Cette attitude, caractéristique du comportement passif-agressif[réf. souhaitée], consiste en une forme de résistance passive à toute fourniture de performance, qu'elle soit personnelle, sociale ou professionnelle.
On retrouve également cette attitude dans la plupart des comportements dépressifs. Comme dans ces phases toute action est rendue encore plus difficile qu’à l’habitude, le sujet préfère reporter au lendemain ce qui ne se révèle en général pas plus fructueux. Il faut distinguer la procrastination d'une part et la perte de plaisir et l'inhibition psychomotrice d'autre part, qui caractérisent l'état dépressif. La difficulté à réaliser une tâche est un point commun mais les mécanismes inhibiteurs de l'action sont très différents. Il faut donc faire un diagnostic différentiel entre état dépressif et procrastination plutôt qu'assimiler les deux troubles. En effet un procrastinateur est normalement actif avec les tâches non problématiques, son inhibition n'est pas générale.
Par ailleurs les personnes adultes sujettes à un déficit de l'attention (trouble de déficit de l'attention et/ou hyperactivité) présentent également très souvent cette attitude, qui ne correspond pas spécialement à une phase dépressive.
La proscratination peut prendre différentes formes selon les personnes, ou selon les circonstances pour une même personne. En règle générale, on procrastine :
Il ne s’agit pas toujours d'un comportement à part entière, car il peut être induit par la pression sociale d'un groupe. Un certain nombre de peurs, pouvant s'ajouter les unes aux autres, se retrouvent au cœur de cette attitude :
Le sujet préfère retarder le travail au maximum jusqu’à estimer qu’il est trop tard pour le faire. Il dispose alors d'un prétexte à l'échec. On retrouve ici par exemple l'une des raisons qui caractérisent le « syndrome de l'étudiant ».
Cette attitude semble liée à une éducation exigeante, fondée sur une culture du résultat. Le sujet prend l’habitude de ne plus pouvoir engager une action sans penser à l’évaluation qui la suivra et cherche alors à éviter les conséquences fâcheuses. La procrastination peut se trouver chez des sujets très doués dans leur domaine et — paradoxalement — manquant de confiance en eux en profondeur.
Exemple : un étudiant qui stresse à l’idée de rendre un mémoire inintéressant.
Le sujet craint qu’en réussissant il s’attire la jalousie des autres et/ou qu’alors il soit chargé de nouvelles responsabilités, de nouvelles attentes plus élevées auxquelles il ne se sent pas capable de faire face. Il essaie alors de ne pas paraître parfait ni trop comblé. Cette peur peut provenir d'une jalousie fraternelle ressentie lors de l’enfance. Il peut aussi avoir la sensation qu’il menace ses parents ou mentor par sa réussite.
Exemple : un employé de bureau qui ne souhaite pas changer de poste.
Le sujet veut avoir le sentiment qu’il domine la situation. Cela peut venir d’un souhait de revanche, d’autonomie : des individus poussés à la performance dans des domaines ne relevant pas de leur ambition propre peuvent choisir la procrastination pour affirmer leur indépendance. Une personne voulant se mesurer à son environnement par goût du risque peut aussi devenir une « retardataire ».
Exemple : un employé qui lutte contre sa hiérarchie à la limite du renvoi ou encore un vendeur au téléphone qui le laisse sonner.
Le sujet souhaite être protégé, conseillé, dirigé ; il est à l’aise en équipe ou lorsque quelqu’un d’autre prend les décisions importantes, comme un enfant dans le cadre familial. Il peut aussi chercher à attirer l’attention sur lui par une situation extrême ou encore savoir qu’il a toujours quelque chose à faire (crainte de la solitude).
Exemple : un élève qui attend que quelqu’un lui fasse ses devoirs.
Le sujet a peur que les autres ne prennent trop de place dans sa vie (croyance qu’il va se faire voler ses réalisations, précédente relation sentimentale ratée, souvenir de personnes envahissantes, etc.). Il peut aussi craindre de dévoiler ses « mauvais côtés » si les autres s’approchent trop de lui et qu’ainsi il se fasse rejeter.
Exemple : Quelqu'un qui arrive systématiquement en retard à ses rendez-vous galants.
Le sujet s'amuse à retarder le plus possible une tâche obligatoire non motivante pour jouer avec le délai et trouver finalement de la motivation ou de l'excitation à faire à temps mais à la dernière minute..
Exemple : Quelqu'un rédige l'ordre du jour de la réunion périodique de son équipe dans le couloir en se rendant à ladite réunion.
D'autres hypothèses existent, travaillées en psychothérapie, à partir des textes freudiens (Inhibition symptôme et angoisse, le cas du petit Hans, l'homme aux rats) et Lacaniens (Commentaires sur le cas du petit Hans, commentaires sur Hamlet, commentaires sur la névrose obsessionnelle). Elles sont retrouvées aussi dans le travail de Nicolas Abraham et Maria Torok dans leur ouvrage : L'écorce et le noyau. Pour les psychologues d'orientation plus expérimentale ou comportementale, ces hypothèses ne sont que des interprétations qui n'ont pas été vérifiées par un plan d'expérimentations ou des études plus ou moins contrôlées.
La procrastination ne peut pas uniquement se comprendre par sa description mécanique et morphologique ; elle a des raisons d'être économiques c'est-à-dire qui participent aux défenses contre de l'angoisse diffuse en rapport avec un manque de parole (un manque de symbolisation) et une culpabilité face à une faute perçue comme diffuse alors qu'elle concerne la difficulté d'admettre la place du père comme lieu de parole structurante. Il y a probablement une confusion entre ses interdictions et ses commandements.
Au lieu d'une relation d'autorité s'instaure une relation de combat où l'enjeu inconscient est la mort de l'Autre.
L'allusion à Hamlet faite par Lacan éclaire cette position ambiguë et nouée au plus profond du Sujet. La question de la place au sein d'une relation intersubjective est posée. Les questions de l'influence, de l'emprise et de la séduction ainsi que de la domination suivent la première.