La pathologie professionnelle était déjà décrite dans la Bible et dans l’antiquité, un papyrus de 2 500 ans avant Jésus-Christ contient la description dans l’ancienne Égypte du lumbago aigu survenu accidentellement chez un ouvrier ayant participé à la construction d’une pyramide. Plus tard Hippocrate le père de la médecine avait déjà remarqué en 450 avant JC que l’asthme était plus fréquent dans certaines professions, les tailleurs, les pêcheurs et les métallurgistes entre autres. On trouve également des allusions aux maladies professionnelles chez Pline l’Ancien puis Julius Pollux.
Le premier ouvrage traitant des maladies du travail est l’œuvre de Philippus Theophrastus Aureolus Bombastus von Hohenheim dit Paracelse (11 novembre1493 – 24 septembre 1541) alchimiste, astrologue et médecin suisse.
Il a écrit un traité fondateur Des mineurs et Le mal des montagnes et autres maladies des mineurs décrivant les risques professionnels liées à l’extraction des minerais et au travail des métaux et abordant leur traitement ainsi que les stratégies de prévention, ce qui fait de lui le précurseur de la médecine du travail. La maladie qu’il a décrite et qu’on connaissait à l’époque sous le nom de mal des montagnes était due à une irradiation par le radon un gaz formé par la désintégration du radium qui se dégage des roches surtout dans les régions granitiques, volcaniques et uranifères et s’accumule dans l’atmosphère des cavités souterraines mal ventilées (caves, mines). Son inhalation prolongée peut provoquer un cancer du poumon chez les professionnels exposés (mineurs) et même chez les habitants des maisons polluées par ces émanations naturelles.
Le véritable pionnier de la médecine du travail, celui qui a le premier attiré l’attention sur les conditions de travail abominables des ouvriers des manufactures au IXX ème siècle, est Louis René Villermé ( 10 mars 1782 - 16 novembre 1863), un médecin et sociologue français, ancien chirurgien de l'armée française puis de la Grande Armée.
Il abandonne la médecine en 1818 pour se consacrer à la question des inégalités sociales.
Au début du XIXe siècle, des enfants de 5 ans travaillaient couramment 15 à 16 heures par jour à dévider les trames dans les filatures. Les pouvoirs publics finirent par s'émouvoir, non pas tant des souffrances endurées que des statistiques fournies par les conseils de révision. Les jeunes ouvriers étaient si mal portants qu'on devait déclarer inaptes plus des deux tiers. On risquait de manquer de conscrits, c'est cela qui alarma les autorités. Le docteur Villermé fut chargé d'un rapport sur l'état de santé des ouvriers des manufactures quelques années après la Révolte des Canuts en Novembre 1831 à Lyon qui fut la première insurrection sociale de l’ère industrielle.
Son travail, intitulé Tableau de l'état physique et moral des ouvriers employés dans les manufactures de coton, de laine et de soie, paru en 1840 et connu sous le nom de rapport villermé a eu un grand retentissement et a été à l'origine de la loi sur le travail des enfants dans les manufactures, la loi Cunin-Gidraine du 22 mars 1841 qui limita l'âge d'admission dans les entreprises à 8 ans, mais uniquement dans les entreprises de plus de 20 salariés et interdit le travail de nuit pour les enfants de moins de 12 ans.
C’est l’une des premières tentatives françaises de règlement général concernant le travail et une rupture avec la Loi Le Chapelier du 17 Juin 1791 qui avait interdit les corporations de l’ancien régime ainsi que toute association de travailleurs (syndicats ou mutuelles) pour favoriser la libre entreprise. La liberté du travail est alors sans limite. Les rapports au travail reposent sur une base exclusivement contractuelle, l’État étant tenu de ne pas intervenir. Le contrat de travail fait naître à la charge de l’ouvrier une obligation d’exécuter le travail qui lui est confié, et à la charge de l’employeur, une obligation de payer le prix convenu. Il n’y a, ni dans le Code civil, ni dans les textes de la première moitié du XIXe siècle, d’obligation patronale d’assurer à l’ouvrier l’exécution de son travail dans certaines conditions légales de durée, d’hygiène, de moralité, ou d’indemniser l’ouvrier du préjudice résultant d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.
Cette première loi sera suivie de plusieurs autres visant à améliorer les conditions de travail des femmes et des enfants et à protéger la santé des travailleurs notamment par la loi du 19 Avril 1898 sur les accidents du travail, issue des travaux de Martin Nadaud (député de la Creuse) puis de Louis Ricard (maire de Rouen), qui fonde la responsabilité de l’employeur quant aux maux découlant de l’activité professionnelle et ouvre la voie à l’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelle et plus tard à la prévention des risques professionnels.( le régime de réparation des maladies professionnelles sera créé plus tard par la loi du 25 Octobre 1919).