Géocentrisme - Définition

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Importance philosophique

L'idée que la Terre devait être au centre de l'Univers découlait en grande partie d'une vision du monde. Aristote, en effet, avait construit un système suivant des critères d'esthétique (exigence de sphères parfaites) et de l'importance qu'il attribuait aux objets. Il s'agit d'un modèle surtout intuitif, qui attribue des comportements différents aux objets terrestres et célestes (il faut attendre Newton pour donner une explication commune aux mouvements des astres et à la chute des corps).

Ce caractère intuitif est initialement la force du modèle géocentriste : l'homme ne ressent pas de mouvement de la Terre, et les objets célestes ne tombent pas comme les objets terrestres. Mais selon les critères, le rôle prépondérant de l'intuition fait juger ce modèle comme non scientifique.

L'exigence de perfection des sphères se retourna aussi contre le géocentrisme ; la découverte par Galilée des cratères lunaires le confortait dans la critique de ce modèle.

Position de l'Église

La conception du monde d'Aristote était largement reprise par l'Église catholique romaine, comme le montrait l'importance de la philosophie scolastique.

De plus, certains passages de l'Ancien Testament étaient interprétés comme confirmant le géocentrisme, selon les traductions (par exemple dans le Psaume 93 « Aussi le monde est ferme, il ne chancelle pas. », le mot « chanceller » pouvant être remplacé par « bouger »).

Cela n'exclut toutefois pas les recherches. Nicolas Copernic lui-même était un chanoine.

Face à Galilée

Le pape Urbain VIII avait autorisé Galilée à publier son ouvrage, à condition qu'il place sur le même plan les théories de Copernic et de Ptolémée ; Galilée présenta les deux théories, mais en favorisant tout de même celle de Copernic.

Galilée fut accusé d'hérésie, et finalement, dut renier ses convictions pour éviter une condamnation à mort. Il fut condamné à la prison à vie, commuée en assignation à résidence par Urbain VIII.

Face aux passages de l'Ancien Testament, Galilée n'avait pas cherché à discuter leur interprétation, mais avait contesté que la lecture littérale de la Bible puisse servir de référence en science.

Ce procès est particulièrement important, car il marque ce que certains considèrent comme un conflit entre la science et la religion. Pour d'autres, il oppose plutôt ceux qui cherchent l'opposition entre religion et science (ceux qui ont condamné Galilée) à ceux qui cherchent à les concilier (comme Galilée lui-même). Dans tous les cas, le procès de Galilée devint le symbole de l'opposition entre les nouveaux scientifiques et les autorités religieuses. De plus, le refus de lire la Bible littéralement en matière de science devint plus tard essentiel dans l'opposition entre créationnisme et théorie de l'évolution.

Ce n'est que vers 1750 que l'Eglise, au cours du pontificat de Benoit XIV, abandonna de fait le modèle géocentrique, et c'est bien plus tard encore qu'elle reconnut avoir fait erreur dans le procès de Galilée, et lui donna raison dans sa lecture de la Bible en matière de science : le 31 octobre 1992, le pape Jean-Paul II rendit hommage au savant lors de son discours aux participants à la session plénière de l'Académie pontificale des sciences. Il y reconnaissait clairement les erreurs de certains théologiens du XVIIe siècle dans l'affaire :

« Ainsi la science nouvelle, avec ses méthodes et la liberté de recherche qu'elle suppose, obligeait les théologiens à s'interroger sur leurs propres critères d'interprétation de l'Écriture. La plupart n'ont pas su le faire. »
« Paradoxalement, Galilée, croyant sincère, s'est montré plus perspicace sur ce point que ses adversaires théologiens. « Si l'écriture ne peut errer, écrit-il à Benedetto Castelli, certains de ses interprètes et commentateurs le peuvent, et de plusieurs façons ». On connaît aussi sa lettre à Christine de Lorraine (1615) qui est comme un petit traité d'herméneutique biblique. »

Modèles et réalité

Si l'on a une conception du monde telle qu'on exige que l'homme, donc la Terre, soit au centre de l'Univers, un recours possible est de considérer que le modèle actuel des astronomes, dans lequel la Terre est mobile (tournant autour du Soleil, lui-même en mouvement dans la Voie lactée, ect.) ne doit être considéré que comme un modèle commode pour leurs calculs.

Cette position est celle du Parti dans le roman 1984. Il s'agit d'un exemple de la « doublepensée », c'est-à-dire la pratique du Parti d'exiger de chacun qu'il accepte d'admettre des choses contradictoires sans utiliser son esprit critique pour relever ces contradictions.

Dans Adieu la raison, Paul Feyerabend défend que les modèles des physiciens ne doivent être considérés que comme utiles à la fin de faire des prédictions, et conteste l'idée de Galilée selon laquelle les modèles considérés comme vrais par les astronomes doivent être intégrés au savoir commun tels quels. Pour lui, l'Église avait raison de refuser de laisser à l'astronomie le statut de réalité. Un domaine plus large doit permettre de définir ce qu'on accepte comme réalité parmi les modèles des scientifiques, et Feyerabend estime que l'Église, en choisissant la foi comme étant ce domaine plus large, choisissait un cadre plus acceptable par rapport aux soucis humains.

Une telle position est toutefois exceptionnelle. Elle n'est pas très populaire chez les physiciens, qui considèrent plus souvent leurs modèles comme réels. Dans 1984, cette position n'était pas à prendre en exemple, puisqu'elle servait à illustrer l'hypocrisie. Les partisans de Galilée s'amusent du paradoxe que représente les critiques modernes de Galilée comme Feyerabend, qui en viennent à défendre l'Église ancienne contre Galilée et l'Église moderne, alors que ces penseurs sont généralement de gauche politiquement

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