Soit
un espace vectoriel topologique sur le corps
ou
.
Le dual topologique de
est le sous-espace de
(espace dual de E) formé des formes linéaires continues (il est immédiat que c'est bien un sous-espace vectoriel).
Si l'espace est de dimension finie le dual topologique coïncide avec le dual (algébrique) puisque dans ce cas toute forme linéaire est continue.
Par contre ceci est inexact dans le cas général. Ainsi par exemple envisageons l'espace vectoriel réel
des fonctions dérivables de l'intervalle [0,1] dans
muni de la topologie de la norme uniforme
. Soit alors
la forme linéaire définie par
. Soit par ailleurs la suite de fonctions de
définie par
. On constate facilement que
(la fonction
est positive et maximale pour
). Mais
pour tout n alors que
devrait tendre vers
si
était continue !
Dual topologique d'un espace de Hilbert
Nous allons prouver le résultat fondamental suivant :
Le dual topologique
d'un espace de Hilbert
est l'image de
par l'isomorphisme
tel que l'image
d'un vecteur
soit la forme linéaire définie par
(produit scalaire).
En effet, l'application
est clairement une forme linéaire (« en w »), continue en vertu de l'inégalité de Cauchy-Schwarz.
est évidemment linéaire.
Si
, quel que soit
,
. En appliquant ceci à
on déduit
, ce qui montre que
est injective.
Montrons enfin que
est surjective. Tout d'abord
. Soit à présent
une forme linéaire non nulle continue sur
. L'hyperplan vectoriel
d'équation
est fermé. La théorie de la projection sur un hyperplan fermé d'un Hilbert (cf. espace de Hilbert) montre l'existence d'un vecteur unitaire u orthogonal à cet hyperplan et de plus
. Tout vecteur w de
s'écrit de manière unique
avec
. Il en résulte que
puisque
. Ainsi
.
Topologies duales
Nous allons dire quelques mots sur les topologies que l'on peut définir canoniquement dans certains cas sur le dual.
À tout vecteur v de
on peut faire correspondre l'application
de
dans
définie par
.
Il est immédiat que νv est une semi-norme sur
. On considère une famille finie J de semi-normes. On définit la semi-norme
. Cette famille de semi-normes pJ est filtrante. La topologie définie par cette famille de semi-normes s'appelle topologie faible du dual. Muni de cette topologie,
est un espace localement convexe. Comme conséquence du théorème de Hahn-Banach, la topologie définie ci-dessus est séparée.
Topologie forte sur le dual d'un espace normé
Si
est un espace vectoriel normé, on peut définir une norme duale sur
par
muni de cette norme (on dit "le dual fort") est un espace de Banach.
En effet soit
une suite de Cauchy de
.
Pour tout
la suite
est une suite de Cauchy de
( puisque
). Il en résulte la définition d'une fonction
de
dans
définie par
.
est une forme linéaire (algébrique): démonstration immédiate ("passage à la limite")
est continue:
et comme toute suite de Cauchy est bornée, il existe tel que
pour tout
. D'où
, ce qui montre que p est continue en 0 et donc continue sur
.
Le théorème de Banach-Alaoglu-Bourbaki affirme que la boule unité de l'espace dual d'un espace de Banach, muni de la norme de la topologie forte, est *-faiblement compacte.
Bidual (topologique)
Alors que la notion purement algébrique du bidual ne présente aucune ambiguïté, il en est tout autrement pour les notions topologiques. En effet selon la topologie retenue sur le dual les formes linéaires sur ce dual pourront être ou non continues.
Dans le cas d'un espace de Banach E, on qualifie en général de bidual le dual du dual muni de la topologie forte, noté E''.
Il existe une application naturelle de E dans son bidual, l'application d'évaluation
qui constitue une injection isométrique. Lorsque J est une bijection, l'espace E est dit réflexif.
Par exemple, pour
, l'espace lp des suites (xn) telles que
converge, est réflexif. Son dual est l'espace des suites (yn) telles que
converge, avec
.
Par contre, l'espace c0 des suites de limite nulle n'est pas réflexif. Son dual est l'espace l1 des suites (xn) telles que
converge, et dont le dual est
, espace des suites bornées.