Géocentrisme - Définition

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Bibliographie

  • Ciel, passé, présent, de Gilbert Walusinski
  • L'astronomie et son histoire, de Jean-René Roy
  • L'Image du Monde des Babyloniens à Newton, de Arkan Simaan et Joëlle Fontaine, Adapt Editions, 1999.
  • Le Monde des sphères, 2 volumes, Les Belles Lettres, Michel-Pierre Lerner.
  • Les Somnambules, Editions Calmann-Lévy, Paris 1960, Arthur Koestler.

Le géocentrisme aujourd'hui

Statut dans la science actuelle

Référentiels usuels

Les référentiels permettant de mettre en évidence les approximations des points de vue géocentriques et héliocentriques sont les suivants :

  • Référentiel terrestre centré en un point de la Terre, ses axes sont liés à la rotation terrestre. Par exemple, le référentiel terrestre peut se définir sur un terrain de foot comme un référentiel centré au point de corner, donc les axes sont la ligne de touche, la ligne de but et le poteau de corner.
  • Référentiel géocentrique : a pour origine le centre de gravité terrestre, et ses axes sont définis par rapport à des étoiles lointaines.
  • Référentiel héliocentrique : a pour point fixe le centre du Soleil, et de même ses axes sont définis par rapport à des étoiles lointaines.

L'utilisation du référentiel géocentrique néglige donc le mouvement de la Terre autour du Soleil, et le référentiel terrestre néglige la rotation de la Terre sur elle-même.

La rotation en mécanique

Pour comprendre les effets provoqués par le passage d'un référentiel à l'autre, il faut préciser quelques points de cinématique.

Un point A en rotation autour d'un point B à la vitesse angulaire ω sur une trajectoire de rayon R a une vitesse instantanée de valeur V=ωR. À tout instant, le point A possède une vitesse de valeur V de direction tangente au cercle, et une accélération de valeur a=ω²R dirigée vers le point B. On peut également exprimer cette accélération par a=V²/R.

Or, Galilée a mis en évidence que les vitesses ne sont pas ressenties pour elles-mêmes, seules les accélérations le sont, proportionnellement à leur valeur. Avec la relativité restreinte, Albert Einstein confirma que cette indifférence de la vitesse est vraie pour toutes les lois de la physique, électromagnétisme (donc lumière) compris.

En pratique, cela signifie que la rotation de la Terre décrite par Galilée produit très peu de mouvement sensible. Mais la rotation de la Terre autour du Soleil est bien moins sensible encore. Et c'est encore pour cela que le mouvement de la Terre par rapport au centre galactique, de 200km/s, est bien plus difficile à mettre en évidence que celui par rapport au Soleil (ce qui revient à dire qu'on peut généralement le négliger), d'une vitesse de 30km/s.

Cinématique et dynamique

La cinématique consiste à établir des équations donnant les positions d'objets au cours du temps, sans faire intervenir de notions de forces. Du point de vue de la cinématique, il est parfaitement possible de choisir le centre de la Terre comme point origine du repère, sans que cela engendre d'erreur.

On peut faire ce choix quand on se pose un problème ne concernant que les satellites de la Terre, et donc en ne s'intéressant qu'aux mouvements de ces satellites par rapport à elle. Typiquement, pour une constellation de satellites de télévision, on utilise les trajectoires des satellites dans un repère géocentrique pour démontrer qu'il y a toujours un satellite en vue d'une zone précise.

En effet, les observations de Galilée étaient compatibles avec le modèle de Copernic, non avec celui de Ptolémée. On peut en revanche construire un système compatible avec toutes les observations astronomiques, en mettant le Soleil en rotation autour de la Terre, et les autres objets en rotation autour du Soleil comme dans le modèle de Copernic. Mais une fois toutes les planètes considérées, le modèle obtenu apparaît comme inutilement compliqué en comparaison de celui de Copernic.

En dynamique, le choix du référentiel n'est plus aussi libre. La dynamique exige d'expliquer les mouvement par des forces, et donc le choix d'un mauvais référentiel impose d'ajouter des forces fictives pour faire correspondre les trajectoires aux forces en présence. D'un point de vue physique, le référentiel terrestre est acceptable pour la plupart des expériences de la vie quotidienne. En revanche, dès qu'on fait des mesures précises, le référentiel terrestre nécessite qu'on lui adjoigne des forces fictives traduisant son caractère non-galiléen.

L'univers n'a pas de centre

Newton avait calculé que dans un univers limité, quelle que soit la répartition initiale des étoiles, toute la matière finissait par se regrouper sous l'effet de la gravité. Il postula donc que l'univers était infini, rempli d'un nombre infini d'étoiles. Aujourd'hui, les cosmologues ont établi que l'univers est ou bien infini, ou bien refermé sur lui-même (l'équivalent tridimensionnel de la surface d'une sphère). Prétendre que la Terre, ou même le Soleil, serait au centre de l'univers, perd tout son sens dans les deux cas (de même qu'aucun point à la surface de la Terre ne peut en être le centre).

Une autre question est de savoir si la Terre se situe à un lieu particulier de l'univers, qui en feraient un point d'observation privilégié. Même sur un domaine tout à fait physique, cette question n'est pas encore tranchée, mais les astrophysiciens estiment plus prudent d'admettre que ce n'est pas le cas, et de chercher à expliquer la géométrie de l'univers en considérant qu'elle doit être la même depuis tout point d'observation. La révolution copernicienne ayant retiré à la terre son statut de centre de l'univers, cette supposition a été appelée principe de Copernic.

Question de l'immobilité

La relativité galiléenne rend caduque l'idée qu'un référentiel serait le référentiel absolu, par rapport auquel on peut définir les mouvements de tous les objets de l'univers. Newton lui-même supposait l'existence d'un tel référentiel, mais montrait que les lois de la physique s'appliquaient de même dans tout référentiel en translation par rapport à celui-ci, qui devint de fait inutile. (Augustin Fresnel introduisit un milieu inamovible, l'éther, pour la propagation de la lumière, mais la théorie de la relativité supprima cet artefact). Un référentiel ne peut donc pas être absolu.

L'enjeu devient alors de savoir si la Terre ou le Soleil constituent des référentiels inertiels, ou référentiels galiléens, c'est-à-dire si en considérant l'un des deux comme fixe, on obtient des mouvements pour tous les astres compatibles avec les forces qu'ils subissent. Cette propriété est définie à une translation rectiligne près, ce qui signifie que si on trouve un référentiel vérifiant cette propriété, un autre référentiel dont le centre se déplace à vitesse constante en valeur comme en direction vérifie également cette propriété. En revanche cette propriété ne peut être vérifiée simultanément par des référentiels n'étant pas en translation. Ce qui signifie que les référentiels centrés sur la Terre et le Soleil ne peuvent être tous deux inertiels ou même quasi-inertiels (ou du moins que l'un d'eux aura des imperfections largement supérieures).

La relativité générale rend purement locale la notion de référentiel. Le problème de l'immobilité de la Terre n'est pas aboli pour autant : même avec la relativité générale, si on construit un système de coordonnées dans lequel la Terre est fixe, les objets qui ne sont soumis à aucune force non-gravitationnelle ne suivent pas des géodésiques (la relativité générale incluant la gravité dans la courbure de l'univers). Au contraire, la trajectoire de la Terre dans un système de coordonnées où le Soleil est fixe est très proche d'une géodésique. Si les opérateurs sont plus compliqués, il ne faut pas pour autant croire que la relativité mettrait sur un pied d'égalité le géocentrisme et l'héliocentrisme, ou tout système encore plus précis.

Accroissement de la précision

La recherche d'un référentiel inertiel a permis de conclure que le référentiel héliocentrique est une très bonne approximation d'un référentiel galiléen, mais que le référentiel choisissant comme point fixe le centre de masse du système solaire (légèrement différent du centre du Soleil), ou référentiel de Copernic était encore meilleur. Mais le référentiel géocentrique reste suffisant pour une étude en première approximation du mouvement d'un satellite terrestre, et le référentiel terrestre suffit pour la plupart des expériences courantes.

La vitesse de la Terre dans le référentiel géocentrique est d'environ un dixième de la vitesse du Soleil dans le système de coordonnées galactiques. Cependant la relativité montre que les vitesses rectilignes ne produisent pas de mouvement détectable. Or le mouvement du Soleil est quasiment circulaire, mais avec un rayon si grand qu'il apparaît comme rectiligne (avec une accélération extrêmement faible en direction de ce centre). C'est pourquoi l'imperfection du référentiel héliocentrique est extrêmement faible par rapport à celle du référentiel géocentrique. À noter que le caractère indécelable du mouvement rectiligne uniforme et la faiblesse de cette accélération expliquent que le mouvement du système solaire tout entier dans les coordonnées galactiques soit resté inconnu plus longtemps que le mouvement de la Terre autour du Soleil.

Dans les expériences et problèmes courants

Certains défenseurs du géocentrisme soulignent que selon les problèmes considérés, les physiciens peuvent considérer la Terre comme immobile. En fait, cela ne signifie pas que les physiciens reviennent au géocentrisme, mais simplement qu'ils admettent que pour le problème considéré, la différence obtenue sera négligeable.

Typiquement, la déviation vers l'est peut être calculée avec une précision suffisante même en admettant que la Terre tourne sur elle-même mais que son centre est immobile. Pour des problèmes impliquant des distances encore plus faibles, on peut non seulement admettre que la Terre est immobile, mais aussi qu'elle est plate, et le champ de pesanteur indépendant de l'altitude.

L'utilisation du référentiel géocentrique n'implique donc pas l'acceptation du géocentrisme.

Il faut noter que dans la plupart des expériences courantes, on suppose que la gravité ne dépend pas de l'altitude (absurde au vu de son expression rigoureuse, évident en évaluant numériquement les premiers termes du développement limité). En fait, la plupart des calculs de trajectoire d'un objet à la surface de la Terre peuvent même se faire en supposant que la Terre est plate.

Statut final

En conséquence de toutes les considérations décrites ci-dessus, on doit conclure qu'il est impossible d'affirmer l'immobilité ou le caractère central d'un objet céleste quel qu'il soit.

De plus, le fait qu'il existe de nombreuses corrections à faire par rapport à l'héliocentrisme ne retire pas sa vérité à la phrase « la Terre tourne autour du Soleil », car par rapport à l'hypothèse de l'immobilité de la Terre, la rotation de la Terre sur elle-même élimine les accélérations parasites les plus importantes, et par rapport à l'hypothèse de fixité d'une Terre tournant sur elle-même, la Terre tournant autour du Soleil diminue encore fortement les résidus.

Défenseurs du géocentrisme

Certains courants, souvent d'inspiration chrétienne, persistent à défendre le modèle géocentrique. Les arguments présentés se basent parfois sur des résultats de la physique du XXe siècle: attribution du résultat nul de l'expérience de Michelson-Morley à l'immobilité de la Terre, prétention que la relativité met tous les référentiels sur le même plan. Les argumentations sont souvent basées sur une mauvaise compréhension de la physique: Conservapedia par exemple affirme qu'aujourd'hui les physiciens emploient aussi bien la théorie héliocentrique que la théorie géocentrique, confondant modèle et théorie (faire les calculs dans le référentiel géocentrique ne signifie pas qu'on croit que la Terre est immobile, mais que l'on sait que le résultat du calcul correspondra à la réalité même en faisant cette hypothèse). The Final Theory, livre de Mark McCutcheon défendant le géocentrisme, prétend que la physique actuelle est incapable d'expliquer comment la lumière accélère en passant du verre à l'air (confondant vitesse et quantité de mouvement).

Les errements initiaux de Foucault lors de la mise au point de son pendule sont également évoqués.

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