Le réacteur nucléaire naturel d’Oklo, près de la ville de Franceville dans la province de Haut-Ogooué au Gabon, est un ensemble de réacteurs nucléaires naturels, c’est-à-dire que des réactions de fission nucléaire en chaîne auto-entretenues y ont eu lieu sans intervention humaine. Cependant, ces réacteurs nucléaires naturels restent de très faible puissance, comparativement aux réacteurs nucléaires actuels fabriqués par l'homme.
C’est le seul exemplaire connu sur la Terre, découvert en 1972 par le physicien français Francis Perrin dans la mine d’uranium d’Oklo exploitée par la Cogema ; tous les réacteurs du site sont aujourd’hui éteints.
Le Gabon était une colonie française quand des analyses de routine du CEA (ou plutôt de son bras industriel qui devint plus tard la Cogema) ont été effectuées. Elles permirent la découverte d’uranium dans cette région en 1956. La France ouvrit immédiatement des mines, gérées par la COMUF (Compagnie des Mines d’Uranium de Franceville) près du village de Mounana pour exploiter les ressources. Après l’indépendance, en 1960, l’État du Gabon reçut une petite partie des bénéfices de la compagnie.
Pendant 40 ans, la France extrait de l’uranium dans cette partie du Gabon. Une fois extrait, l’uranium est utilisé en France et en Europe. Les mineurs du Gabon prétendent ironiquement que sans eux, le TGV n’aurait pas pu exister. Aujourd’hui, la mine d’uranium est épuisée et n’est plus exploitée.
Le "phénomène Oklo" a été découvert en 1972 à l’usine d’enrichissement d’uranium de Pierrelatte, en France. Des analyses de routine sur un échantillon d’hexafluorure d’uranium (UF6) provenant de la mine d’Oklo mettent en évidence un manque anormal d’uranium 235 (235U). La proportion normale de 235U est de 0,7202 %, alors que les échantillons ne présentent que 0,7171 %. Comme les quantités d’isotopes fissiles sont cataloguées précisément, cette différence devait être expliquée ; aussi, une enquête est lancée par le CEA. Une série de relevés de la composition isotopique de l’uranium d’Oklo et d’autres mines est effectuée, et met en évidence des différences significatives ; la proportion de 235U dans certains échantillons de minerai baisse jusqu’à 0,440 %.
Plusieurs hypothèses sont envisagées pour expliquer cette faible teneur en 235U, mais la découverte de trace de produits de fission accrédita la thèse d’un réacteur nucléaire spontané.
Le stockage de déchets radioactifs en profondeur consiste à conditionner des déchets radioactifs dans des conteneurs scellés et à le déposer dans des chambres excavées dans des couches géologiquement stables, à 500 ou 1 000 mètres de profondeur.
Pendant leur fonctionnement, les réacteurs naturels ont produit 5,4 tonnes de produits de fission, 1,5 tonnes de plutonium et d’autres éléments transuraniens. Tous ces éléments sont restés confinés jusqu’à leur découverte, en dépit du fait que l’eau coule dedans et qu’ils ne sont pas sous des formes chimiquement inertes.
Le site d’Oklo illustrerait donc la capacité des couches géologiques locales à isoler les matières radioactives. Ainsi, selon une thèse de doctorat de l'université d'Orsay :
« Des observations minéralogiques, des analyses chimiques et des analyses isotopiques sur roche totale nous ont permis de conclure qu'une partie des radioéléments et de leurs descendants est restée concentrée dans les zones de réaction, associée à des phases minérales secondaires, tandis qu'une autre fraction a migré vers la bordure du réacteur. Suivant l'intensité des réactions nucléaires et la présence ou non du faciès argile de pile, qui constitue souvent un faciès intermédiaire entre le cœur du réacteur et le grès encaissant, les radioéléments sont restés concentrés à la bordure du réacteur ou ont migré dans les premiers mètres de grès encaissant massif. [...] Les principaux enseignements de ce travail pour le stockage de déchets nucléaires de haute activité concernent la stabilité à long terme des oxydes d'uranium dans un environnement géologique réducteur et la capacité de rétention des phases minérales secondaires et de la barrière argileuse vis-à-vis de plusieurs radioéléments. Nos résultats indiquent également que les interfaces entre les différentes barrières artificielles d'un site de stockage peuvent limiter la migration des radioéléments en champ proche. Par ailleurs, cette étude confirme que des transferts de radioéléments peuvent s'effectuer par l'intermédiaire de fissures. »
Toutefois, le site d'Oklo étant un milieu ouvert en perpétuelle modification, il ne peut constituer un modèle ni une référence de site de stockage des déchets radioactifs ; il constitue un exemple unique de comportement, à long terme, de produits issus des réactions nucléaires dans un milieu naturel et apporte des renseignements sur les propriétés de l'argile en matière de confinement. Dans ce cas, c'est la présence de matière organique associée à des minéraux FeII/FeIII (fer II et fer III) dans une « zone tampon redox » autour du réacteur naturel qui permet d’expliquer la préservation de l’uraninite au sein de la zone de réaction et la faible migration de l’uranium au cours des temps géologiques.
Cet exemple de confinement en milieu naturel constitue un argument de poids pour la promotion des stockages souterrains ; le gouvernement des États-Unis cite et extrapole les observations faites à Oklo, dans son enquête sur la possibilité d’ouvrir un site de stockage à Yucca Mountain :
« Lorsque ces réactions nucléaires en chaîne naturelles souterraines se sont arrêtées, la nature a montré qu’elle était capable de confiner efficacement les déchets produits par les réactions. Nulle réaction en chaîne ne va jamais avoir lieu dans un site de stockage de déchets radioactifs. Mais si un site de stockage devait être construit dans les Yucca Mountains, les scientifiques compteraient sur la géologie de l’endroit pour contenir les radionucléides générés par ces déchets avec la même efficacité. »