence le clivage, la segmentation de l'objet, de la personne de la mère, en mille morceaux inassimilables. Il y a donc accès à la relation d'objet propre à l'objet total.
Dans la position paranoïde, il y a très forte identification à l'objet idéal. Cette identification gratifiante, rassurante, permet par la suite que la projection du mauvais à l'extérieur, l'attribution du néfaste au-dehors, à l'environnement, diminue. Le moi-plaisir (tel que décrit par Freud) permet, par la réponse qu'il apporte à l'état de détresse, de tolérer des pulsions hostiles comme siennes. Il y a de fait réduction du morcellement de l'identité du nourrisson : le clivage du moi diminue.
Le Moi, qui existait jusque là sous une forme très archaïque, souffre de moins de clivages. Le Moi lui-même s'avère à la fois source de satisfaction et de détresse : le clivage du moi se réduit. De même que la projection faiblit, l'introjection, assimilation d'un trait jusque là perçu au-dehors comme soi, devient plus importante. Cette attitude psychique correspond à une plus grande préoccupation pour la réalité externe, qui se révèle comme précieuse.
Ces mécanismes sont donc une reconnaissance de la dépendance. La mère se distingue comme objet d'attachement. Si l'angoisse était, dans la position paranoïde-schizoïde, de nature psychotique (angoisse de mort, de persécution), elle se modifie. L'accès à l'ambivalence, soit la capacité de reconnaitre en soi les tendances mauvaises, ainsi que l'accès à la reconnaissance de la dépendance à la mère, modifient la nature de l'angoisse, qui se colorie d'une tonalité dépressive. L'angoisse dépressive est crainte de tuer l'objet, de le perdre.
Cette coloration de l'angoisse est une clé pour qui veut comprendre les défenses liées à la position dépressive. Il faut de nouveau noter que cette position n'est pas seulement un stade mais bien une attitude présente la vie durant, puisque l'angoisse dépressive demeure.
Du fait de la crainte que l'objet ne soit perdu, les défenses face à la position dépressive sont spécifiques à ce processus. Les mécanismes de défense sont de deux types : la réparation et la défense maniaque.
Il faut cependant considérer que si la position dépressive se définit par opposition au stade plus précoce, la maturation du Moi, presque synonyme d'une constitution de cette instance psychique, par un deuil, indique une portée large de l'étude de ces défenses. La position dépressive serait en elle-même une défense...
Il s'agit de réparer l'objet interne maternel, fantasmatiquement endommagé par l'agressivité (pulsion de mort - objets persécuteurs). C'est a partir de là que l'objet idéal interne pourra se constituer. La réalité extérieure va contribuer à cette réparation par la présence de la mère. Le fait qu'elle ne disparaisse pas va diminuer la croyance du nourrisson en la toute puissance de son hostilité; Winnicott parle de la survivance de l'objet. Dans le cas contraire, si la mère se déprime, ne survit pas, la dépression reste sous-jacente et de nombreuses pathologies adultes se déclarent à la suite de la perte d'un être aimé. La réparation suppose donc une continuité suffisante de la présence maternelle, à la fois sur le plan qualitatif et sur le plan quantitatif.
Alors que la position paranoïde rappelle les psychoses schizophréniques et paranoïaques, ce type de défense montre le parallèle entre une position infantile et la psychose maniaco-dépressive.
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