L'AUA : l'atelier d'urbanisme et d'architecture a rassemblé autour de Jacques Allégret une vingtaine de professionnels de 1960 à 1986, animant l'architecture et l'urbanisme en France et favorisant incontestablement l'émergence de valeurs et de savoirs-faire qui font encore école aujourd'hui.
En 1959 l'urbaniste Jacques Allégret émet pour la première fois l'idée de créer un atelier d'urbanisme et d'architecture, installé rue Bailly dans le 3e arrondissement de Paris avec Jean Perottet, il exprime son intention "d'offrir un lieu qui permette à différents spécialistes de travailler côte à côte sur les mêmes dossiers, d'apprendre à se connaître et à se comprendre".
Il a compris très tôt qu'il faut sortir l'architecture de son isolement, et pour se faire Jacques Allégret achète fin 1959 un bail commercial dans un local de la Cité Champagne dans le 20e arrondissement de Paris. Rejoint par les architectes Jean Perrottet, Jean Tribel et Georges Loiseau et les décorateurs Jacques Berce et Valentin Fabre, il fonde en 1960 l'Atelier d'urbanisme et d'architecture ou AUA.
Sous la forme d'une société civile coopérative, cette association doit permettre la collaboration entre architectes, urbanistes, ingénieurs, décorateurs, et offrir à de jeunes professionnels sans relations ni moyens de partager de grands locaux et de disposer de services communs : local pour le tirage de plans, bibliothèque, accueil, standard.
À partir de 1970 une société civile d'études met à disposition des membres de l'AUA la main d'œuvre dont ils ont besoin. Cette société civile d'études regroupe l'ensemble des salariés permanents, tous services confondus : secrétariat, travaux, chantier, descriptif, dessin. En 1973 l'effectif approche la cinquantaine de salariés, ce chiffre ne sera jamais dépassé. Des travailleurs indépendants viennent périodiquement renforcer les équipes de l'AUA.
En pleine révolte contre l'establishment, ils critiquent l'Académie des Beaux-Arts et le Prix de Rome. Alors que les Prix de Rome construisent l'intégralité des bâtiments publics et que le pactole des grands ensembles fait émerger de nouveaux notables de la profession trop facilement enrichis, les membres de l'AUA s'interrogent sur les modes de productions de la ville et du logement social. Ils ouvrent l'urbanisme et l'architecture aux sciences sociales et c'est avec eux que s'engage publiquement la lutte contre la production dominante de l'après-guerre.
L'AUA est dissout en 1986.
Une des image les plus durables de l'AUA est celle d'un groupe communiste. L'étiquette rouge est vite accolée à l'atelier, or la composition réelle de l'AUA est plus hétérogène et regroupe des militants de tendances diverses. Ancrés à gauche, Les hommes et les femmes de l'AUA travaillent ensemble avec générosité sur un projet social, sans cesse à l'écoute et à la recherche d'un bien être social. Dès sa création, les membres de l'AUA s'imposent comme des hommes de culture : ils rédigent des articles, participent à des publications, donnent des conférences et enseignent volontiers dans les écoles d'architecture, d'ingénieurs, de paysage, ou de design.
L'objectif de Jacques Allégret, fondateur de l'AUA, est de créer une structure capable de couvrir l'ensemble des activités urbaines et architecturales. Conscients qu'il existe des liens intrinsèques entre les études d'urbanisme et le projet d'architecture, les membres de l'AUA veulent démontrer que le processus de construction nécessite une collaboration de tous les les techniciens de l'acte de bâtir. Ce mode de travail pluridisciplinaire est inédit. Même si avec le temps le discours des architectes devient dominant, l'expérience originale de l'AUA marque profondément les esprits, et après 1968, l'idéologie pluridisciplinaire devient l'un des fondement du nouvel enseignement de l'architecture.