« Quoi enseigner et comment ? » De cette question découleront toutes les réflexions et les mises en œuvres du pédagogue.
Il condamne l’immixtion du maître sur l’élève, c'est-à-dire son influence consciente et refuse l’éducation. Il refuse cette « influence forcée d’une personne sur une autre, dans le but de former un homme tel qu’il lui semblera bon ». Ainsi, il va jusqu’à ne pas reconnaître « le droit d’éducation ».
C’est ici, on le voit, un point de dissidence avec l’école progressiste de son époque, et c’est ici que Tolstoï se pose en précurseur de nouveaux courants pédagogiques (non-directifs, libertaires, etc. …).
Il souhaite aussi protéger la culture de ce qu’il appelle « l’école ».
Tostoï est un être de contradiction. A partir de la cinquantaine, il rentrera dans une grande période mystique. Apparaîtra alors, une forme tardive d’éducation dans le but de « développer chez les enfants tout ce qui favorise l’union », l’union avec tous les êtres vivants étant « la grande affaire de la vie ».
Il n’y a qu’un seul objectif à l’enseignement et celui-ci est évident : « l’aspiration à l’égalité des connaissances ». Comment se fait-il alors, que celui-ci soit si souvent délaissé ou relégué au dernier plan. L’explication est dans les raisons qui motivent les éducateurs. Ceux-ci n’aspirent pas forcément à cette égalité des connaissances, mais sont guidés par des valeurs et imposent « l’étude par l’obéissance, l’étude par l’amour-propre, l’étude par l’ambition et les avantages personnels ». Pourtant la pédagogie ne devrait pas s’inspirer de finalités idéologiques, philosophiques ou religieuses. Elle ne devrait pas non plus réfléchir à comment mieux préparer la jeune génération à la société. Sa seule préoccupation devrait concerner les « conditions qui ont corroboré la concordance des aspirations de celui qui instruit et de celui qu’on instruit ».
Il faut une rencontre la plus vraie possible entre celui qui sait et celui qui désire apprendre. Cela implique une relation sans domination entre le maître et l’élève. On voit ici un point de divergence avec Rousseau. Quand ce dernier invente un éducateur fourbe et omnipotent, Tolstoï souhaite un maître humain, c'est-à-dire imparfait et honnête :
La liberté est tellement importante qu’elle devient même le critère pour déterminer quelle méthode choisir. La méthode n’est pas choisie en fonction d’une doctrine pédagogique, ni pour réaliser un objectif en fonction de cette doctrine, mais pour la liberté ici et maintenant, seul facteur permettant l’apprentissage.
De la sorte, il n’y a qu’un critère de la pédagogie :
Ainsi, en souhaitant un maître imparfait et honnête, en laissant la possibilité à l’élève de refuser l’influence du maître et en calibrant le choix de la méthode sur l’acceptation libre de celle-ci par l’élève, Tolstoï renverse le paradigme de l’échec :
Les meilleures conditions de l’instruction étant ce rapport sans domination entre le maître et l’élève, Tolstoï interdit l’usage des punitions. Il pense aussi que la seule récompense est dans l’assouvissement du désir de savoir. Le refus d’une forme de dressage n’implique pas forcément une attirance pour le chaos. Plus les connaissances à enseigner se font précises, spécifiques, plus un ordre est nécessaire pour organiser leurs transmissions. Mais cet ordre se construit par la nécessité qu’impose le désir de savoir et non par une contrainte extérieure à l’enfant :