Sélection intersexuelle - Définition

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Introduction

7 Tétras lyre mâles regroupés sur une aire de parade, leur queue blanche présentée en éventail, bien en évidence
La sélection intersexuelle est particulièrement visible au niveau des aires de parade. Chez le Tétras lyre, les mâles se regroupent et paradent dans des tourbières. Les femelles viennent les observer et s'accouplent parfois avec l'un d'entre eux.

La sélection intersexuelle désigne, en biologie de l'évolution, la pression sélective exercée sur les individus d'une espèce sexuée par le choix, fait par les individus d'un des deux sexes (généralement le sexe femelle), du ou des individu(s) de l'autre sexe qui lui donneront des descendants. Cette forme de sélection sexuelle s'oppose à la sélection intrasexuelle, bien que ces deux mécanismes évolutifs interagissent fortement.

Même si le sexe choisissant l'autre est généralement le sexe femelle, il arrive que le mâle choisisse les femelles avec lesquelles il se reproduit, lesquelles sont alors sujettes à la sélection intersexuelle. Chez certaines espèces, les deux sexes sélectionnent leurs partenaires pour la reproduction. De nombreuses théories ont été développées pour expliquer le fait que ce soit l'un ou l'autre des deux sexes qui choisit ses partenaires. Par commodité, dans cet article, le sexe choisissant ses partenaires d'accouplement (et éventuellement ses descendants) sera désigné, par la suite, comme le sexe femelle, bien que ce ne soit pas toujours le cas.

On a longtemps considéré que la sélection intersexuelle se limitait au choix du partenaire (ou mate choice en anglais) pour la reproduction. On sait maintenant que, chez certaines espèces, les femelles s'accouplent plusieurs fois et opèrent un choix sur les gamètes mâles utilisés pour féconder les ovules, ce qui favorise une compétition spermatique. Il arrive aussi que la femelle s'occupe préférentiellement de certains de ses descendants. On distingue donc le choix du partenaire (ou choix pré-copulatoire) du choix post-copulatoire, et il convient de parler de choix de la paternité (ou de la maternité), plutôt que du partenaire sexuel.

Historique du concept de sélection intersexuelle

C'est Darwin qui crée, dans son livre L'Origine des espèces publié en 1859, le concept de sélection sexuelle. Il détaille par la suite cette notion dans son livre La Filiation de l'homme et la sélection liée au sexe publié en 1871. C'est alors qu'il fait la distinction entre ce que l'on appellera par la suite sélection intersexuelle et sélection intrasexuelle. Si cette dernière est unanimement reconnue par les contemporains de Darwin, l'existence de la sélection intersexuelle est assez controversée lors de la publication de L'Origine des espèces, et met du temps à être reconnue. L'étude de la sélection intersexuelle est ainsi longtemps négligée, et l'on n'accorde aux femelles qu'un rôle passif, limité à la récompense du gagnant de la compétition intrasexuelle.

Cependant, Darwin n'explique pas l'origine du choix des femelles, et de la préférence pour certains mâles, même s'il rajoute un paragraphe sur l'évolution des préférences dans la seconde édition de The Descent of Man, and Selection in Relation to Sex (1874, II, p495). Cette absence d'explication pousse Thomas Hunt Morgan à tourner en dérision la théorie de sélection intersexuelle de Darwin, proposant sur le ton de l'ironie un mécanisme de l'évolution des préférences, dans lequel le caractère préféré et la préférence de ce caractère, tous deux apparus par hasard, coévolueraient et donneraient lieu à un emballement. Pourtant, si Morgan considère ce mécanisme comme ridicule, c'est très sérieusement que Ronald Aylmer Fisher développe en 1915 la théorie du fils sexy (ou emballement fisherien, mécanisme aujourd'hui largement accepté), dont le principe est celui proposé sarcastiquement par Morgan. On ne sait cependant pas si Fisher s'est inspiré de la remarque critique faite par Morgan pour développer sa théorie: il connaît certainement le livre de Morgan au moment où il développe sa théorie, puisqu'il le cite dans un de ses articles publié peu avant, mais il ne fait pas référence à Morgan dans son article sur l'évolution des préférences sexuelles.

L'étude de la sélection naturelle, et celle de la sélection intersexuelle en particulier, est cependant relativement délaissée jusqu'aux années 1970. Ainsi, bien que Alfred Russel Wallace et Fisher évoquent déjà, en 1889 et 1915, des idées s'apparentant à la théorie des bons gènes, il faut attendre la fin des années 1960 avant que d'autres mécanismes de choix du partenaire sexuel ne soient réellement théorisés et testés.

De même, le rôle relatif des deux sexes lors de la sélection sexuelle n'est presque pas étudié jusqu'aux années 1970. Robert Trivers crée en 1972 un cadre conceptuel de base pour cette étude, développant la théorie de l'investissement parental. Celle-ci propose que le sexe pouvant se permettre de choisir l'autre est celui qui investit le plus dans la reproduction. Cette théorie est développée pendant les années suivantes et jusqu'à aujourd'hui, en introduisant de nouveaux facteurs pour expliquer l'existence d'un sexe choisissant, tels qu'un biais de sexe-ratio opérationnel ou des différences de taux de reproduction potentiel entre mâles et femelles.

Plus récemment, l'idée que la sélection intersexuelle ne se limite pas à un choix du partenaire de la reproduction, mais peut continuer à s'exercer après l'accouplement, voire après la naissance, se développe. La notion de choix de la paternité vient remplacer celle de choix du partenaire sexuel, et des théories de sélection intersexuelle post-copulatoire sont construite par prolongement des théories de sélection pré-copulatoire développées jusqu'alors. Des données empiriques récentes commencent aujourd'hui à appuyer ces théories.

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